« c’est ainsi qu’on m’a sauvagement pris ma virginité et faire de moi, un dépotoir sexuel.»
L’on ne cessera de le dire, le métier du sexe est quasiment devenu chose banale sous nos tropiques, notamment, lorsque cette activité devient l’apanage d’une mafia organisée. Un réseau immonde mais solidement établi, à l’image de celui ayant encore de beaux jours devant lui, en région kayesienne.
Qu’est-ce que l’homme de notre ère ne ferait-il pas pour de l’argent ? L’appât du gain matériel a presque conduit nos vies à l’homicide collectif. Voilà un monde d’une abomination sans nom, mais qui pourtant, prolifère tranquillement. Et ce, au vu et su des autorités locales qui, des fois mêmes, y accordent leur aval. KAYES est aujourd’hui devenu le centre névralgique d’un trafic extrêmement dangereux pour l’avenir de la région, mais qui opère de manière très silencieuse. Ce n’est pas étonnant que selon les dernières statistiques, la région de KAYES possède actuellement le taux de prévalence du VIH sida et autres IST, le plus élevé des autres régions du Mali, tant les cas de débauche et perversions sexuelles de toutes formes, ont vertigineusement grimpé.
Dans quelques-unes des nombreuses zones industrielles, notamment, minières, de la région, où nous nous sommes rendus, l’état des mœurs était aussi effroyable qu’abominable. Dans ces zones d’une autre galaxie, jamais, tu ne reconnaitras le Mali : un monde d’une pourriture inénarrable !
D’abord, quelques jeunes filles de pays anglophones, principalement, le Nigéria, allant de seize (16) à dix-neuf (19) ans, que nous avons rencontrées dans l’une de ces contrées macabres, nous ont volontiers fait le récit de leur parcours ainsi que leur quotidien combien infernal, au profit de ceux qui les exploitent aussi bien que ceux qui viennent prendre du plaisir.
Gift est le sobriquet sex-trade d’une d’entre elles. Elle est âgée de seize (16) ans. Elle nous dit ceci : «Je suivais tranquillement mes études au Nigéria lorsqu’une de mes tantes est venue abuser de ma naïveté en me faisant croire qu’elle possédait de grandes affaires au Mali, notamment, de grosses boutiques de produits cosmétiques et supermarchés. C’est ainsi que mes parents ont mis toute leur confiance en elle, et m’ont laissée aller avec elle au Mali sans se faire de souci. Arrivée jusqu’ici à KAYES, elle m’a subtilement vendue à une sous-traitante, travaillant comme tenancière de bar sans pour autant que je ne m’en doute une seule seconde. Le lendemain, cette dernière m’indiqua une chambre à coucher qui devait désormais m’appartenir, avec presque toutes les commodités. Nous étions au nombre de cinq (05) filles, toutes des nigérianes, mais nous ne nous connaissions pas. Trois (03) d’entre nous sont restées ici (une zone minière dont nous tairons le nom de la structure d’exploitation) et les deux autres ont continué sur DIBOLI (la frontière du Mali d’avec le Sénégal). Après m’avoir donc indiqué ma chambre à coucher, la femme à qui j’ai été vendue, m’a entièrement détaillé le travail qui m’attendait : la prostitution. En d’autres termes, la livraison de mon jeune corps à toute sorte d’individus à la recherche de plaisir sexuel, et ce, au prix de toutes les souffrances que je pourrais en subir, moyennant une somme de deux (02) mille francs CFA, la passe. Entre temps, ma tante avait disparu dans la nature avec les deux autres filles sans daigner mot me dire, après avoir réussi son affaire. J’étais ainsi livrée à moi-même, dans une zone où je ne pouvais songer bénéficier d’aucune défense, ni espérer la moindre aide, venant de qui que ce soit, vu déjà que je ne comprenais aucune langue courante du milieu. Pendant ce temps, ma sous-traitante, elle-même, ex-prostituée, a bloqué mon passeport, ma carte d’identité et même mon appareil de téléphone, m’interdisant ainsi toute possibilité de communication ou évasion ».
Quand des autorités du pays sont elles-mêmes complices d’un trafic honteux
« Je me suis donc mise à pleurer toute la journée comme une folle, en allant jusqu’à lui signaler mon innocence (sa virginité), jurant sur toutes sortes de fétiches. Mais elle resta absolument insensible à ma douleur et me signifia, sans remord, que la virginité dans ce boulot, n’était pas un problème. Bien au contraire, il existe de nombreux clients qui sont prêts à d’énormes sacrifices financiers, rien que pour prendre ma virginité et en faire un motif de fierté. Je l’ai alors menacée en voulant me rendre au poste de Gendarmerie le plus proche afin de tout déballer et m’enfuir de cet endroit maudit. Et la dame, d’un air froid et sarcastique, doublé d’un regard agressif, m’a aussitôt prévenu de l’échec de ma tentative en répliquant que les autorités locales, elles-mêmes, avaient un quota bien défini dans ce business, que ce soit en sexe ou argent comptant. Et que celles-ci n’étaient aucunement prêtes à ce que le deal cesse. C’est ainsi qu’avec un air quasiment désespéré, que je me suis vite rendue compte de la nature monstrueuse et le caractère minutieusement organisé d’une mafia qui ne disait pas son nom. Ensuite, elle ajouta très crûment, que je n’avais aucun autre choix que de faire cette besogne pour assurer ma survie. Autrement, il ne faudrait point que je compte sur elle pour m’épauler de quelque manière que ce soit ou sur quelqu’un d’autre pour me sortir de là. Je me suis alors vue dans une jungle noire et cruelle vers laquelle le destin venait affreusement de m’orienter contre toute attente. Après trois nuits consécutives, au cours desquelles, j’avais catégoriquement refusé de coucher avec tout client qui se présentait, la tenancière du bar (ma sous-traitante), a carrément décidé de me couper les vivres, histoire de m’acculer à n’avoir autre option que de coucher avec toute cette horde de névrosés sexuels, des pervers sans vergogne. Après deux journées d’endurance pendant lesquelles je n’avais accès à ne serait-ce qu’un seul morceau de pain, j’ai alors été contrainte de livrer mon corps, avec toute l’infernale déchirure que cela a pu infliger à mon être ».
Innocence : un ″trésor″ pour les pervers !
« C’est ainsi qu’on m’a sauvagement arraché ma virginité. Un cadeau que j’avais pourtant juré de n’offrir qu’à mon homme d’église (son futur mari). Et après ma première nuit dans ce commerce sexuel combien répugnant, les hommes ne cessaient plus de se bousculer devant ma chambre de passe, car, tous avaient la curiosité de mon jeune corps. Chacun voulait désormais me titulariser avec des promesses de sommes faramineuses, notamment, les cadres et les entrepreneurs qui commençaient à fréquenter assez régulièrement le coin. Certains parmi ces hommes âgés, étaient d’une franche perversion. Contre des sommes colossales, ils me proposaient, au lit, des pratiques sexuelles aussi luxurieuses qu’inimaginables. Mais sachant que je devais nécessairement payer à ma sous-traitante, une somme totale d’un million cinq cents mille (1.500.000) F CFA comme frais de caution pour me sortir définitivement des chaines de cet esclavage et disposer désormais de ma liberté entière, je me devais de tout accepter et coucher avec n’importe quel client, même les plus barbares ou nauséabonds. Cependant, après la couverture des frais de caution, il me faudrait encore rester travailler pour trouver l’argent de mon transport et retourner en famille, puis poursuivre mes études. J’ai donc terriblement du chemin à faire ici dans ce carcan, avant de retrouver mon statut antérieur.»
Il était exactement 15h 17 mn à mon horloge, lorsqu’un homme d’une quarantaine d’années, apparemment bien nanti, lui fit signe pour qu’elle lui loue ses services. Avant de rejoindre celui-ci en chambre, ses derniers mots furent ceux-ci: «M. le journaliste, veuillez bien avoir pour mission, de faire connaitre au monde entier, cette vie affreuse et malsaine que nous vivons dans ces lieux sataniques. Qu’avons-nous vraiment fait au ciel pour mériter un tel supplice ?»
C’est ainsi que l’adolescente de 16 ans, le visage couvert de larmes et la voix remplie de peine, s’est enfin retirée pour s’occuper de son négoce.
A suivre…
LA SIRENE