lundi 2 décembre 2024
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Autorités intérimaires : Une solution devenue une source d’autres problèmes

Kidal, Gao et maintenant Tombouctou. Partout la mise en place des autorités intérimaires a suscité des manifestations de mécontentements. Comment des autorités intérimaires censées être des solutions à la crise posent plus de problèmes ? Flash Back sur un article que nous publions et qui va aider à comprendre les origines de la crise.

 

En plus d’une désignation des autorités intérimaires qui frôle le partage du gâteau, sa mise en œuvre elle-même pose problème dans la mesure où les élus locaux sur la base de la loi N°2015-047 du 7 décembre 2015 avait vu leur bail prorogé jusqu’à la mise en place de nouveaux organes ; c’est-à-dire, jusqu’aux prochaines élections.

En vu de procéder à la mise en place des autorités intérimaires dans les 5 Régions du Nord, le Gouvernement a soumis à l’Assemblée Nationale un projet de loi portant modification de la loi N°2012-007 du 07 février 2012 modifiée portant code des collectivités territoriales. Malgré la levée de bouclier de la part de l’opposition qui a animé une conférence de presse le 30 mars dernier pour dire que cette loi en plus d’être inconstitutionnelle cautionne la partition du pays, elle a été votée, le lendemain ; c’est-à-dire, le 31 mars à 103 voix pour et zéro contre ; les Députés de l’opposition ayant quitté l’hémicycle avant le vote.

Le projet de loi apporte deux innovations majeures : la suspension au sein du code des collectivités territoriales de toutes les dispositions législatives relatives à la mise en place des Délégations spéciales au niveau des collectivités (communes, cercles et Régions) et la consécration d’une autorité intérimaire chaque fois que l’Etat constatera l’impossibilité de constituer le conseil d’une collectivité territoriale ou sa non fonctionnalité.

Contrairement à la délégation spéciale dont les membres désignés par l’Etat ne peuvent dépasser 7 avec des compétences limitées, l’autorité transitoire, elle, aura la même taille que le conseil qu’elle remplace.

C’est vrai, la mise en place des autorités intérimaires est prévue par l’accord de paix. Mais, le hic, c’est que la loi votée à cet effet vient contredire une autre toujours en vigueur. Il s’agit de la loi N°2015-047 du 7 décembre 2015. A cause justement de la situation d’insécurité dans le Nord, qui ne favorisait pas la tenue d’élections libres et transparentes, les autorités après avoir épuisé le nombre de prorogation prévu par le code électoral ont dû voter cette loi pour proroger le mandat des élus jusqu’aux prochaines élections. Or, la loi votée le 31 est impersonnelle car concernant que les autorités du Nord. Le vert se trouve dans le fruit. Comment faire voter une loi à l’ensemble des députés pour ne l’appliquer qu’à une seule partie du territoire. Toute chose qui a fait dire à l’opposition, que cette loi cautionnait la partition du pays. Au-delà de cet antécédent grave de conséquences, le choix des personnes devant siégé dans ce conseil, est un autre goulot d’étranglement. Reprenons un exemple fournit par l’opposition au cours de sa conférence de presse : dans une localité où le conseil est constitué de 17 membres, 5 seront attribués à la CMA, 5 à la plate forme, 5 au gouvernement et 2 aux autorités traditionnelles. Ça sent le partage de gâteau. L’Etat se retrouve réduit au même niveau que les groupes armés, elle qui désignait seule les 7 membres des Délégations spéciales. Compris ou compromission? Là également, l’opposition ne plaide pas seulement pour elle mais pour toute la classe politique qui se trouve mise à l’écart dans la gestion des collectivités à cause de la composition du conseil intérimaire : services déconcentrés, société civile, secteur privé ainsi que des conseillers sortants, ces derniers étant les seuls membres de l’équipe représentant les politiques. Cette loi ont le voit est taillée sur mesure pour faire plaisir à la CMA et compagnie. Cette même CMA qui n’a pas hésité à trahir l’Etat, en interdisant l’accès de Kidal à ses Dirigeants pour la tenue d’un forum pourtant financé par le Gouvernement à hauteur de 400 millions de francs CFA.

Aujourd’hui, ceux qui ont tiré la sonnette d’alarme ; c’est-à-dire ? L’opposition, l’histoire semble leur avoir donné raison. Des affrontements du 20 au 21 juillet entre le Gatia et la CMA, il y a eu trop de morts et surtout de civils. Les «autorités intérimaires connaissent leurs premiers morts», titrait bien à propos un confrère de la place. Vue comme une panacée pour, enfin, sortir de la crise, cette énième mesure d’urgence de nos autorités se trouve aujourd’hui être source de divisions et d’assez de morts d’innocents.

Les dernières évolutions

Le 19 février dernier, au moment où la Délégation gouvernementale et les partenaires impliqués dans la mise en œuvre de l’accord s’apprêtaient à décoller de Bamako pour la mise en place des autorités intérimaires de Kidal, ils apprennent que la CMA s’est désistée. Une volte-face qui était, selon eux, due à la nomination tardive d’Israch Ag Mohamed comme Gouverneur de la Région. Ce dernier a prêté serment. Gao s’est illustré à son tour, après la mise en place des autorités intérimaires de Kidal suite à de longs conciliabules. A Gao, c’est le CMFPR2 qui s’était opposé au départ à leur mise en place qui devait se faire le 2 de ce mois, puis il y a eu la participation des mouvements des jeunes et des femmes. Comme à Kidal, les autorités de Gao ont fini par être installées. De nature calme et sans problèmes, la Région de Tombouctou, pour l’une des rares fois dans l’Histoire de ce pays, a vu une partie de sa population se braquer contre les autorités. Des tirs à l’arme lourde résonnent dans la ville depuis deux jours. Si l’on espère que là également, comme dans les deux autres Régions, les autorités seront tout de même installées, il y a lieu de se poser la question de savoir si elles pourront remplir convenablement la mission qui leur est assignée ; c’est-à-dire, contribuer véritablement au retour définitif de la paix. That is the question !

Mohamed Dagnoko : LE COMBAT

Rédaction

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