Bien que défendu par les instruments juridiques nationaux et par les conventions internationales ratifiées par le Mali, le travail des enfants dans les zones aurifères demeure une triste réalité. Dans ce site de Bouassa, l’on y rencontre de nombreux enfants travailleurs.
Situé à quatre-vingt-cinq Km du sud de la ville de Niéna, le site d’orpaillage artisanal de Bouassa installé entre les champs de coton et la forêt, jouit d’une certaine accalmie à cause des règles imposées par les propriétaires des lieux. Comme la plupart des sites d’orpaillage du Mali, celui de Bouassa ressemble à un véritable centre de concentration de diverses nationalités, où se côtoient jour et nuit des maliens, burkinabé, guinéens dans une atmosphère jugée calme par ceux qui y travaillent dans l’espoir de trouver suffisamment d’or.
Mais, ce semblant de climat paisible cache une triste réalité : le travail des enfants.
Les nombreux orpailleurs qui occupent ce site depuis plus d’un an seulement, témoignent sur sa rentabilité. De ce fait, animés du seul souci d’acquérir assez d’or, ils n’hésitent pas à employer des enfants qui n’ont pas l’âge requise pour exercer les travaux combien dangereux pour leur santé.
Des filles et des garçons, à peine âgés de 10 à 15 ans y sont employés par les orpailleurs pour des travaux rudes. Ils sont utilisés dans toute la chaine d’exploitation de l’or.
Ces enfants participent au transport des tonnes de sable, boue et pierres extraits des puits profonds de 50 à 80 mètres, alignés à ciel ouvert.
A l’apparence mal entretenus, les traits du visage tirés sous le poids des activités qu’ils mènent en longueur de journée, certains enfants par timidité ou par peur des représailles de leurs parents refusent de répondre aux interrogations. Les plus courageux s’y prêtent. « Je suis élève dans un Madersa. J’assiste ma mère dans ce travail en dehors de la classe », rapporte Mariam Koné, à peine âgée de 13 ans. Son souhait, cependant, est de se consacrer à sa formation scolaire.
Les propriétaires du site, à savoir les surveillants et les chasseurs qui assurent la sécurité admettent le travail des enfants à Bouassa. « C’est une situation déplorable qui s’explique en général par la pauvreté. Parce que, ceux qui sont là avec ou sans l’accord de leurs parents, ont besoin de se faire des économies pour soutenir les charges familiales », explique Sidy Diakité.
Les enfants utilisés dans ce site d’orpaillage exercent dans le quotidien des activités inappropriées à leur âge et à leur poids physique. Des tâches qui compromettent dangereusement leur épanouissement physique et leur affectent psychiquement et intellectuellement. Djénéba Coulibaly, une autre jeune fille de 13 ans, indique qu’il y a longtemps qu’elle mène des travaux qui dépassent ses capacités physiques moyennant 1000F CFA à la fin de la journée. « C’est un travail très dur moi. Mais, c’est avec l’accord de mes parents que je le fait. Il occupe mon temps et affecte ma fréquentation scolaire », reconnait –elle.
Maïmouna Ouattara, la seule collecteuse d’or dudit site, ne cache pas son mépris face au travail des enfants dans les zones d’orpaillage. Bien qu’elle ait deux gamines qui l’assistent dans ses activités, elle réfute toute utilisation des enfants durant les périodes de classe. « Mes enfants retournent à l’école à l’ouverture des classes », se défend Mme Ouattara.
Contrairement aux autres, Abdoulaye Koné, natif de la région de Koutiala et âgé de 17 ans, admet avoir abandonné l’école de son propre gré pour rejoindre le site d’orpaillage de Bouassa. Cet adolescent justifie sa motivation à cause de la difficile situation financière de ses parents. « Ils sont souvent incapables de faire face à mes besoins, en termes de fournitures scolaires. C’est pourquoi j’ai exprimé le vœu de quitter l’école pour travailler dans l’orpaillage et mes parents n’y se sont pas opposés», a expliqué le jeunot Koné, qui ajoute que son jeune âge ne l’empêche pas de prendre des risques en descendant dans des puits profonds à des dizaines de mètres pour aller chercher de l’or. « C’est un risque que je prend. Mais, je n’ai pas le choix », conclut-il.
Et c’est dans cet environnement rude, marqué par entre autres, la consommation de la drogue, la prostitution, la misère, souvent par des cas de viols que des enfants supposés être sur les bancs d’école à préparer leur avenir, s’y aventurent. Les autorités communales et les parents de ces enfants doivent prendre conscience de l’ampleur des ravages que le travail des enfants engendre. Cela, pour appuyer les efforts de certaines organisations non gouvernementales.
Moustapha Diawara LE SURSAUT