Arrivée dans la capitale malienne depuis lundi 11 janvier 2021, le Médiateur de la CEDEAO dans la crise sociopolitique au Mali, Goodluck Jonathan, écoute les différents acteurs dans cette crise. Au deuxième jour de sa visite, il a échangé avec le Mouvement du 5 Juin-rassemblement des Forces Patriotiques (M5-RFP). Son porte-parole, Chogel K. Maïga n’est pas allé par le dos de la cuillère. Il dénonce “la militarisation“ de la transition actuelle.
Le Mouvement du 5 juin, est très en colère. En témoigne les propos de son porte-parole, Choguel K. Maïga lors de sa rencontre avec le médiateur, Goodluck Jonathan.
En effet, en rencontrant Goodluck Jonathan, le Mouvement du 5-Juin a profité pour vider son sac qui était trop plein. Il a formulé quatre griefs contre les autorités militaires en charge de la transition. Selon le porte-parole, l’engagement d’une Transition civile a été « violé », aux yeux du M5-RFP. Pour preuve, détaille-t-il, le président désigné de la Transition, un Colonel-major à la retraite, “ne détient pas la réalité du pouvoir’’. En vérité, affirme cet influent membre du M5-RFP, le Vice-président de la Transition, chef de la Junte, est le véritable Chef de l’Exécutif au Mali.
Aux dires de Choguel Kokala Maiga, le Colonel Assimi Goita a démontré sa mainmise sur le pouvoir en attribuant les postes clés du gouvernement aux militaires membres de la Junte. Aussi, le Président du Conseil National de la Transition (CNT), un autre colonel de Kati comme tous les membres du CNT ont été nommés par le seul et unique vrai détenteur du pouvoir au Mali, en la personne du Colonel Assimi Goïta. Il estime que “ l’essentiel des nominations au sein de l’Administration sont faites par les militaires et choisies parmi les proches de la Junte.’’
Fortes menaces sur les élections
Face à une transition qu’il estime militarisée, Choguel Kokala Maïga, porte-parole du M5-RFP voit là des menaces “très fortes’’ qui pèsent sur la tenue d’élections régulières, libres, transparentes et crédibles. En ce sens, Choguel dénonce la mise en place unilatérale d’une cellule dite d’appui aux élections en lieu et place d’un organe unique et indépendant de gestion des élections conformément à la volonté de la classe politique.
Partant de ces constats, le M5-RFP a annoncé qu’un processus “non inclusif’’ de révision de la Constitution est en cours au Mali. Enfin, le mouvement dénonce l’installation en cours d’un régime “autocratique’’. En témoigne, selon le porte-parole, la généralisation des arrestations extrajudiciaires. Des actes orchestrés par la Junte militaire depuis son fief de Kati. C’est pourquoi le M5-RFP estime qu’il faut un “acte formel de dissolution’’ du Conseil national pour le Salut du Peuple (CNSP), sans délai.
Échange avec le Premier ministre
Tel qu’articulé dans son agenda, le Médiateur de la CEDEAO a rencontré le Premier ministre, les ambassadeurs des pays de l’espace CEDEAO, ou encore des membres de la société civile hier mardi 12 janvier. Le médiateur de la CEDEAO dans la crise politique malienne a multiplié les rencontres depuis son arrivée à Bamako, lundi 11 janvier 2021. Goodluck Jonathan a surtout échangé avec le Premier ministre sur la situation sociopolitique marquée des grèves et l’arrestation de plusieurs personnalités. Après sa rencontre avec le représentant spécial du secrétaire général des Nations unies au Mali, Mahamat Saleh Annadif, président du comité local de suivi de la transition, Goodluck Jonathan a ensuite échangé avec le Premier ministre Moctar Ouane. Ce dernier lui a fait le point de la situation politique et sociale avec un accent particulier sur l’ébullition du front social marquée par de nombreux préavis de grèves.
“Il y a beaucoup d’agitation, beaucoup de trouble surtout sur le front social avec les syndicats. Le Premier ministre a eu la clairvoyance de nous édifier là-dessus. Il nous a donné également des informations sur la feuille de route de la transition ‘’ a précisé l’ex-président nigérian.
Goodluck Jonathan et Moctar Ouane ont échangé sur l’arrestation des personnalités dans l’affaire dite de “ déstabilisation de la transition’’. “Nous avons marqué notre disponibilité avec le gouvernement pour trouver une solution à toutes ces difficultés’’, a indiqué le médiateur de la CEDEAO à sa sortie d’audience.
La question qui se pose aujourd’hui est de savoir; après cette visite, les acteurs politiques et les autorités de la transition trouveront-ils une issue pour s’entendre sur la conduite à tenir ou seront-ils dans la défiance les uns et les autres ?
Bourama Kéïta