A César ce qui appartient à César. Après ses multiples bourdes, certaines inhérentes à la jeunesse, d’autres par pure prétention et calcul politicien, l’ancien premier Ministre Moussa Mara est sans nul doute le nouvel opposant à l’hémicycle, en l’absence de Soumaila Cissé. Il joue tellement bien ce rôle, avec les autres députés de son parti, le YELEMA, qu’il ne manque aucune occasion pour faire le scoop sur les réseaux sociaux et autres médias populaires sur leurs prises de position. Qu’elles soient relatives au vote de la motion de soutien aux Institutions de la République, ou encore à la participation des députés à un atelier commémorant l’anniversaire du très controversé Accord pour la Paix et la réconciliation, initié par l’Assemblée Nationale, il y a vraiment une certaine constance dans les actes posés par Moussa Mara et les autres députés YELEMA. L’ancien PM continuera-t-il sur cette lancée, même en dehors de l’hémicycle ? Pourquoi n’adhère-t-il pas à l’opposition classique incarnée par Soumaila Cissé et du coup au FSD ? Ne va-t-il pas décevoir encore ses multiples partisans, en changeant au gré des événements ?
Qu’on l’aime ou qu’on le déteste, l’honnêteté intellectuelle exigerait de nous de reconnaitre qu’il a des idées. Moussa Mara, puisque c’est de lui qu’il s’agit, avait fait ses preuves en tant que Maire de la Commune IV du District de Bamako. Par ses innovations, il a indiqué la voie à suivre aux autres Maires du Mali, pour booster le développement dans leurs communes. Moussa Mara, par souci de bien faire, a non seulement axé sa gestion communale sur les résultats, mais aussi et surtout il a imposé une certaine transparence dans la gestion des deniers publics, ce qui lui a valu l’estime et le respect de beaucoup de maliens. Devenu Ministre en charge de la ville dans le premier gouvernement de l’ère IBK, Moussa Mara avait donné des gages de bonne conduite et de transparente dans la gestion des affaires publiques en reversant le reste de ses frais de mission au trésor, comme pour dire qu’en tant que Ministre et chef de son département il doit donner les preuves de l’exemplarité et de transparence. Le jeune loup aux dents longues, au regard de ces deux postes publics qu’il a occupés, était jusque-là exempt des reproches pouvant entacher sa crédibilité, sa sincérité et son patriotisme.
La première grosse erreur politique commise par Moussa Mara a été l’acceptation de la proposition de poste de premier ministre avec un seul député à l’Assemblée Nationale. Pour ceux qui ne le savent pas encore, un premier ministre n’est fort que lorsqu’il a un soutien fort et ferme d’une grande majorité des députés à l’hémicycle. En effet, après la nomination de Mara comme premier Ministre, le communiqué du parti majoritaire, le RPM, qui était à la fois moins enthousiaste et discourtois, en disait long sur sa vulnérabilité à ce poste. La suite est connue, un manque d’autorité sur ses ministres, une marge de manouvre restreinte, bref un emprisonnement politico-idéologique qui ne dit pas son nom. En dépit de tous ces faiblesses, Moussa Mara n’a pas su se frayer un chemin vers la sortie, mais fracassante. L’expérience et le manque de courage politique, lui ont fait défaut, car sachant bien que ses mois étaient comptés à la primature, il aurait dû poser des actes audacieux, quitte à être remercié le lendemain, mais, au lieu de cela il a multiplié les bourdes pour sauver son bienfaiteur IBK. Limogé comme un mal propre, Moussa Mara n’a toujours pas eu l’audace de quitter la Majorité et il a passé le clair de son temps à se justifier par rapport à des controversés actes qu’il a posés en tant que premier ministre. Notamment l’affaire de l’avion présidentiel, sa visite à Kidal et certains propos, à la limite humiliants, tenus à l’égard des anciens dignitaires du régime d’ATT et à l’endroit de certains caciques de l’Opposition. Ce passé politique peu glorieux semble être derrière lui.
Fraichement élu et de la plus belle des manières, comme député de la commune IV, Moussa Mara semble s’engager dans la voie de la repentance et de la rédemption politique. Il semble reconnaitre ses erreurs c’est pourquoi il se démarque totalement du régime IBK et va même plus loin en s’opposant à visage découvert à ce même régime qu’il a tant enchéri. Ainsi, après s’être désolidarisé de ses autres collègues députés lors du vote de la motion de soutien aux institutions, il a ensuite refusé de prendre part à l’atelier de commémoration de la signature de l’Accord pour la paix et la Réconciliation. Pour lui, il aurait été mieux de procéder à la mise en place d’une commission de relecture, comme préconisée dans les résolutions du Dialogue National Inclusif, DNI, pour corriger les imperfections, au lieu de commémorer un accord loin de ramener la paix, la sécurité et le vivre ensemble. Son dernier acte qui semble séduire l’opinion nationale est sa condamnation sans ambages du traitement que le Président de la République a réservé au Mémorandum du M5 RFP. Pour l’ancien PM, par cet acte, IBK semble adopter une posture dangereuse pour la paix et la stabilité. Pour lui il urge de donner une suite favorable aux revendications du M5 RFP.
En définitive, l’ancien premier Ministre Moussa Mara est désormais dans la peau de l’opposant au régime IBK, ne serait-ce qu’à l’hémicycle. Il doit persévérer dans cette voie afin d’absoudre tous les péchés politiques qu’il a commis ces dernières années. Mara joue bien vraiment son rôle d’opposant en attendant le retour de celui qui a le titre de chef de file de l’Opposition, à savoir Soumaila Cissé, Kidnappé et entre les mains de ses ravisseurs depuis le 25 mars 2020.
Youssouf Sissoko