Lettre d’Habib Dembele, Guimba National envoyée à Maître Mamadou Ismaël Konaté, Ministre de la Justice et des Droits de l’Homme, Garde des sceaux, du Mali
Monsieur le Ministre,Youssouf Keita, Petit Guimba, mon Junior, est appelé par la justice de notre pays à comparaître devant le tribunal ce 6 octobre 2016.
Il aura eu le temps de réfléchir, il aura eu le temps de comprendre la place qu’il occupe dans le cœur de beaucoup de Maliens et de Maliennes.
Il aura eu le temps de réfléchir, il aura eu le temps de comprendre que beaucoup de Maliens et de Maliennes exigent de lui une vie exemplaire.
Il aura eu le temps de réfléchir, il aura eu le temps de comprendre qu’ils n’exigeraient pas tant de lui s’il était une personne ordinaire.
Il aura eu le temps de réfléchir, il aura eu le temps de comprendre qu’être artiste, c’est être particulier, mais que personne n’est au-dessus de la loi.
De Montréal, où je joue aux côtés des marionnettes de Yaya Coulibaly dans le spectacle Sounjata, mis en scène par Alexis Martin, j’ai conversé personnellement au téléphone avec mon Junior. C’est un garçon bourré de talent, mais pas que. Dans le fond de son cœur, il est aimable, reconnaissant, généreux et sociable.
J’ai entendu ses arguments. J’ai aussi ressenti ses regrets et ses remords.
Je souhaite évidemment qu’il réponde face à la justice en toute responsabilité. Je le confie à Dieu, je le confie à la justice, tout comme le magnifique garçon qu’il est, leur a lui-même confié son sort. Nul n’est au-dessus de la loi. Il aura eu le temps de réfléchir, il aura eu le temps de comprendre.
Monsieur le Ministre, la place d’un artiste n’est pas la prison, la place d’un artiste est sur la scène. Quels que soient les faits, quelle qu’en soit la conclusion prononcée par notre justice, votre clémence, votre bienveillance lui permettront de réfléchir encore, de comprendre mieux, de ne jamais omettre de regarder dans le rétroviseur de la vie. Nul n’est au-dessus de la loi.
Votre clémence, votre bienveillance lui permettront de remonter sur scène aux côtés de mes autres enfants, Koman, Yoro, ATT Junior, IBK Junior, Kanté, Guimba Junior de Dioro, Diakité Nazi, Yaro, Cheknito, Dousey, et tous ceux que je n’ai pas la place de citer ici. Votre clémence, votre bienveillance lui permettront de remonter sur scène aux côtés de tous ses camarades à qui il manque terriblement.
Ensemble, ils continueront, comme ils savent si bien le faire, à distribuer le bonheur dans chacune des familles maliennes, à l’intérieur comme à l’extérieur.
Ensemble, ils continueront à contribuer à la construction nationale avec ce qu’ils savent faire. Bien qu’ils soient grands, ils ont le temps et les moyens de grandir davantage, car on ne finit pas de grandir, et de participer à l’agrandissement de notre Mali.
Monsieur le Ministre, ma démarche est personnelle. Ma démarche n’a aucune valeur juridique. Ma démarche se veut humaine. Je souhaite servir l’amour à chacun de mes enfants, comme une mère sert le lait de son sein à chacun de ses enfants.
Quand un « petit guimba » à froid, c’est Guimba National qui éternue.
Je m’en remets à Dieu. Monsieur le Ministre, je m’en remets à votre clémence, je m’en remets à votre bienveillance.
Habib Dembélé, Guimba National.
Commandeur de l’Ordre National du Mali.| lecombat.fr
(Montréal, le 4 Octobre 2016)