Les propos quelque peu ambigus tenus le 19 mai dernier, à Gao, à l’endroit de l’Algérie par le tout nouveau Président français, Emmanuel Macron, ne sont pas tombés dans des oreilles de sourds chez les Algériens. Au contraire, ils ont eu une résonnance de stimulus auprès de nos voisins du Nord. Les médiateurs attitrés de la crise malienne ont enfin décidés à faire bouger les lignes. C’est face au statu quo relatif à la mise en œuvre de l’Accord de Paix et de Réconciliation nationale.
Comme pour se démarquer du double jeu que le Président français a semblé lui coller, l’Algérie, par le biais du Président du Comité de Suivi de l’Accord de paix (CSA) Ahmed Boutache, a adressé une lettre de sommation à la Coordination des Mouvements de l’Azawad (CMA) pour exiger la libération du camp I de Kidal afin de permettre l’installation du Mécanisme Opérationnel de Coordination (MOC).
On se rappelle la pression faite sur notre pays et son voisin du Nord par le Président français pour qu’ils accélèrent la mise en œuvre de l’Accord de paix et de s’engager pleinement dans la lutte antiterroriste. « J’aurais une exigence renforcée à l’égard des Etats du Sahel et de l’Algérie », avait déclaré le Président Macron lors de sa visite à Gao, avant de souligner qu’« on ne peut pas manifester quelque faiblesse que ce soit à l’égard de groupements terroristes, quelles que soient les raisons politiques domestiques». On ignore, certes, la quintessence exacte de ce Phébus mais tout porte à croire que le Président français voulait parler du Chef du groupe Ansar Dine, Iyad Ag Ghali, et de l’attitude pas très claire de l’Algérie vis-à-vis de ce Chef en planque quelque part entre le Mali et l’Algérie. Sur ce dossier, il y a une certaine sensibilité en Algérie parce que mettre en doute sa capacité ou sa manière de lutter contre le terrorisme et sa gestion de la situation au Mali, sonnerait, à coup sûr, de la révolte auprès de Ramtane Lamamra et Ahmed Boutache. C’est chose faite à compter de la fin de la semaine dernière où l’on peut toucher du doigt le mérite qu’ont eu les propos du Président français. A défaut d’inciter à une livraison du terroriste Iyad Ag Ghali, ce qui est peu plausible d’ailleurs, une position du Président Emmanuel Macron pourrait avoir fait sortir l’Algérie de ses gongs. En témoigne la réunion, tenue à Alger, par les membres de la Médiation internationale en présence des Représentants du Gouvernement malien. Au cours de cette rencontre, les participants ont dénoncé le non respect par la Coordination des Mouvements Armés de l’Azawad (CMA) de l’engagement pris de libérer le bâtiment qu’elle occupe à Kidal, une occupation qui empêche l’installation du Mécanisme Opérationnel de Coordination (MOC).
Dans une lettre ouverte qui prouve que le torchon brûle entre le CSA et la CMA, l’Algérien Ahmed Boutache accuse la CMA d’être à l’origine des blocages dans l’application de l’Accord de paix au Mali. S’adressant à Brahim Ould Sidatti, le Représentant de la CMA, le Président du CSA a, dans sa lettre acerbe, accusé les ex-rebelles de ne pas honorer leurs engagements « une fois de plus et une fois de trop », en ne libérant pas le camp 1 de Kidal. Ce camp qui doit servir de base aux soldats du MOC (les patrouilles communes entre signataires de l’Accord de paix et les militaires maliens). Le Chef de la médiation enfonce le clou en demandant à la CMA d’évacuer le bâtiment au risque pour elle de « perdre sa crédibilité et une certaine respectabilité ». Dans l’hypothèse où la CMA ne s’exécuterait pas, la Communauté internationale menace de condamner ses Responsables. Elle envisage de suspendre, avec effet immédiat, le règlement des indemnités de ses Représentants au sein du CSA et des sous-comités thématiques. On en déduit que l’Algérie est décidée à taper du poing sur la table ; histoire de siffler la fin de la récréation parce que l’heure n’est plus à la souplesse de François Hollande ; les commandes de l’Elysée étant désormais aux mains d’un jeune loup «aux dents longues » qui voile à peine sa fougue.
Katito WADADA : LE COMBAT