C’est à peine que le Commissaire islamique de Gao, celui-là même qui faisait subir aux populations de la cité des Askia et environnants des atrocités et exactions pendant l’occupation djihadiste de 2012, comparaissait, hier, mercredi, devant la Cour d’assises, que le dossier l’opposant au Ministère Public a été renvoyé à l’audience du vendredi 18 août 2017. L’argument avancé par la Défense pour contrer celui par lequel la Cour justifie le renvoi, laisse planer le doute sur la tenue effective de cette confrontation.
L’absence des parties civiles évoquée par la Cour pour justifier le renvoi de l’affaire Ministère public et le Commissaire islamique de Gao a trouvé du répondant dans le pèlerinage à la Mecque auquel les Avocats de la Défense sont programmés à la période comprenant la date du 18 août.
Aliou Mahamane Touré, l’accusé, hier, mercredi 9 août, une fois à la barre sur la demande du Président de la Cour, Lamine Samaké, l’Avocat de la partie civile, Me Mouctar Mariko, a demandé le renvoi de l’affaire à l’audience du vendredi 18 août 2017. La raison évoquée est toute simple : les parties n’ont pas effectué le déplacement sur les lieux. Les Avocats de la Défense se sont farouchement opposés à cette demande de renvoi avec le prétexte qu’ils iront tous à la Mecque avant cette date.
Le Ministère Public a suivi l’Avocat de la partie civile dans sa demande de renvoi. La Cour s’est retirée pour statuer sur la question. A son retour, elle a décidé de renvoyer l’affaire à l’audience du vendredi 18 août 2017.
Après le renvoi de l’affaire, l’Avocat de la Défense, Me Malick Maïga, s’est dit scandalisé et même révolté parce ce que son client (Aliou Mahamane Touré) est privé de liberté depuis 4 ans et a été entendu à l’enquête préliminaire et à l’instruction. Selon Me Maïga, la Chambre d’accusation a pris une ordonnance de renvoi devant la Cour, le dossier est totalement en état pour être jugé, mais pour faire plaisir à des parties civiles qui ne sont même pas obligées d’être présentes physiquement et dont la réclamation ne peut être que pécuniaire, la Cour a accédé à une demande de renvoi farfelue. Il a dit également s’être scandalisé parce que les trois Avocats qui doivent assurer la défense d’Aliou Mahamane Touré, qui sont les Avocats régulièrement constitués par l’accusé, ne seront pas à l’audience du 18 août prochain pour le procès parce qu’ils sont programmés pour se rendre à la Mecque. C’est dire que le pèlerinage fait donc office d’invité surprise à l’ouverture de cette audience. Ce qui compromettrait la tenue effective de ce procès lors de l’audience du 18 août.
L’Avocat de la partie civile, Me Mouctar Mariko a, quant à lui, affirmé qu’il a demandé ce renvoi pour que la Cour accepte le principe du contradictoire et que c’est en cela que ce procès aura une crédibilité. Selon Me Mouctar, l’Avocat qu’il est, ne pourra pas représenter les victimes qui ont souffert dans leurs chairs et la présence même de ces victimes est un élément de conviction. «Celui qui a eu la main amputée quand il se présentera devant la Cour, il n’y aurait plus discussion en la matière ; quand celle-là qui a été flagellée se présenterait, il n’y aurait plus besoin de prouver quoi que ce soit encore», a-t-il justifié.
Pour rappel, l’ancien Commissaire de la Police islamique de Gao est le premier à être jugé pour des crimes commis contre des civils durant l’occupation du Nord-Mali par les groupes armés indépendantistes et djihadistes, entre 2012 et 2013.
Aliou Mahamane Touré, puisque c’est de lui qu’il s’agit, est né vers 1970, à Gao, de feu Mahamane Ag Hamed Cheick et de Fadimata Ahamar Touré. Il est accusé pour «Crime de guerre, tortures, trahison, atteinte à la sûreté intérieure de l’Etat, atteinte à l’intégrité du territoire, association de malfaiteurs, coups et blessures volontaires, terrorisme, détention d’armes de guerre et de munitions ».
Les faits remontent au moment de l’occupation des Régions du Nord par les “Djihadistes”, courant 2012. Le sieur Aliou Mahamane Touré s’est fait recruter dans les rangs du Mouvement pour l’Unicité et le Jihad en Afrique de l’Ouest (MUJA0)).
Après avoir appris à manier les armes, il fut doté, entre autres, d’un pistolet mitrailleur (PM) à crosse rabattage n° 9270, d’un pistolet automatique (PA) n° 6282 calibre 7,65 mm, de minutions et d’un talkiwalki, avant d’être désigné Commissaire islamique de la ville de Gao.
Ainsi, en sa qualité de Commissaire islamique, il faisait subir aux populations de sa ville natale et environnants, de nombreuses atrocités et exactions, en pillant leurs biens.
Tout au long de l’enquête préliminaire et au cours de l’instruction, Aliou Mahamane a déclaré avoir volontairement adhéré au Mouvement pour l’Unicité du Jihad en Afrique de l’Ouest (MUJAO). Cette adhésion est matérialisée par ses nombreux déplacements avec les membres dudit mouvement à travers tout le désert du Sahara malien.
Katito WADADA : LE COMBAT