Cette fois, les Maliens ont la bonne nouvelle. Après de fausses alertes durant la semaine, les deux otages, le chef de l’opposition malienne Soumaïla Cissé et la Française Sophie Pétronin ont été libérés ce jeudi 8 octobre 2020. Cette libération intervient après la remise en liberté de plusieurs dizaines de jihadistes par les autorités maliennes.
C’était formidable quand on voit comment les Maliens ont accueilli Soumaïla Cissé. Son avion a atterri vers 22 h 30 comme prévu. L’aéroport autant que son domicile était bondé de monde. Chacun veut voir de ses propres yeux cet homme qui a été enlevé plus de 6 mois. Le son de tam-tam, les éloges tout y était. On peut tout simplement dire que l’allégresse était à son comble. Turbané avec un tissu blanc, on voyait à peine son visage à travers la vitre de la voiture dans laquelle il était installé. D’une main à peine soulevée, Soumaïla Cissé a salué la foule qui hurlait tout au long du parcours de l’aéroport avant que la délégation ne prenne la route pour Koulouba, selon les informations reçues.
En effet, l’une, Sophie Pétronin, est retenue au Mali depuis le 24 décembre 2016. Elle avait été enlevée alors qu’elle officiait comme travailleuse humanitaire à Gao. L’autre, Soumaïla Cissé, chef de file de l’opposition malienne, avait été enlevé par des hommes armés dans le nord du Mali en mars dernier alors qu’il faisait campagne pour les législatives.
Ces deux libérations ont eu lieu après la libération par les autorités maliennes de plusieurs dizaines de jihadistes et de présumés jihadistes. Des discussions étaient engagées entre les autorités maliennes et les ravisseurs depuis des mois.
Les coulisses de la libération
La séquence de la libération commence pendant le week-end, lorsque plusieurs dizaines de prisonniers jihadistes sont sortis de leur cellule et convoyés vers Tessalit, dans l’extrême nord du Mali. Ils sont accusés d’appartenir à des groupes terroristes jihadistes, liés à Al Qaïda au Maghreb islamique. Diverses sources, sécuritaires et judiciaires, confirment qu’ils doivent servir de monnaie d’échange. C’est la première contrepartie.
Combien sont-ils précisément ? 100 ? 150 ? 200 ? Les diverses sources contactées affirment ne pas pouvoir être précises : ces libérations extrajudiciaires sont par définition secrètes et, si certains prisonniers étaient détenus à la Maison d’arrêt centrale de Bamako, d’autres sortiraient de sites de la Sécurité d’État, les services de renseignement maliens. Dans tous les cas, c’est un nombre important, très important, même de combattants qui est sur la table.
La décision de les libérer a-t-elle été prise par les nouvelles autorités maliennes ? Par le président déchu, Ibrahim Boubacar Keita, sans qu’il n’ait pu mener l’opération à son terme ? La France a-t-elle été consultée ? Ou la Mission des Nations unies dans le pays ?
La seconde contrepartie, c’est la rançon. À ce stade, seules, circulent des rumeurs et aucune information fiable. Lors des précédentes libérations d’otages dans la zone, les montants ont atteint plusieurs dizaines de millions d’euros.
Libération de Sophie Pétronin, fin de quatre ans de captivité
Sophie Pétronin avait déjà échappé de peu à un enlèvement par les terroristes en 2012. Auparavant, la Française œuvrait depuis 2001 en faveur des orphelins et des enfants souffrant de malnutrition à Gao. En 2012, elle avait pu sortir in extremis du consulat algérien, où elle s’était réfugiée, et être exfiltrée du pays sous un déguisement avant que les djihadistes ne prennent le contrôle de la zone.
L’année suivante elle retourne pourtant à Gao et trois ans plus tard, la veille de Noël, elle est finalement enlevée en plein jour. Les premiers mois de sa captivité : c’est le silence, pas de trace de vie Sophie Pétronin et aucune revendication. Il faut attendre juillet 2017 pour que le GSIM, le JNIM selon son acronyme en arabe, diffuse une vidéo montrant la septuagénaire. À la fin de l’enregistrement, un homme en appelle à l’intervention d’Emmanuel Macron. Un signe que les ravisseurs sont prêts à négocier, pense alors la famille de l’otage qui croit encore à un dénouement proche. Mais les mois passent et Sophie Pétronin reste captive.
Mi-juin 2018, sort une nouvelle vidéo. L’humanitaire française y apparaît très fatiguée, visage émacié. C’est elle qui en appelle alors au président Macron. En novembre de la même année, ses ravisseurs affirment dans un nouveau message que son état de santé s’est dégradé. Cette fois, elle n’apparaît pas. L’inquiétude grandit parmi ses proches.
Enfin, les deux otages de luxes pour les terroristes viennent d’être libérés, l’un après 6 mois et l’autre après 5 ans de captivité aux mains des ravisseurs. Selon certaines sources, au total 4 otages auraient été libérés. Également deux otages de nationalité italienne seraient libérés hier.
La Rédaction et RFI