Dans le dernier Rapport de la MINUSMA et du Haut Commissariat aux Droits de l’Homme, il ressort que, de janvier 2016 à Juin 2017, plus de 600 cas de violation des Droits de l’Homme ont été commis dans les zones où la Commission des Droits de l’Homme de la MINUSMA a pu enquêter. Sur ces cas de violation des Droits de l’Homme, 78% ont été commis par les acteurs non étatiques ; c’est-à-dire la Coordination des Mouvements de l’Azawad (CMA), la Plateforme, les groupes terroristes et les groupes armés non identifiés ; 20% par l’Armée malienne et la justice et 2% par la MINUSMA. Ces violations ont fait 2700 victimes et 441 morts.
Mais pour la première fois de l’Histoire des missions onusiennes déployées, le parallèle est fait entre cette situation de violence des droits humains et l’avancée d’un accord de paix. Il ressort de cela que l’implication des signataires de l’accord dans les manquements aux droits de l’homme constitue un obstacle à la sortie de crise. Dans l’entretien qui suit, Guillaume Ngefa de la Division Droits de l’Homme de la MINUSMA donne plus d’explications.
LE COMBAT : Quelle est la tendance des violations des droits de l’homme au Mali ?
Guillaume Ngefa: Il y a deux ans, la majorité des cas de violation des droits de l’homme étaient concentrées dans le Nord du pays qui était et qui est toujours sous contrôle des groupes armés. À la suite de la signature du premier accord de Ouagadougou, la tendance des violations et des abus a continué jusqu’à ce que la majorité des groupes armés entre dans la mise en œuvre de l’accord d’Alger. Là on a commencé à avoir une baisse en fréquence des abus sérieux de droits de l’homme. Cependant, en 2016 et 2017, les différentes confrontations entre les groupes armés du Nord ont conduit à des violations des droits de l’homme. Suite à la signature de convention entre la CMA et la plateforme, on a vu que les violations liées aux confrontations entre les groupes armés a diminué, mais d’autres formes ont prospéré. Cette année, depuis que la situation sécuritaire a commencé à se détériorer au Centre du pays, avec la présence des groupes armés actifs et d’autres non identifiés, couplés aux opérations anti terroristes, on a commencé à avoir plus de violation des droits de l’homme. Ce rapport fait un état de la situation des droits de l’homme au Mali en général en mettant un accent particulier sur le processus de paix pour la simple raison qu’il y a des acteurs qui ont signé l’accord et qui ont des responsabilités dans la mise en œuvre dudit accord. C’est pour cette raison qu’on a mis cet accent. Nous aurons d’autres Rapports beaucoup plus ciblés qui vont décrire les violations des droits de l’homme dans le centre du pays.
Peut-on dire que les signataires de l’accord sont aujourd’hui un obstacle ?
Absolument. Le respect des droits de l’homme est un indicateur de la mise en œuvre de l’accord. Moins on a des violations de droits de l’homme, plus l’accord sera bien appliqué parce que les droits des populations seront respectés. C’est pourquoi l’élément ‘‘droits de l’homme’’ est essentiel dans un accord politique. Par exemple, la lutte contre l’impunité, il ne faudrait pas que les personnes qui ont commis des violations de droits de l’homme et des crimes graves au regard des différentes conventions internationales puissent siéger comme membres ; ils doivent rendre compte.
C’est pourquoi il est important que ceux qui ont signé l’accord, qui siègent et qui ont la responsabilité de la mise en œuvre de l’accord puissent être responsables des violations et abus sérieux des droits de l’homme qui ne sont pas directement commis par eux ; mais, par les éléments ou les groupes en raison de la responsabilité de commandement.
Propos recueillis par Mohamed Sangoulé DAGNOKO : LE COMBAT