A chacun son ennemi et sa marge de manœuvre ; tel semble se résumer aujourd’hui, la situation sécuritaire qui prévaut au Mali. Cette situation caractérisée par une guerre asymétrique est à mettre à l’actif des factions djihadistes issues des dernières fusions des groupes extrémistes sévissant dans le Nord de notre pays depuis mars 2012. Il s’agit de «Nosrat Al-Islam Wal Mouslimine» dirigé par Iyad Ag Ghali, le Chef du mouvement djihadiste Ançardine, du Groupe de Soutien à l’Islam et aux Musulmans (GSIM) dont le Leader peine à se démarquer. On peut citer, dans une certaine mesure, le groupe Ansarul Islam avec à sa tête l’Imam burkinabé Ibrahim Dicko dit Malam. Ces trois entités disposent chacune d’une cible bien précise et d’une zone d’action de prédilection.
Le Nord, les frontières de l’Est et Ouest de notre pays ainsi que son centre sont pris en sandwich par ces nébuleuses qui s’en prennent soit à tout ce qui est représentation de l’autorité malienne, soit aux forces étrangères opérant sur le territoire malien notamment la MINUSMA.
Force est de constater que les soldats français engagés dans la force Barkhane obtiennent des résultats, mais ils n’arrivent pas pour autant à empêcher la propagation des foyers de violences au Mali et, plus largement, dans la bande sahélo-saharienne. Mines, embuscades, attaques kamikazes, tirs de mortiers, l’amplitude de ces attaques ne faiblit pas. De Kidal à Tombouctou en passant par Tessalit, Ménaka et Gao, toutes les bases des forces armées sont sous le feu des mortiers djihadistes. «Au total, le nombre des attaques revendiquées par des groupes extrémistes violents a pratiquement triplé, passant de 28 en 2015 à 85 en 2016 », selon l’ONU. A la baguette de ces revendications, «Nosrat Al-Islam Wal Mouslimine» et le GSIM se partagent le Nord. Le regroupement dirigé par Iyad Ag Ghali intervient aussi au Centre du Mali parce qu’ayant absorbé en son sein le mouvement du Prédicateur radical de la Katiba de Macina, Amadou Koufa. Si Iyad Ag Ghali et Amadou Koufa semblent résolus à consacrer leurs attaques aux Représentations de l’Etat malien pour se limiter aux menaces vis-à-vis des forces étrangères ; le nouveau né GSIM aux dents longues, lui, cible plutôt la MINUSMA. En témoigne l’attaque à l’aide de mortiers et de roquettes menée le mercredi dernier contre le camp de la force onusienne à Tombouctou. On déplore la mort d’un Casque bleu libérien et de 9 autres blessés. Le GSIM avait déjà montré ses capacités de nuisance en lançant des attaques armées contre des positions de la MINUSMA. Début avril, un militaire français, relevant de l’opération Barkhane déployée au Sahel, a été tué par des éléments du GSIM.
La contagion d’insécurité se propage du Nord au Sud du Mali dans un mouvement qui semble irrésistible. Ce phénomène a commencé, il y a deux ans, par un effondrement de la sécurité au quotidien au Sud de la boucle du Niger. La loi, l’ordre et ce qui restait de l’appareil régalien de l’État malien dans cette Région fortement peuplée se sont retirés. C’est dans ce contexte qu’est apparu le groupe Ansarul Islam de l’Imam Ibrahim Malam Dicko dont les fidèles se déplacent régulièrement d’un côté comme de l’autre de la frontière entre le Burkina et le Mali. Constituant l’ennemi numéro 1 des services de sécurité burkinabé pour ses attaques contre les forces armées de ce pays, de même que du côté malien, l’Imam n’épargne nullement les FAMA dans ses ambitions de récréer un grand Royaume peulh dans la Région frontalière de Djibo. On se rappelle encore son attaque perpétrée, le 5 mars dernier, contre la Base militaire de Boulikessi, dans le Centre du Mali. Onze militaires maliens y avaient péri.
Des refuges divers
En outre, des points cardinaux que chacun de ces groupes terroristes sévit sur le territoire malien, la Géographie du pays leur offre elle même des atouts. Les paysages frontaliers dominés par des forêts servent de lieux de refuge aux combattants djihadistes ; ce qui complique considérablement la tâche à leurs traqueurs. A l’Est, à la frontière entre le Mali et le Burkina-Faso, se dresse la forêt de Foulsaré dont les Hommes de l’Imam Dicko ont fait leur sanctuaire. Il a fallu faire appel aux grands moyens dont les Mirages 2000 pour que la Force Barkhane parvienne à éliminer le 1er mai dernier une vingtaine de djihadistes qui s’y sont planqués.
A l’Ouest, c’est la forêt de Wagadou où des Hommes ont mené l’attaque du mardi dernier qui a fait neuf morts et plusieurs blessés entre Dogofri et Nampala. Ils se seraient retirés.
Située dans la Région de Nara, de l’autre côté de la frontière mauritanienne, il s’agit d’une savane très dense de 80 kilomètres de long et de 40 kilomètres de large environ dans laquelle il est difficile de pénétrer. Les pistes et les passages sont rares et se terminent parfois en impasse.
Plusieurs opérations pour nettoyer cette forêt ont déjà eu lieu. En 2011, avec des raids mauritaniens notamment, lors d’une opération conjointe en 2012 et, dernièrement, fin 2015. Mais, selon des sources sécuritaires, cette zone n’a jamais totalement été pacifiée.
Non loin de là, une autre forêt est sous surveillance : celle de Farimaké, à l’Est de Nampala et au Sud de Léré. Cette ancienne terre de pâturage a été délaissée par les éleveurs à cause de l’insécurité grandissante ces dernières années. Elle s’est étoffée au cours des derniers hivernages pour devenir aujourd’hui un nouveau repère des groupes armés et, en particulier, du Front de Libération du Macina né il y a deux ans.
Katito WADADA : LE COMBAT