Si l’on s’en tient aux discours officiels, le Mali mobilise tout pour vaincre l’intrépide virus. C’est pourtant ce dernier qui semble mener les offensives sur tous les fronts.
Le président de la République, Ibrahim Boubacar Keïta, a réuni le 17 mars dernier une réunion extraordinaire du Conseil Supérieur de la Défense Nationale consacrée à la pandémie du Coronavirus. Pour ce faire, il a fallu d’abord constater que la guerre est inévitable et qu’il fallait donc y faire face résolument. D’importantes mesures ont été alors prises et vite édictées, dont la mise à disposition par le chef de l’État d’une enveloppe initiale de 6,3 milliards de francs CFA comme budget pour le combat. Mais on ne saura jamais certainement si cet important pactole, ce nerf de la guerre a été mobilisé, si oui, à quelles fins.
Tout compte fait, une semaine après la réunion extraordinaire du Conseil Supérieur de la Défense Nationale, deux cas testés positifs au Coronavirus ont été révélés officiellement dans la matinée du 25 mars par un communiqué du ministre de la communication, porte-parole du gouvernement. Dans la soirée, le président de la République s’est adressé à la nation en chef de guerre. Comme s’il avait alors énervé le virus, celui-ci apparaît le lendemain sur quatre de nos compatriotes. Puis, le décompte journalier s’alourdit au fil du temps. De deux, on s’est retrouvé à quatre, à sept, puis onze, treize, seize… Le chiffre 20 est vite atteint par jour, et 21, 26, etc. À la date du mercredi 22 avril, les services sanitaires ont enregistré 35 nouveaux cas sur un chiffre de 147 échantillons testés. Le total des cas positifs à ce jour s’élève à 293 tandis que 2023 contacts font l’objet d’un suivi quotidien. À cette cadence, le guerrier ennemi Coronavirus est bien en train de prendre de vitesse sur tous nos dispositifs de guerre si tant est que ceux-ci soient déployés effectivement.
Dans l’intervalle, les Maliens ne se font pas d’illusions que l’Assemblée nationale est la première institution hautement infestée. Le député Hadi Niangadou a dû révéler sa positivité après un communiqué indicatif du Parlement. Puis, plusieurs cas sont mis à jour, qui ont abouti au décès de l’honorable Belco Bah le mardi 21 avril.
Le Coronavirus semble même se gargariser du malin plaisir de frapper dans les sphères où la réalité de son intrépidité ne peut être cachée. Parmi les 35 cas avérés de ce mercredi, 22 avril, il y a celui de l’ancien Premier ministre Moussa Mara qui a lui-même rendu public le test positif le concernant. À l’Ortm, média d’État, quatre personnes se trouvent déjà en isolement. Pour ce qui est de la primature, le sieur Babaly Bah, conseiller du chef du gouvernement, est testé positif.
Avec une telle virulence, la pandémie sera-t-elle vaincue ? Le Mali a-t-il les armes nécessaires pour combattre l’ennemi invisible ? Telle est la question que se posent nos compatriotes, anxieux comme ils ne l’ont jamais été face à un drame. Les précautions prises par les plus hautes autorités bénéficient certes d’une communication tous azimuts, mais il faut craindre que cela ne se limite à l’effet d’annonce. On en voit en tout cas peu les effets dans le quotidien des populations.
Bogodana Isidore Théra