En Afrique, il est toujours important que nous nous rappelions qu’autrefois nous avions une organisation sociétale et des valeurs civilisationnelles dont tous les éléments ne sont pas à bannir. Nous avions des valeurs dont il conviendrait de garder une mémoire. Dans nos sociétés, avant toutes influences venues d’ailleurs, il y avait déjà des règles qui imposaient des principes de respect de la Femme, de la sœur, de la mère, de la compagne.
Dans les traditions maliennes la structure familiale est clairement hiérarchisée dans l’ordre suivant : Le père (homme-figure patriarcale) ; la mère (femme-socle du ménage et du devenir de la famille) ; le fils (garant de la perpétuité de l’héritage matériel et immatériel) ; la fille (femme-appelée à partir devenir le socle d’une autre famille ailleurs un jour).
Dans cette structuration, est mis en évidence le rôle de l’homme, communiquant une image de force et de puissance qui sécurise la famille. Cependant le rôle de la femme est éminent. Il est, en toute discrétion, à l’image des trois pierres traditionnelles disposées de sorte à former un triangle dont le centre constitue le foyer dans lequel brulent tous les jours les flammes qui symbolisent l’énergie vitale de la famille.
Un adage bamanan dit que «lorsque ton semblable te dépasse lors des cycles d’initiations ou sur le champ de bataille, ses performances ne signifient pas ton échec pour autant. Mais s’il te dépasse au moment du choix des épouses, à jamais il te devancera dans toutes les autres entreprises dans la vie». Au Mali, dans les traditions, l’idéal d’homme correctement élevé est un compagnon qui n’a pas besoin d’humilier sa femme pour démontrer son autorité et se sentir puissant. L’idéal de femme bien éduquée est une compagne, une associée qui exerce un pouvoir au sein de la famille en toute discrétion par sa perspicacité, sa capacité de prévoyance et d’anticipation, de gestion et d’organisation, de recul, par sa capacité d’endurance et de persévérance.
Le pagne d’une femme n’est qu’un rectangle de tissu dont l’on s’enveloppe en le croisant et le nouant savamment par l’extrémité supérieure au niveau de la hanche à gauche. Mais un pagne bien noué par une femme dans sa plénitude ne tombe jamais, jamais une femme digne ne perd pas son pagne. Un homme digne se bat pour obtenir de la terre ce qu’il faut pour remplir les greniers ; un homme se bat sur le champ de bataille pour préserver la patrie. Un homme, un vrai, n’a pas besoin d’humilier, de brutaliser, de tuer sa femme pour s’affirmer.
Heureux ménages à ceux qui prennent l’engagement d’une vie partagée dans l’équilibre et le respect !
Rokia Traoré