À 48 heures près de la mobilisation générale du vendredi prochain, le Cheikh Mahmoud Dicko a fait une sortie stratégique ce mercredi. En haute autorité morale montée au front, il a, en quelque sorte, galvanisé ses troupes tout en ôtant à l’ennemi public n°1 tout espoir de se maintenir au pouvoir.
Sacré stratège que ce dignitaire religieux devenu la sentinelle vigilante du peuple! Il sait parler quand il le faut et, surtout, il a l’art de lancer les mots d’ordre de la manière la plus expressive possible. Pourquoi a-t-il pris la parole ce mercredi ? C’est parce que, attentif aux mouvements du camp adverse, il avait sans doute eu l’information que le Premier ministre Boubou Cissé se rendrait incognito ce jour à Nioro pour solliciter l’intervention du Chérif afin d’annuler l’assaut décisif de ce vendredi contre la tranquille citadelle occupée par IBK. L’intox et les mensonges étant les armes favorites du pouvoir en fin de règne, il fallait couper court aux savantes rumeurs qui ne manqueraient pas d’être distillées pour déstabiliser le mental et la résistance des légions prêtes à obliger IBK de rendre sa démission. N’a-t-on d’ailleurs pas entendu çà et là que le régime évanescent a fait appel à d’anciens officiers des renseignements généraux français accourus à Bamako avec des recettes miracles?
La désinformation a des limites, Goebbels n’ayant pas suffisamment enseigné.
Le pouvoir de Bamako est pour le moins acculé dans ses derniers retranchements. Il ne tient plus qu’à un fil. Forcé de jouer désespérément son va-tout, il ne manie plus que les moyens éculés de la divagation. La véhémence de l’instant étourdit tous ses sens. Il a tenté, d’abord, de tromper depuis pour le 5 juin que toute la révolte populaire en cours était motivée par un courant djihadiste qu’il connaissait suffisamment et qu’il détenait les preuves que 750 camions pleins de mercenaires et 450 autres bondés de miliciens islamistes allaient déferler sur Bamako afin de déstabiliser les institutions de la République. Le 5 juin
a vécu dans la ferveur patriotique d’un peuple volé, pillé et trahi.
Puis, des plumitifs et autres prêcheurs, stipendiés ou non par le régime, ont tenté de créer l’amalgame pour faire croire que Mahmoud Dicko étant un imam, ce sont des barbus qui s’empareront, au finish, des rênes de l’État. Terrible courte vue, trompeuse et mensongère. Il ne s’agit nullement de barbus, encore moins de charia à instaurer au Mali. Il n’est vraiment pas question de religion, mais de patrie selon les bons principes de la gouvernance démocratique. Trêve de tromperies!
Il suffit de regarder avec vérité les multiples ravages du pouvoir pour admettre que la chienlit ne doit plus perdurer. Alors, il sera facile de comprendre que Mahmoud Dicko est comme une autorité morale autour de laquelle se sont regroupés des politiques et des acteurs de la société civile. D’ailleurs, les réunions de l’aile politique du M5-RFP sont toujours présidées par Dr. Choguel K. Maïga en sa qualité de président par intérim du FSD.
Ironie du sort, poursuivi jusque dans son trou de rat, l’ultime geste d’IBK a été d’envoyer le Premier ministre reconduit chez un autre dignitaire religieux à Nioro, comme pour reconnaître que ce n’est pas un péché que les religieux se mêlent du traitement des questions nationales. Il suffit maintenant au régime d’ouvrir un peu les yeux pour admettre qu’il est temps, juste temps, de faire pénitence en remettant le pays à ses fils. Tout est perdu pour IBK, mais refuser la vérité risque de lui jouer un petit vilain tour que Mugabé, encore moins Hosni Moubarak, n’ont pu conjurer. C’est la méchanceté de l’histoire, pas celle des hommes.
Amadou N’Fa Diallo