A l’occasion du 48e anniversaire de la Francophonie, célébré la semaine dernière à travers le monde, notre rédaction a rencontré à Bamako le comédien ivoirien Adama Dahico, grand humoriste et homme de culture. M. Dahico a abordé avec nous ses livres, la jeunesse africaine et la langue française.
Adama Dahico, tout à l’heure, vous avez présenté des livres aux participants, pourquoi avoir écrit tous ces livres en tant que comédien et humoriste ?
Je suis auteur de quatre livres. Je suis venu ici avec trois livres. Je pense qu’on ne peut pas parler de la langue française sans dire aux uns et aux autres le mouvement que cette langue fait. En Afrique, nous sommes taxés de gens qui parlent beaucoup mais qui n’écrivent pas. On dit que nous, c’est l’oralité, le verbe, mais je pense qu’il est temps d’écrire nos pensées et de les mettre au service de la génération future qui pourra à travers celles-ci parler de nous. Je suis venu avec trois de mes livres : le premier c’est « Ne riez pas ». Le deuxième est intitulé « Donnez-moi le pouvoir et je vous rendrais le rire ». Le troisième c’est « Le Polotirien » et le quatrième c’est « Eh, dja ma vieille ». Un cinquième livre est en édition. Il sera sur les rayons d’ici trois mois et son titre c’est « Je veux gouverner la France pour mieux comprendre l’Afrique ».
De quoi parlez-vous dans vos livres en général ?
C’est d’abord de l’humour, le rire. Dans ce rire, il y a une prise de conscience, un éveil des consciences du peuple africain et je voulais aussi faire comprendre qu’on peut utiliser l’humour pour faire passer beaucoup de messages. On peut critiquer, on peut conscientiser, on peut dénoncer mais sans pour autant blesser la sensibilité d’autrui. Donc il y a beaucoup de thèmes comme le Sida, l’environnement, la paix, la justice, la politique voilà tout ce qui touche l’être humain dans son existence.
Que pensez-vous de la célébration de la langue française par les pays africains ?
Je crois que le français est une langue qui nous a été imposée. C’est une langue qui est venue comme les religions sont venues, alors si on pratique les religions, on doit aussi pouvoir pratiquer les langues de ceux qui nous ont apportés ces religions-là. C’est une façon de nous parler, de nous faire comprendre, sinon nous avons déjà nos propres langues maternelles.
Je crois qu’il faut qu’on soit intelligent. A côté de cette langue étrangère ou française, qu’on continue de faire la promotion et de valoriser nos langues nationales qui nous permettent aussi de garder notre héritage quelle que soit sa valeur, mais la langue française est une langue devenue officielle que beaucoup de gens utilisent puisqu’on a été colonisés par la France. Il est donc normal que la langue française soit une de nos langues.
Faudrait-il enseigner les langues nationales sur le même pied que la langue française ou d’autres étrangères ?
Mais tout à fait (rires). L’école c’est quoi ? C’est là où on va pour apprendre, maintenant si on ne doit pas enseigner nos langues nationales dans les écoles françaises mais qu’on crée des départements spéciaux pour que les gens viennent apprendre leurs langues. Si on apprend l’anglais, l’espagnol ou l’allemand ça veut dire qu’on peut apprendre aussi nos langues dans les écoles. Il faut que cela se fasse sinon un matin nos langues vont disparaitre.
Avez-vous un conseil à donner à la jeune génération africaine ou un message ?
Non je n’ai pas de conseil à lui donner. Je voulais simplement lui dire d’être observateur. Il ne faudrait pas que les jeunes Africains se laissent transformer par le monde mais qu’ils soient parmi les acteurs qui transforment le monde. Donc je veux leur demander aussi de s’impliquer dans le développement du continent africain chacun dans son domaine. Moi mon domaine c’est l’humour et tout le monde sait ce qu’Adama Dahico a fait sur le plan humour en Afrique francophone et aujourd’hui il y a beaucoup de jeunes qui sont en train de suivre l’exemple dans humour, donc ça c’est ma part de combat et si chacun essaie de faire comme ça dans son domaine, je crois que l’Afrique va moins souffrir.
Amadou Kodio LA LETTRE DU MALI