jeudi 12 décembre 2024
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BOUBOU BILALY DIALLO, PROFESSEUR DE L’ENSEIGNEMENT SECONDAIRE A PARIS : « Le pouvoir monétaire est indissociable de la souveraineté nationale… »

L’événement qui a le plus détourné le Mali de la voie de l’émergence ouverte par les pères de l’indépendance est sans doute le coup d’Etat militaire du 18 novembre 1968 contre le président Modibo Kéita. Le père de l’indépendance du Mali, le panafricaniste, l’anticolonialiste.
Aujourd’hui, on se rend compte que cela a été la chose la plus stupide contre l’émergence de notre pays, le Mali. Le président Modibo Keita était convaincu que l’émergence d’une nation, comme la nôtre, n’était possible qu’en comptant sur nos propres forces. Il avait, dans ce sens, instruit aux Maliennes et aux Maliens la culture de la fierté nationale, du travail collectif et l’honnêteté.
Convaincu de son combat pour l’émergence du Mali, il avait valorisé l’agriculture, l’élevage, la pêche. Il avait fait de l’Ecole malienne la colonne vertébrale de son combat avec la création des grandes écoles (ENA, EN Sup, ENI…) Et cela avec l’ambition de former le Malien à être apte à contribuer au développement du pays.
Le regretté père de l’indépendance avait construit des infrastructures (barrages, routes, usines…), créé des entreprises nationales, notamment la Somiex, pour valoriser et commercialiser les produits nationaux (made in Mali) dans tout le pays et dans tous les secteurs de la production nationale.
Visionnaire, panafricaniste qu’il était, il avait créé la monnaie nationale, le Franc malien ! Selon le défunt président, le pouvoir monétaire est indissociable de la souveraineté nationale, de l’émergence économique. Il avait compris que l’émergence du Mali et de l’Afrique était liée au pouvoir monétaire, d’où la nécessité de créer une monnaie commune africaine.
Voilà, aujourd’hui, que l’histoire lui donne raison. Depuis quelques années, les pays de la zone F CFA veulent créer une monnaie commune puisque le F CFA est devenu aujourd’hui un outil d’appauvrissement et de la servitude. C’est dans cet élan et cette conviction d’homme souverain et émergent qu’il a été renversé par un coup d’Etat militaire qui n’avait qu’un seul but : faire dévier notre pays de la voie de l’émergence !
Que reste-t-il de l’indépendance du Mali ? Que du regret ! Le regret que de constater que le président Modibo Kéita a été empêché d’aller au bout de son combat idéologique et patriotique.
L’abandon de la politique socio-économique du président Modibo Kéita par le Comité militaire de libération nationale (CMLN) dirigé par le lieutenant Moussa Traoré a été un frein au développement de notre pays. Ses compagnons de lutte ont eu de la peine à défendre ses idéaux d’homme souverain, de justice sociale, de liberté et de paix. Ils ont subi toutes sortes de violence, de persécution et de brimades afin de les décourager à reprendre la flamme du patriotisme et maintenir le pays sur la voie de l’émergence.
Le régime militaire, en 23 ans de règne, n’a pas pu faire mieux que le président Modibo Kéita et son gouvernement 8 ans seulement CMLN de Moussa Traoré a saboté et anéanti tous les efforts entrepris par le président Modibo Kéita. Du coup d’Etat de 1968 à nos jours, la mauvaise gouvernance, la corruption et le vol du denier public sont devenus une religion au Mali. Et cela est vraiment regrettable.
Il faut dire aussi qu’avec l’avènement de la démocratie en 1991, les héritiers politiques du président Modibo Kéita n’ont pas été à la hauteur du combat politique à cause des rivalités internes au sein même de leur formation politique, l’US-RDA. Mais retenons tout de même que le président Modibo Kéita était un patriote qui croyait au destin de son pays.
Remettre le Mali sur la voie de l’indépendance politique et économique nécessite une prise de conscience collective de nos dirigeants et des populations pour combattre la mauvaise gouvernance, la corruption et le vol du denier public.
Il faut la mise en œuvre d’une vraie politique de développement permettant la création d’emplois, l’amélioration des conditions de vie des populations, l’accès à la santé, à l’éducation, à l’assainissement et favoriser les conditions permettant l’autosuffisance alimentaire en soutenant l’agriculture, l’élevage, la pêche, et le développement de l’artisanat, le tourisme, etc.
Le gouvernement doit encourager les initiatives privées pour booster l’économie du pays, favoriser l’évolution du secteur informel vers le marché formel et pérenne. Et, enfin, traiter et maintenir des relations économiques et bilatérales basées sur le gagnant-gagnant avec d’autres partenaires financiers en dehors du système classique et colonial.
Si on parvient à créer ces facteurs de développement socio-économiques, on pourra remettre le Mali sur la voie de l’indépendance politique et économique. Je suis optimiste qu’avec la nouvelle génération consciente de notre pays, ce défi politico-économique pourra être relevé.

Djibril Coulibaly

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