7 mars 2006-7 mars 2020 ! Cela fait déjà 14 ans que le blues est orphelin de son chantre, que Niafunké est orpheline de son maire et paysan-pilote, que le Mali est orphelin de l’un de ses meilleurs ambassadeurs dans le monde. Né le 31 octobre 1939 à Kanau, Ali Farka Touré s’est éclipsé le 7 mars 2006 à Bamako. Une fois n’est pas coutume, nous allons lui rendre hommage cette année à travers un homme que nous avons surnommé le «Gardien du Temple Ali Farka». L’adage dit que «derrière chaque grand homme il y a une femme» ! Nous ajouterons que derrière chaque grande star, il y un grand manager dans l’ombre, un homme ou femme qui veille scrupuleusement à tout et à qui rien n’échappe. Du côté d’Ali, cet ange gardien se somme Amadou Sankaré dit Diadié, cette icône de l’entrepreneuriat au Mali.
«Amadou Diadié Sankaré a été tout pour Ali Farka Touré. C’est celui qui payait son billet d’avion pour aller suivre les concerts d’Ali Farka un peu partout dans le monde», témoigne Aly Guindo, fondateur et premier coordinateur de la Fondation Ali Farka Touré (FAFT). «Et quand l’artiste est tombé malade, c’est lui qui le suivait, veillait à ce que les rendez-vous médicaux soient respectés…», poursuit-il.
«Quand j’ai abordé avec Ali l’idée d’une fondation à son nom, il m’a dit : Laisse-moi en discuter avec Diadié parce que je ne peux rien faire sans le consulter et sans son adhésion», ajoute Aly, le neveu du bluesman du désert.
Camarade d’enfance, ami, frère, manager, conseiller… Diadié a été et demeure vraiment «l’homme à tout faire» de l’illustre disparu. «Si je suis à ce niveau, ce n’est pas seulement par mon talent. Les conseils et le soutien de Diadié m’ont beaucoup aidé à franchir des obstacles, à franchir des caps dans ma carrière», nous a souvent confié le regretté Ali Farka Touré lors de nos fréquents entretiens.
Et aujourd’hui, plus que jamais, Diadié veille au grain. Il veille à une gestion transparente, juste et équitable des royalties ; œuvre à maintenir l’image intacte et à perpétuer l’héritage. Et toujours dans la plus grande discrétion qui est l’un de ses traits caractéristiques.
«Il a la confiance de toute la famille parce que chacun sait le rôle qu’il a joué dans la vie et la carrière d’Ali. Et les héritiers savent que si Diadié n’en rajoute pas, il ne soustraira jamais un copeck de leur dû. Il demeure le trait d’union de la famille», nous a confié un proche de la famille qui a requis l’anonymat.
Quand il parle de Niafunké, Diadié Sankaré adore surtout égrener ses souvenirs d’enfance et ceux du Mali paisible qu’il a intimement partagés avec son pote Ali Farka Touré. «Je ramenais régulièrement Ali Farka à Niafunké. On s’arrêtait sur le bord des routes pour faire des pauses. Quand les gens le reconnaissaient et commençaient à s’attrouper autour de nous, alors il sortait sa guitare et acceptait de chanter avec eux», se rappelle-t-il.
Homme de devoir et de conviction
En plus de son sens inné de l’humour, Diadié retient de son pote «son humilité, son patriotisme, sa générosité, sa simplicité, sa courtoisie et son accessibilité ainsi que son attachement aux valeurs culturelles, à son terroir et à son pays». En dehors de l’amitié, nous dirons surtout de la fraternité, Diadié et Ali avaient en commun la simplicité, l’humilité, la générosité, l’engagement patriotique.
Après une maîtrise en économie et sciences de gestion à l’université Cheick-Anta-Diop de Dakar (Sénégal), un DESS en comptabilité au Conservatoire national des arts et métiers à Paris (France) puis un MBA en ingénierie comptable et financière et management des sociétés à l’université du Québec à Montréal, ce fils de médecin est rentré au Mali avec la farouche volonté de relever les défis sans brûler des étapes.
La soixantaine sportive et assumée avec élégance, Diadié est un homme d’affaires promoteurs de plusieurs sociétés et entreprises dont l’une des plus connues est sans doute la Société africaine d’études et de réalisations (SAER). Une brillante réussite qui n’a jamais entamé l’humour et surtout la fascinante humilité de cet homme de devoir et de conviction !
Moussa Bolly