Et si la méthode Trump, aussi bien sur des sujets internes américains que sur des questions de politique étrangère, n’était qu’un enchainement infini de volteface ? Depuis son installation à la Maison Blanche, le président américain ne cesse de tourner le gouvernail du pouvoir au gré d’un programme politique que lui seul connait. Au-delà des retournements sur le plan domestique, c’est bien les voltefaces sur le plan diplomatique qui étonne plus d’un, notamment sur la question syrienne.
« L’Amérique d’abord » était l’un des slogans phares du candidat Donald Trump. Il avait promis alors l’ « isolationnisme » totale. Peu de temps après son investiture, il avait également, à l’opposé d’Obama, déclaré que la priorité des USA n’était pas de lutter contre Bachar Al Assad coupable de multiples crimes contre l’humanité mais de combattre le groupe terroriste Etat Islamique. Enfin, la Russie de Poutine, « ennemi traditionnel » du pays de l’Oncle Sam, n’était pas selon lui, le diable que tout le monde croyait.
Tout d’un coup, un revirement à 180 degré eu lieu. D’abord sur l’OTAN. Mercredi dernier, le Républicain a loué l’importance de l’Organisation du traité Atlantique-Nord (Otan), qu’il qualifiait pendant sa campagne d’«obsolète». Elle est désormais nécessaire, selon lui, à la résolution du conflit syrien. Pour justifier cette nouvelle position, le président des Etats-Unis a répété que l’Otan se serait recentrée sur l’antiterrorisme sous sa pression. «Je me suis longtemps plaint à ce sujet et ils ont changé. Maintenant, ils luttent contre le terrorisme. J’avais dit qu’elle était obsolète. Elle ne l’est plus», a assuré le républicain. Donald Trump a toutefois ajouté que les alliés européens devaient augmenter leurs dépenses de défense.
Puis, sur le dossier syrien. Fervent contempteur de l’ingérence en Syrie dès 2012, Donald Trump a martelé son refus de toute intervention, durant sa campagne et pendant ses premières semaines de présidence. Préférant laisser les forces en présence, dont la Russie soutien de Damas, gérer la crise. «Laissons la Syrie combattre Daech. Qu’est-ce que nous en avons à faire?» lâche-t-il notamment en septembre. Fin mars, le départ d’Assad n’est même plus une «priorité» pour la Maison-Blanche. Le secrétaire d’Etat, Rex Tillerson, affirme que le sort d’Assad «dépendrait du peuple syrien». Une position tranchant avec celle de Barack Obama, pour qui le départ du dirigeant syrien était vu comme une nécessité. L’attaque chimique au gaz sarin mardi 4 avril au nord-ouest du pays change la donne. Donald Trump confie son émoi devant les images des enfants et ordonne subitement des frappes punitives contre le régime syrien. Cette décision surprise met au jour les dissensions qui agitent la Maison Blanche.
Et enfin, en ce qui concerne la Russie. Ce devait être le règne de la détente absolue entre les deux anciens ennemis de la Guerre froide. Trump avait prôné, tout au long de sa campagne et au début de sa présidence, un rapprochement avec son homologue russe Vladimir Poutine. Une amitié semblait naître. Les relations bilatérales sont pourtant «au plus bas», a admis ce mercredi le président américain en marge d’une rencontre glaciale à Moscou entre les chefs des diplomaties des deux puissances nucléaires.
La guerre en Syrie demeure le contentieux le plus lourd entre Washington et Moscou, Donald Trump traitant son homologue syrien Bachar al-Assad de «boucher» et d’«animal» et jugeant «possible» que la Russie ait été au courant de l’attaque chimique imputée au régime de Damas.
Les tâtonnements de Trump prouveraient plus une méconnaissance des différents dossiers qu’il doit gérer plutôt qu’une violation systématique des promesses de campagne. Mais, pour une forte efficacité de toutes ses actions, une ligne claire et précise doit se dégager. Dans les jours à venir, nous verrons si son Administration changera une fois de plus son fusil d’épaule sur les questions brulantes de l’heure, syrienne notamment.
Ahmed M. Thiam
thiam@journalinfosept.com
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