dimanche 6 octobre 2024
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CAMP PRÉSIDENTIEL EN QUÊTE DE SOLUTIONS DE SORTIE DE CRISE : DE L’ARMISTICE CAPOTÉ À LA CAPITULATION ?

Les recherches de solutions à la crise politique que vit le Mali se poursuivent. Les différentes initiatives butent malheureusement sur de réels obstacles. La dernière en date, celle des partis et regroupements politiques de la majorité présidentielle sollicitant une rencontre avec le M5-RFP, soulève quelques questions.

La sollicitation a été formulée dans une missive signée par Dr. Bocary Tréta en tant que président de séance d’une réunion du camp présidentiel tenue à l’Hôtel de l’Amitié de Bamako le samedi 20 juin 2020, c’est-à-dire le lendemain de la gigantesque mobilisation citoyenne qui a eu lieu le jour précédent, le vendredi 19 juin. La motivation déclinée est « la recherche d’une solution à la crise sociopolitique que connaît notre pays ». Initiative salutaire certes, mais quelque peu troublante sans esprit mesquin ou de volonté chagrine de jeter le discrédit sur quelque chapelle politique que ce soit, il faut nous l’accorder.
En effet, avec un recul de cinq petits jours, on tiendra utilement compte de la démarche de la même majorité présidentielle qui avait souhaité rencontrer le M5-RFP en vue d’échanger pour s’entendre. Les deux parties se sont rencontrées le lundi 15 juin, au siège du FSD, soit au QG de campagne du chef de file de l’opposition, Soumaïla Cissé toujours en captivité. Cette entrevue politique s’éclaire, du reste, à la lumière de l’adresse à la nation d’Ibrahim Boubacar Keïta dans la nuit du dimanche, 14 juin, allocution dans laquelle le président de la République acculé affirma avoir entendu le cri du peuple et promit d’oeuvrer à la satisfaction des aspirations légitimes des citoyens. La rencontre du lendemain entre les politiciens du camp présidentiel et les acteurs politiques du M5-RFP pouvait donc, logiquement, être envisagée comme une demande d’armistice. C’est ce qui transparaît en tout cas le plus puisque les négociations ont capoté en réalité et que le M5-RFP, fort de ses légions renforcées, a invité ses interlocuteurs à le rejoindre purement et simplement pour faire partir IBK. Les choses en sont restées là, même si dans la nuit du mardi 16 juin, Ibrahim Boubacar Keïta, accompagné de Dr. Boubou Cissé, est venu rencontré chez l’ancien président, le Général Moussa Traoré, l’imam Mahmoud Dicko secondé par Dr. Choguel Kokalla Maïga qui préside les réunions du M5-RFP.
Depuis, de l’eau a coulé sous le pont. Le M5-RFP n’a pas accepté d’annuler la mobilisation du vendredi 19 juin, malgré l’arrivée au Mali d’une importante délégation de la C.E.D.E.A.O. qui a vivement souhaité cela au cours des pourparlers à l’hôtel Salam de Bamako le jeudi dans l’après-midi jusque d’ailleurs dans la nuit. Le vendredi donc, 19 juin, les citoyens ont investi le Boulevard de l’indépendance pour exiger, pour la deuxième fois, la démission d’Ibrahim Boubacar Keïta. Une délégation dépêchée à cet effet pour remettre à IBK la lettre de demande de démission n’a pas pu accéder au palais en raison d’un impressionnant dispositif des forces de sécurité placé sur les voies. Démocrate défroqué ou dictateur révélé, Ibrahim Boubacar Keïta venait de découvrir son front et sa face en agissant dans le sens absolument contraire à la réaction du Général Moussa Traoré qui s’était trouvé en 1991 dans la même situation. Ce refus de recevoir les délégués du M5-RFP sonne pour le moins comme une fermeture hermétique par Ibrahim Boubacar Keïta de toutes les portes de négociation. Sans le M5-RFP aujourd’hui, quel interlocuteur valable le souverain barricadé dans son arrogance a-t-il désormais en face?
C’est dans ces circonstances de blocage que les partis et regroupements politiques de la majorité présidentielle ont sollicité, dans l’intervalle de cinq petits jours, il faut le rappeler, une deuxième rencontre avec le M5-RFP. Cela est intervenu alors que la délégation de la C.E.D.E.A.O. a rendu public son communiqué formulant ses propositions, lesquelles ont été intelligemment retoquées par les responsables du M5-RFP au motif évident qu’elles violaient les dispositions constitutionnelles du Mali.
Que cherche à présent la majorité présidentielle ? La capitulation ou le prolongement d’un dilatoire qui énerve de plus en plus le peuple? À l’évidence, il n’existe pas d’homogénéité dans les propositions de la majorité présidentielle. Si une pluie de démissions s’est abattue sur la Cour constitutionnelle, celle-ci ne semble pas être l’eau de rose escomptée. Du côté de l’Assemblée nationale, avec une déconcertante argumentation, Moussa Timbiné, le président par effraction de l’institution, dit que le président de la République n’a pas le pouvoir de dissoudre le parlement. Un avis ubuesque pour une résistance de milicien d’un autre âge ?
Mais il y a un point sur lequel les Maliens posent des questions absolument déroutantes pour leur intelligence politique. Pourquoi les partis et regroupements politiques de la majorité présidentielle sont allés tenir leur fameuse réunion à l’Hôtel de l’Amitié de Bamako ? Est-ce pour signifier à l’opinion nationale qu’ils sont mieux que les responsables du M5-RFP qui, eux, se sont entretenus avec la délégation de la C.E.D.E.A.O à l’hôtel Salam ? Eh bien, si c’est cet esprit tordu, il convient de leur rétorquer que c’est parce que, sobrement, les émissaires de la sous-région sont descendus dans cet hôtel digne de son nom, mais moins coûteux que l’Hôtel de l’Amitié de Bamako. Il y a une explication qui s’impose : le camp présidentiel avait bien, à travers les sièges des partis qui le composent, un lieu approprié pour tenir sa réunion. Mais, comme son superbe chef sur les hauteurs de Koulouba habitué aux hôtels les plus huppés de la planète, les bons messieurs « Majorité » ne sont jamais à l’aise que dans un cadre de bombance, entre bringue et ribote faisant des dépenses excessives qui n’apportent rien au pays. Dieu merci, le M5-RFP, le plus puissant front politique actuel sur l’échiquier politique national, tient ses rencontres dans le cadre modeste du siège de la C.M.A.S. Il y a là un important élément de réflexion.

Amadou N’Fa Diallo

Djibril Coulibaly

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