Accusé par le Procureur Général, Mohamed Lamine Coulibaly, pour «injures publiques à caractère sexuel», Mohamed Youssouf Bathily alias Ras Bath a été détenu puis placé sous mandat de dépôt et libéré ensuite. Selon l’Avocat au Barreau malien, Me Amadou Tiéoulé Diarra, cette procédure ne respecte pas les règles établies et ressemblerait plutôt à un règlement de compte.
L’affaire Ras Bath n’a pas encore fini de faire parler d’elle. Ras Bath détenu puis libéré suite aux incidents qui se sont produits au Tribunal de la Commune IV, le mercredi dernier, est placé sous mandat de dépôt. Oui, puisque l’intéressé est dans une prison sans grilles. Il est reproché à Ras Bath par le Procureur Général, Mohamed Lamine Coulibaly, «des propos qui constituent un outrage envers les dépositaires de l’autorité ou de la force publique dans l’exercice de leurs fonctions». Si Me Amadou Tiéoulé Diarra dit AT Diarra ne se prononce pas spécifiquement sur les chefs d’accusation, en procédurier avertit, il dénonce tout de même les manquements de cette procédure. Cela, avec des exemples réels à l’appui. Dans une publication faite sur sa page facebook le 21 août dernier et qui a reçu l’assentiment de nombreux internautes, il explique au Procureur Général comment se mène une procédure dans le cadre d’un délit commis par voie de presse. Selon lui, les infractions qui sont reprochées à Ras Bath «Injures ou diffamation ou par extraordinaire incitation aux crimes et délits, art 33-34-35 » sont commises par voie de presse et prises en charge par la loi du 07 juillet 2000 portant régime de la presse et délit de presse. Il se trouve, selon Me Amadou Tiéoulé Diarra dit AT Diarra, que le statut d’animateur de Ras Bath et le moyen de communication utilisé en font un délit de presse. Ici, l’élément déterminant, selon lui, est «la commission par voie de presse ou tout autre moyen de communication». Autrement dit, Ras Bath, lui seul n’avait pas sa place au Camp I. Selon lui « il faut installer la radio dans la procédure pour corriger, dessaisir le Juge d’instruction et faire formaliser la citation directe par le Procureur en fixant une date pour l’audience».
Pour la mémoire du PG
Pour écarter toute tentative d’esquive faisant croire que Ras Bath n’est pas journaliste, d’où cette façon de faire, Me AT Diarra prend les devants.
Me Amadou Tiéoulé, dans la rigueur qu’on lui connait, fait des rappels minutieux à l’endroit du Procureur de la République pour étayer ses propos. Selon lui, s’il est vrai que Ras Bath n’a pas le statut de journaliste, il se demande pourquoi Iba N’Diaye qui, lui aussi, n’est pas journaliste, avait été assigné avec l’ORTM par procédure de délit de presse à Ségou pour avoir « diffamé » la magistrature en 1999. Il se pose encore la question de savoir pour quelle raison le Pr Dioncounda Traoré, en 2002, avait été assigné avec les journaux « Les Echos » et « Le Malien » devant le Tribunal de première instance de la Commune IV en diffamation de la Cour constitutionnelle. Iba N’Diaye comme Dioncounda Traoré n’étaient pas journalistes tout comme Ras Bath. Alors, comment le Procureur peut-il expliquer que ces deux premiers ont été assignés en justice avec le moyen de communication utilisé et pas Ras Bath? En ne revenant pas en arrière pour reprendre toute la procédure ou la corriger, on peut se dire qu’ici « tout se passe comme si on attendait Ras Bath au tournant », dévoile clairement Me Amadou Tiéoulé. Cette façon de faire n’est ni plus ni moins que «la régression du Droit », crache t-il. D’ailleurs, il pense que les propos de Ras Bath sont des ingrédients nécessaires à une Démocratie. Et, pour ceux qui pensent qu’il étale sur la place publique la vie privée des personnes ou des personnalités, il leur rappelle la résolution de la commission africaine lors de 32e session tenue à Banjul, en Gambie, le 23 octobre 2002 qui dit ceci : «Les lois sur la vie privée ne doivent pas empêcher la diffusion d’informations d’intérêt public».
Mohamed Dagnoko : LE COMBAT