Le timing choisi par la force conjointe du G5 Sahel pour lancer sa toute première opération n’est visiblement pas fortuit en soi. Au contraire, il a tout l’air d’un signal fort adressé aux Etats-Unis qui, longtemps réticents à apporter leur aide à cette initiative soutenue par la France, ont fini par décaisser en faveur de la sécurité au Sahel.
C’est à peine que l’engagement des 60 millions de dollars a été prononcé le lundi dernier, à New York, par les Américains que les cinq armées nationales commandées depuis Sévaré ont lancé leur toute première patrouille aux confins du Mali, du Burkina-Faso et du Niger. Etait-ce là un témoignage de gratitude vis-à-vis de la générosité américaine ou s’agit-il ainsi d’une manière au G5 Sahel de rassurer les donateurs que bon usage sera fait de leurs donations ?
Tout porte à croire dans tous les cas que l’heure n’est plus aux verbes mais plutôt aux actions concrètes sur le terrain ; histoire de persuader aussi bien leurs ennemis des groupes extrémistes que leurs partenaires de l’Union Européenne. Ces derniers viennent de recevoir indirectement le message les informant que les choses sérieuses ont commencé pour qu’il n’y ait pas de tergiversations à la conférence des donateurs prévue pour le 16 décembre prochain à Bruxelles. Cette conférence, faut-il le rappeler, est la rencontre censée remplir la corbeille nécessaire au fonctionnement de la force du G5 Sahel.
En effet, le Budget de fonctionnement de la force G5 Sahel a été estimé à 423 millions d’euros, mais il a été dit qu’il pourrait être revu à la baisse, aux alentours de 240 millions d’euros. Les cinq pays créateurs ayant promis chacun 10 millions, l’Union Européenne 50 millions et la France 8 millions, soit un total de 108 millions d’euros ; la contribution de 60 millions de dollars (51,5 millions d’euros) des Etats-Unis ajoutée à ce total, ne saurait satisfaire les besoins. C’est dire qu’une grande partie des fonds manque encore à l’appel; d’où l’urgence de mettre toutes les chances de son côté pour ne pas rater les cibles de Bruxelles.
C’est en cela que la première opération lancée le mercredi dernier par la force jusque-là en attente du G5 Sahel, s’apparente fort à un stimulus. Il va s’en dire que les 60 millions de dollars déboursés à New York sous la pression de la France, auront été décisifs. Ils auront servi de déclic pour le G5 Sahel quand on sait que son PC abritant, à Sévaré, des officiers de liaison des cinq pays, n’a daigné rien entreprendre depuis son opérationnalisation jusqu’au lendemain des dollars américains.
‘’Hawbi’’, tel est le nom donné à la ‘’démonstration de force’’ sous laquelle les instigateurs de cette première sortie sur le terrain se voilent la face pour lancer leur dernier appel de fonds. Officiellement, ‘’Hawbi’’ est initié pour permettre de reprendre pied dans une zone délaissée par les Etats, aux confins du Mali, du Burkina Faso et du Niger, en entravant la liberté de mouvement dont bénéficient plusieurs groupes armés depuis des mois. Cette opération s’est traduite par le déploiement des forces maliennes dans la Commune de Tessit, à 30 km du Niger et 40 km du Burkina, en vue d’effectuer des missions de reconnaissance. «On va patrouiller dans le secteur et sécuriser les axes routiers. Notre objectif c’est la sécurisation de la population et des déplacements des commerçants, pour que les Habitants vivent tranquilles et que les éleveurs puissent travailler», a déclaré le Lieutenant Gaoussou Diara, cité par l’AFP, voilant à peine le véritable enjeu de sa mission : celle de convaincre Bruxelles en amont.
Katito WADADA : LE COMBAT