vendredi 22 novembre 2024
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Insécurité au Sahel : Qui sont les personnes derrière le commerce des armes et leur circulation ?

La guerre et les autres formes de violences font des dégâts humains et matériels considérables. Tous unanimes là-dessus. Au-delà de cette conséquence destructrice,  elles font aussi vivre, à travers  des cadres souvent règlementés ou illicites, des millions de personnes. De quoi la nécessité de jeter un regard objectif sur la fabrication, le mode de vente et la circulation des  armes à travers le monde.

Nous avions jugé nécessaire d’y pencher bien que le sujet ait une portée vaste. Les conflits qui se prolongent depuis des années, voire des décennies ont des conséquences humanitaires désastreuses et durables. Il ne s’agit pas seulement des effets directs des représailles  contre des individus ou des communautés à travers des morts d’Hommes ou des blessés graves, mais aussi des conséquences indirectes que sont la perturbation notamment de la vie sociale et l’anéantissement des services essentiels (formels ou informels). Outre  des pertes en  vies humaines  et des destructions immédiates, des déplacements forcés, souvent à grande échelle, de la dégradation des services publics, des dangers toujours plus grands qui guettent parfois même les secouristes, personnels de santé et humanitaires, et des violations persistantes du droit international humanitaire, des armes classiques et modernes sont suffisamment disponibles dans les zones en conflit malgré qu’elles ont de graves conséquences humanitaires à la fois immédiates et cumulées (500.000 morts par an dans le monde).
En Libye, tout comme au Mali, une vaste part des stocks d’armes échappe encore à tout contrôle. Le conflit armé fait payer un lourd tribut aux pays en insécurité: décès, blessures, mutilations, déplacements… Les services publics ne cessent de s’effondrer de plus en plus  dans les Régions touchées. Des interrogations sur le plan d’approvisionnement des malfaiteurs ont toujours été faites, mais sans aucune réponse concrète. Eu égard à l’évidence, c’est avec les armes que les gens font la guerre, n’y a-t-il pas mieux alors de revoir le traité sur le commerce des armes et aussi de veiller à son application au niveau international et  d’adopter une véritable politique de lutte contre la prolifération des armes au niveau national ? Cela est  une voie devant permettre un climat stable  en prévenant les souffrances humaines qui en résultent.

Un traité de leurre ?

Le Traité sur le commerce des armes impose des contrôles stricts sur les transferts d’armes aux belligérants et aux autres acteurs armés. Ces règles se fondent sur le devoir de faire respecter le Droit International Humanitaire. Tout comme les Conventions de Genève, le Traité sur le commerce des armes, selon les signataires, vise à protéger les populations, à sauver des vies humaines et à réduire les souffrances, en application du principe universel d’Humanité. La prévention du détournement et de l’usage abusif des armes va de pair avec le maintien de la paix, de la sécurité et de la stabilité. Ces deux domaines d’actions sont étroitement liés. Mais, malheureusement, les violations de cette disposition  et des Droits de l’Homme menacent  la paix et la sécurité au plan régional et international. Les intérêts économiques, diplomatiques et d’ordre sécuritaire prennent le dessus sur les impératifs humanitaires. Il est primordial que le point de vue humanitaire et, en particulier  le respect des Droits de l’Homme soient systématiquement placés au centre de la prise de décisions, comme l’exige le Traité sur le commerce des armes.
En mi-juin dernier, l’une des plus grandes organisations de défense des Droits de l’Homme dans le monde, Amnesty International, a lancé une pétition exigeant au Président français, Emmanuel Macron, la transparence et le contrôle sur les ventes d’armes. Cette pétition laissait percevoir que le pays de De Gaule, bien qu’il s’est engagé à ne pas autoriser de transferts d’armements s’il existe un risque important que ces armes soient utilisées pour commettre ou faciliter des violations graves des Droits humains et du Droit international humanitaire, opte pour le revers de cette démarche précitée dans ses opérations.  «La France exporte des armes à l’Égypte, qui connaît une répression des droits humains sans précédent. Elle est également l’un des premiers fournisseurs d’équipements militaires de l’Arabie Saoudite et des Émirats arabes unis, membres de la coalition engagée au Yémen et responsables de milliers de victimes civiles » déplorait le bureau de communication de l’Amnesty International. Les promesses qui ont été  faites  par le locataire de l’Élysée, Emmanuel Macron, lors de la campagne à l’élection présidentielle de 2017,  de mettre en conformité les exportations françaises d’armes, de sécurité et d’équipements connexes avec le traité sur le commerce des armes de respecter les engagements internationaux de la France en matière de ventes d’armes , jusque-là,  dans la réalité sont émaillées  du manque de transparence. Les transferts d’armes de la France vers l’Arabie saoudite et les Émirats Arabes Unis en dépit de leur engagement dans le conflit au Yémen, et les révélations faites par le média d’investigations, Disclose, confirmant le déploiement de ces armes au Yémen, en disent long. Ils sont une parfaite illustration des graves manquements de la France  au regard du Traité du Commerce des Armes. La France même n’a-t-elle pas reconnu, en juillet dernier, que les armes découvertes sur une base désertée par les forces du maréchal Khalifa Haftar, près de Tripoli, lui appartenaient ? D’où la raison d’affirmer sans risque de se tromper que des armes des Grandes Puissances  occidentales sont souvent utilisées contre des populations ou des biens civils.

Faille  des structures impliquées

L’un des aliments nourriciers de l’instabilité dans le monde en général et en Afrique en particulier est l’opacité dans les ventes d’armes et leur circulation. Dans les pays en insécurité comme le Nigeria, le Burkina Faso, le Mali, le Niger, maintes allégations, ont fait état du ravitaillement des mouvements armés en armes de marques occidentales. Parfois, dépassant même la capacité de celles acquises par les forces normales.
Pour le cas du Mali, beaucoup restent à faire. Plus  de 140.000 armes appartiennent aux particuliers qui les détiennent illicitement, selon l’office central de lutte contre la prolifération des armes légères et des petits calibres. Avec un territoire vaste de 1.241.000 Km2 et plus de 7000 Km de frontières terrestres qu’il partage avec sept pays frontaliers, les grandes distances, la faible densité dans certaines zones comme les régions du  Nord, la porosité de ces frontières et les faibles ressources financières budgétaires rendent difficile le contrôle adéquat .Ce fait sert d’escalier pour les bandits armés qui opèrent jusque-là en maitre absolu et qui ne ratent aucune occasion (attaques ou autres) pour renforcer leur dispositif en emportant  des équipements militaires importants. Face à cette situation désastreuse, les  institutions sont loin d’être en mesure de répondre à la demande positivement des populations en matière de sécurité. Dans plusieurs localités ou Régions du Centre et du Nord, les mouvements armés ont réussi, en l’absence de l’Armée régalienne, à imposer  leur paulicien (l’application de la loi et de maintien de l’ordre dans la société). Et cet exercice qui se normalise davantage sous les yeux des populations abandonnées facilite l’émergence du phénomène de groupes d’autodéfense. La récente marche à Mopti contre le désarmement de la milice Dan Ambassagou ne nous démentira pas.
En somme, un sursaut collectif national est alors nécessaire  afin d’éviter un basculement pouvant engendrer  une autre triste aventure.
Seydou Konaté

COULIBALY

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