Le rapport fait état de plusieurs attaques intercommunautaires mais aussi visant les forces de sécurité et la Minusma qui restent des cibles privilégiées pour les terroristes. 67 soldats maliens et 4 casques bleus sont morts cette année dans des attaques.
Six ans après l’intervention française contre les jihadistes qui avaient pris le contrôle de Tombouctou, Gao et Kidal, la situation dans le nord reste, elle aussi, instable. Pour rétablir l’ordre, Antonio Guterres préconise de poursuivre la stratégie de « désarmement et remobilisation des combattants ». Mis en place fin 2018, ce programme a permis d’intégrer près de 1 500 personnes issues de différents groupes régionaux au sein de l’armée.
Un contexte régional qui inquiète
Autre source d’inquiétude, les zones frontalières avec le Burkina Faso et le Niger. « Ces dernières années, la situation régionale s’est considérablement dégradée », explique Jerome Pigné, président de 2r3s (Réseau de réflexion stratégique sur la Sécurité au Sahel), contacté par France24. « On n’a pas réussi à préserver le Niger et le Burkina de cette violence. Des régions entières du Burkina sont aujourd’hui hors de contrôle. La dégradation de la situation est comparable à ce qu’il s’est passé avec le nord Mali ».
Le rapport de l’ONU pointe du doigt les groupes terroristes qui évoluent dans ces régions, traversent les frontières et élargissent leurs actions aux pays voisins. Pour Jerome Pigné, la crise régionale est avant tout liée à une fragilité structurelle : « C’est le contrôle des ressources et du trafic qui crée les conflits. Les populations nomades et sédentaires n’ont pas les mêmes logiques, ce qui pose parfois des problèmes. Le terrorisme est un phénomène ponctuel qui instrumentalise les aspects religieux et ethniques pour attiser les tensions. »
Prolonger et « adapter » la Minusma
Alors que le Conseil de sécurité doit se prononcer, le 27 juin, sur le prolongement de la mission Minusma, Antonio Guterres affiche son soutien au maintien des troupes. S’il ne prévoit pas d’augmentation du contingent, (environ 1 500 militaires et policiers), il préconise par contre un changement de stratégie visant à mieux « adapter » la répartition sur le terrain, notamment en transférant une patrouille de Bamako à la région centre.
L’autre stratégie vise à céder progressivement le contrôle de certaines zones stratégiques aux Maliens. Ainsi le commandement du camp de Diabaly, au centre, devrait passer sous contrôle des autorités locales permettant de récupérer et déployer 650 soldats supplémentaires dans la région de Mopti.
Une communauté internationale divisée
Face à une menace jugée grandissante, le secrétaire général des Nations unies préconise la continuité à budget constant. Il faut dire que le renouvèlement de la mission n’est pas vu d’un bon œil par tous les membres du conseil de sécurité.
Washington, qui affiche sa volonté de désengagement des conflits internationaux, considère la mission couteuse (plus d’1 million de dollars par an) et peu efficace même si il reste favorable à la lutte anti-terroriste. La position américaine tranche avec les propos du ministre des affaires étrangère français Jean-Yves Le Drian qui salue « des progrès importants » notamment sur la « démobilisation des combattants » et le processus de « reconstitution de l’armée ».
Pour Jerome Pigné, il ne fait aucun doute que la mission sera prolongé : « l’enjeu sécuritaire est trop important pour se désengager. Mais la Minusma, comme les acteurs locaux, doivent s’inscrire dans une solution politique sur le long terme. Si on se contente de déplacer les troupes pour faire tempon dans les zones sensibles, on ne reglera rien et les soldats continueront d’etre pris pour cibles ».