La journée du dimanche a été longue pour les Maliens et plus particulièrement pour les autorités de la transition. Cependant, certains politiques ont réagi au sujet des sanctions de la CEDEAO lors du sommet tenu à Accra au Ghana. Interrogé par un média français, Djiguiba Keïta, le secrétaire général du Parti pour la Renaissance Nationale (le PARENA), tout en regrettant que l’on en arrive aux sanctions, a fait savoir qu’il n’est pas surpris de la décision des chefs d’État. Si ces sanctions ne sont pas bonnes pour le Mali, selon le président de Fer-Mali, Sory Ibrahima Traoré, Jeamille Bittar, membre du M5-RFP, exhorte pour sa part les autorités de la transition à ne pas fléchir devant la CEDEAO, une sorte de défiance vis-à-vis de l’organisation sous régionale.
Les chefs d’État de l’organisation sous-régionale ont durci le ton le dimanche 7 novembre 2021 lors d’un sommet exceptionnel en adoptant des sanctions individuelles contre les dirigeants de la transition et leurs familles. Il s’agit du gel des avoirs financiers, l’interdiction de voyager. Ceci, en réponse aux différents actes posés de nature à retarder ou à empêcher le bon déroulement de la transition, particulièrement l’incapacité de respecter le délai. La CEDEAO a donc rappelé aux autorités de la transition au respect de leur engagement initial de tenir des élections (présidentielle et législatives) en février prochain pour un retour à l’ordre constitutionnel.
Sur ces nouvelles sanctions, Djiguiba Keïta, le secrétaire général du Parti pour la Renaissance Nationale (le PARENA) n’est pas surpris au regard des signes que donnaient à voir les autorités.
« Nous regrettons qu’on en soit arrivés là, mais faute de volonté politique de tenir nos engagements. Et cela signifie que nous sommes en porte-à-faux avec la communauté internationale, avec la CEDEAO et tous nos voisins. Et c’est à nous de trouver la solution… Depuis le coup d’État du 18 août 2020, il n’y a pas une date concrète pour aller dans le sens de l’organisation des élections. Nous ne croyons pas que ce soit les sanctions qui doivent pousser les militaires à respecter leurs engagements. Nous souhaitions seulement, qu’il y ait un sursaut national, que les Maliens mêmes comprennent qu’ils doivent se retrouver, pour donner un nouveau départ et convaincre nos partenaires que nous sommes de bonne foi, pour arriver à une fin heureuse de la transition, rassembler les forces vives de la nation en quarante-huit heures, pour se donner une nouvelle feuille de route et rassurer nos partenaires que nous pouvons tenir les élections dans tel et tel délai. Et à ce moment-là, convenir avec la CEDEAO et avec ce nouvel agenda, nous pouvons tenir nos engagements », estime Djiguiba Keïta.
Quant à Jeamille Bittar, i ne voit pas le danger venir. Il demande aux autorités maliennes de transition de ne pas fléchir et explique tout le mal qu’il pense de cette décision de la CEDEAO. « Nous sommes quand même un État souverain. Il ne faudrait pas que la CEDEAO nous impose quelque chose qui pourrait nous amener dans un chaos qui ne dirait pas son nom. Il faut que les gens comprennent qu’aujourd’hui, l’environnement ne se prête pas à tenir les élections. Parce que le territoire est envahi par l’insécurité et cette insécurité a été sciemment créée par la France. La communauté internationale, notamment la CEDEAO, aujourd’hui, n’est pas en mesure de nous faire un dictat. Parce que la décision du peuple malien aujourd’hui est d’assainir cet environnement sur le plan sécuritaire, sur les réformes que nous envisageons, pour que nous ayons moins de contestations possibles après les futures élections à venir… Je pense que c’est à cela que la communauté internationale devrait nous aider, plutôt que des menaces, des pressions, pour déstabiliser encore davantage notre pays. Nous n’avons pas besoin de cela », prévient Jeamille Bittar.
« Les sanctions ne sont jamais une bonne chose »
Le Front pour l’Émergence et le Renouveau (Fer-Mali), association créée en soutien aux autorités de transition, et son président, Sory Ibrahima Traoré, déplorent la décision de la CEDEAO. « Les sanctions ne sont jamais une bonne chose, surtout à l’endroit des dirigeants d’un pays en difficulté extrême comme le Mali. Il est évident aujourd’hui que le Mali ne peut pas organiser une élection crédible, transparente et apaisée, à la date du 27 février 2022. Il serait judicieux qu’ensemble, nous nous mettions autour d’une table, pour analyser dans le fond, les conditions à créer pour tenir une élection qui conduira le Mali vers une période plus stable et meilleure. Il est évident que les conditions sécuritaires et les conditions réglementaires et légales, qui devront être créées pour un processus électoral au Mali, ne sont pas réunies. Le Mali, aujourd’hui, a au moins trois quarts du territoire qui échappent presque totalement au contrôle de l’État central. Si nous arrivons à créer les meilleures conditions sécuritaires, c’est après cela que nous pourrions parler d’élections », explique Sory Ibrahima Traoré.
À noter qu’à ce jour, les autorités maliennes de transition n’ont pas réagi officiellement à cette annonce de sanctions contre elles.
Bourama KEÏTA LE COMBAT