samedi 23 novembre 2024
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Délestage à Bamako : Les contre-vérités du Directeur Général d’EDM-sa

Alors que Bamako sombre dans le noir, à cause d’un délestage sans précèdent, le Directeur Général d’EDM-sa (manifestement à court de solution), préfère servir des contre-vérités aux consommateurs sur la télévision nationale.

 

Sur le plateau du «Journal Télévisé» (JT) de 20h de l’ORTM, le Directeur général d’EDM SA n’a eu aucune gêne d’affirmer qu’il n’a pas de personnel qualifié pour assurer la maintenance de ses groupes électrogènes et qu’il doit faire venir des experts positionnés dans le Sénégal voisin.

Pour juguler les délestages sauvages imposés à la capitale, il va falloir affréter un avion pour chercher des experts positionnés à Dakar pour venir assurer la maintenance des groupes. Certainement inconscient de la portée d’un tel aveu d’irresponsabilité pour un pays  qui a eu son indépendance la même année que le Sénégal après l’éclatement de la Fédération du Mali. Que notre système éducatif, malgré que l’Ecole Nationale des Ingénieurs (ENI) soit une référence africaine, n’ait pas été performant pendant 60 ans pour former des techniciens et des ingénieurs de maintenance, cela passe. Mais, que depuis des décennies qu’Energie du Mali ait été  incapable d’initier une politique de formation afin de créer une expertise nationale pour la maintenance d’un pan important de son patrimoine est inacceptable voire révoltant.

«La période du coronavirus et la fermeture des frontières nous a contraints à ne pas mettre des groupes en production parce que ça représente de très gros risques pour la production d’électricité», a souligné Boubacar Kéita, le DG de «Energie du Mal».

Et pourtant, cela fait au moins un an que les délestages font partie du quotidien des Bamakois sans qu’aucune solution pérenne n’ait été trouvée ; la seule différence par rapport à la situation est la fréquence des coupures. C’est pourquoi ils étaient sans doute nombreux les citoyens dépités et les cadres valable et compétents de la boîte qui ont assisté incrédules à cette honteuse sortie médiatique de leur boss. Selon eux, le vrai problème est que les meilleurs cadres et ingénieurs sont écartés parce qu’ils n’ont pas la même vision de la résolution des problèmes de cette boîte à effectif pléthorique (EDM est devenu un centre de recasement des militants et des proches pour des barons du pouvoir). Certainement que miser sur l’expertise nationale laisse peu de marge pour les commissions.

A EDM, des cadres ont une autre version. Primo, la crise actuelle est en partie liée au blocage de la révision de la Centrale de Sirakoro par l’actuel ministre dès sa prise de fonction et pour des raisons qu’il est le seul à connaître.

Secundo, l’entretien des groupes arrêtés à la BID et à Darsalam n’a jamais été une priorité pour la direction parce qu’elle a plutôt misé sur la très coûteuse (et sans doute juteuse) location des groupes avec Aggreko. Ce que le DG d’EDM a évoqué sur le plateau du JT du mercredi 06 mai n’est que sornette mettant à nu les pratiques mafieuses au niveau des services publics de notre pays.

Le comble de l’irresponsabilité

Comment comprendre qu’après 60 ans d’indépendance, le Mali n’ait pas d’ingénieurs capables d’entretenir des groupes qui ne sont même pas de la nouvelle génération ? Soit ! Mais, avec toute l’expérience cumulée depuis la création de cette société, comment peut-on continuer à acheter des groupes sans exiger dans le contrat la formation des techniciens comme cela se fait dans toutes les entreprises sérieuses ?

La concurrence entre constructeurs sert aussi. Mais, quand on est plus regardant sur ses propres commissions que sur la durabilité de l’investissement, on fait aisément fi de toutes les garanties pouvant bénéficier à la société ou à l’Etat. Et c’est se moquer davantage des Maliens que de dire que «la société vend le groupe et non la technologie». Le transfert demandé ici porte sur l’entretien et non sur la fabrication. En la matière, il n’y a rien de plus naturel et légitime que d’inclure dans les clauses du contrat la formation des techniciens et ingénieurs locaux pour l’entretien.

Comment peut-on oser venir mentir en direct à la télévision aux Maliens et aux étrangers contraints de regarder le JT de la télévision nationale pour une raison ou une autre ? Ce n’est pourtant pas surprenant parce que depuis 2013, le mensonge et le bluff ont été érigés en stratégie de communication par nos décideurs. Ce qui témoigne du manque de respect de nos dirigeants envers le peuple.

Toutes ces situations montrent jusqu’à quel niveau la gouvernance du pays a sombré. Et contrairement à ce que certains peuvent penser après avoir entendu le DG d’EDM SA à la télévision nationale, notre pays n’est nullement confronté à un manque de ressources humaines qualifiées. Le problème est que, au Mali, le pouvoir n’a jamais besoin de cadres compétents et responsables,  mais de bénis oui-oui serviables et modelables à souhait.

«Modibo Keïta nous disait, ayez peur de l’argent, ayez peur de l’argent. Quand tu deviens l’esclave de l’argent, tu perds ta dignité», aimait répéter le regretté Seydou Badian Kouyaté pour éveiller la conscience citoyenne et l’esprit patriotique de la jeunesse malienne ! Malheureusement, ils ne sont pas nombreux nos cadres, surtout les jeunes, qui hésitent encore à tout sacrifier pour être riches.

Quand vous êtes conscients que vous occupez un poste sans le mériter par la compétence, vous rengainer votre orgueil et votre dignité pour tout accepter, y compris d’être les agents d’exécution de toutes les malversations possible. C’est pourquoi il n’est pas surprenant que les cadres préfèrent être humiliés et traînés dans la boue que de démissionner.

Hamady Tamba

Djibril Coulibaly

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