« Comment va se faire le cantonnement ? Ne sait-on pas que les insurgés qui ont quitté Kidal, le 23 Mai, ne sont plus seuls dans les grottes ? Quelles armes, quelles munitions vont être restituées ? Par qui ? Comment ?
Les dignes Maliens de la région de Kayes n’ont-ils pas des motifs suffisants d’entrer en rébellion contre l’Etat et demander, eux aussi, des négociations sous le couvert de Bush ou de Chirac ? Ils n’ont qu’à escarper le Tambaoura, tirer quelques coups, et ils vont être pris au sérieux… Alors, quid de la nation malienne ? Les conditions de vie à Kayes ne sont-elles pas aussi drastiques qu’à Kidal ? Ne sont-ce pas les enfants de Kayes qui meurent tous les jours que Dieu fait, dans la traversée de la méditerranée, à la recherche de l’Eldorado européen, pour ensuite venir investir dans leur terroir ? Faites un tour dans cette région et vous ne finirez pas de compter les innombrables réalisations faites par les immigrés qui n’ont jamais demandé le moindre copeck à l’Etat. Et, pendant ce temps, pourra-t-on se soumettre aux caprices de quelques individus sous l’arme du chantage ? Qu’adviendrait-il du Mali, si les enfants d’une région ne devaient travailler majoritairement que dans leur région d’origine ? Quid de l’unité nationale ? Ces différents points ne sont pas abordés dans le discours de l’Etat. Pendant ce temps, les insurgés attendent. Ils acculent l’Etat. Ils veulent montrer que l’Etat ne tient pas ses engagements, que le Pouvoir en place n’est pas un interlocuteur crédible. Pendant ce temps, le Pouvoir ferme les yeux sur les intentions réelles de ses vis-à-vis qui, justement depuis le petit matin du 23 Mai, ne sont plus que de simples insurgés, mais une « alliance démocratique du 23 mai 2006 pour le Changement ». Et c’est l’acte fondateur de la future entité de Kidal.
Les Maliens savent ce que veut dire une « Alliance », tout comme ils savent aussi ce que veut dire le « changement ». Mais quelle alliance pour quel changement ? A ces points s’ajoute le fait que dans l’obsession d’avoir un deuxième (pas second) mandat, le Pouvoir ne veut pas de troubles. Alors pas du tout. La politique politicienne n’est pas forcément du côté que l’on croit. En réalité, l’Etat est entrain de fournir aux insurgés les moyens de leur autonomie future. C’est avec les moyens de l’Etat que ceux qu’on désigne aujourd’hui sous le vocable d’insurgés vont s’organiser. Ils ne sont qu’à une étape de leur dessein dont l’enjeu ultime est « la large autonomie pour la région de Kidal ».
Le topo est simple : les jeunes de Kidal vont être recrutés dans les différents corps de l’armée, les cadres seront recrutés et formés et demain, quand jaillira le pétrole, il n’y aura qu’à sonner le rassemblement. Il s’agit bien d’une équation à plusieurs inconnues dont la résolution passe par l’affirmation, sans aucune malice, sans aucune argutie, de la force de l’Etat dans le cadre indiscutable de la Nation malienne qui, bien que fragile, existe quand même. Et il n’est plus sûr que le genre d’ «Accord » dit d’Alger vienne pour le conforter.
Hélas».
Ibrahima MAIGA
Secrétaire à la communication du BPN RPM.
Youssouf Sissoko