Officier militaire ou homme d’affaires en uniforme ? Combien de hauts gradés de l’Armée nationale sont comme le patron des services de renseignements ?
Ces questions ne sont pas pour dénigrer un homme haut placé, si important qu’il est le cœur même de la sécurité de notre pays, en tant que gardien à la fois des institutions républicaines et du territoire national pour qu’aucun intrus malveillant ou vagabond ne puisse surprendre l’État. La manifestation citoyenne prévue pour le 5 juin a pris pour le puissant homme les couleurs d’un orage effrayant. Il est vite accouru chez le Chérif de Nioro pendant que le Premier ministre et tout le gouvernement cherchent désespérément un parapluie imparable. Pourquoi le Général Moussa Diawara est-il à présent le seul de l’establishment à se rendre chez le charismatique leader religieux ? Certains ont pensé que c’est pour supplier le saint homme de faire arrêter le mouvement du 5 juin afin de sauver le régime d’IBK. Mais la réalité est que, depuis belle lurette et davantage aujourd’hui, le Général Moussa Diawara défraie la chronique. Cela intrigue au plus haut point. Des rumeurs aux récriminations sous cape, on en est désormais à compter sur les réseaux sociaux les frasques portées sur son compte avec une frénésie qui donne le vertige. Moussa Diawara serait très certainement en quête de bénédictions pour se sauver des rafales de vent que ne manquera pas de déclencher l’orage.
Un officier militaire, qui plus, est directeur de la sécurité d’État, qui signifie patron des services secrets ou des renseignements, est normalement, et ce depuis la nuit des temps, un homme discret dont le visage ne mérite même pas d’être connu du plus grand nombre.
Malheureusement, de tous les généraux et autres officiers de notre armée nationale, Moussa Diawara, au lieu d’être le plus effacé en raison justement des responsabilités stratégiques qui sont les siennes, est le plus exposé, devenant même la vedette des médias au détriment de certains politiciens professionnels pourtant pas anonymes. Depuis que nos concitoyens ont peur ou hésitent d’en parler, c’est lui-même qui donnera finalement l’occasion de lever le voile sur son immense richesse accaparée dans un pays exsangue, tout en étalant ses penchants mondains excessifs. En effet, le 9 mars 2019, alors que le Mali était en deuil suite à des massacres au centre du pays, tueries massives que la Sécurité d’État n’avait nullement pu prévenir, le Général Moussa Diawara fêtait en grande pompe son 50e anniversaire, en faisant venir à Bamako une kyrielle de vedettes internationales du show-biz aux côtés d’artistes nationaux parmi les plus populaires. Comme si le Ciel lui-même s’était énervé de cette extravagance insultant la misère prégnante de la grande majorité des Maliens, dans les semaines qui suivirent immédiatement, d’autres massacres endeuillèrent à nouveau le centre du pays. Sans encore que la Sécurité d’État ait pu en signaler le moindre indice!
La liste sera longue à dresser. Mais force est d’admettre que les révélations se multiplient sur notre Sentinelle nationale sécuritaire. Moussa Diawara posséderait des dizaines de citernes pour le transport de carburants, lesquels feraient perdre des centaines de millions de francs CFA à Edm-sa par un système de filouterie sophistiquée; ce qui expliquerait en grande partie les baisses de performance de celle-ci et les fréquents délestages dont souffrent les populations et les entreprises.
Moussa Diawara passe pour être un fou amateur des voitures de luxe que l’on ne peut acquérir, là encore, qu’à coût de centaines de millions de francs CFA. Il en aurait même offert à de hauts responsables pour des raisons fort compréhensibles. Il se mure d’ailleurs qu’un cas singulier a même provoqué migraine chez le chef de l’État lui-même, pourtant amateur de luxe…
Ses acquisitions immobilières, villas cossues aux apparats de châteaux et autres domaines agricoles, tant au Mali qu’au Sénégal, voire au Canada et en Europe, seraient à même de le classer parmi les crésus que le monde contemporain connaît, même si l’on en faisait abstraction des propriétés du genre enregistrées au nom de son épouse et de ses enfants.
Pour avoir ses faveurs, sa protection toute divine, des opérateurs économiques achemineraient aussi chez lui, à son bureau comme à son domicile, toujours des centaines de millions de francs CFA par des voies dissimulées grandement huilées. Nous pouvons ici observer un répit.
Si tout cela était fondé, il s’agirait, incontestablement, de l’enrichissement illicite effréné dont les Maliens, leurs finances et leurs consciences sont les victimes indéniables. Rien ne peut justifier un tel niveau de richesses chez un officier militaire malien, même après une carrière de mille ans sous les drapeaux.
Fortunes mal acquises peuvent conduire à toutes les vanités, voire à toutes les folies. Ce que l’on ne peut nier aujourd’hui, c’est que, de l’avis de plusieurs militaires parmi les hauts gradés comme les soldats de rang, le Général Moussa Diawara se rend maintenant coupable de plusieurs immixtions inappropriées dans les casernes. En terme clair, il outrepasse ses prérogatives, tel un demi-dieu lâché contre la hiérarchie et la troupe. Dans cette veine, son épouse lui emboîterait allégrement les pas en venant distribuer vivres et argent aux veuves des militaires tombés au champ d’honneur. Cynisme ne peut être plus révoltant ! Nos militaires sont fauchés comme des lapins parce que, tout simplement, ils n’obtiennent pas les nécessaires renseignements!
Mais de quel droit se prévaut Mme Diawara pour se permettre l’immonde générosité dans les casernes militaires ? Pour beaucoup, c’est en raison d’une volonté inavouable de damer le pion à la première dame, Keïta Aminata Maïga, auprès des militaires. Prépare-t-on ainsi l’après-IBK?
Quoi qu’il en soit, Moussa Diawara est au centre de plusieurs inquiétudes. La nation doit être rassurée.
Pour toutes ces raisons, une enquête nationale s’impose, pour faire toute la lumière sur ce cas d’une singularité morbide. D’autant que la récente implication du Général Moussa Diawara dans la levée des barricades sur la RN4 indique que dans son Royaume de Danemark, il y a bien de choses pourries.
Cette enquête nationale doit comporter et mobiliser les parlementaires, les partis politiques, la société civile, les services étatiques de contrôle et ceux jouissant de l’autonomie d’action.
Pr Ali Nouhoum Diallo, ancien président de l’Assemblée nationale, ne mettait-il pas en garde le Général Moussa Diawara, dans l’affaire de la séquestration de Me Hassan Barry, contre toute velléité de succession à la Monastir? Comprenons bien l’histoire.
Mahmoud Soufi Maïga