L’accord militaire, conclu par notre pays et la France en mars 2013 pour conférer un statut juridique aux forces françaises en mission sur le territoire malien, prête à confusion à bien d’égards. D’où, son contenu mérite de passer au peigne fin. Publié par décret n°2013-364 du 29 avril 2013, cet accord qui se présente sous forme d’échange de lettres entre les Gouvernements français et malien pour déterminer le statut de la force ‘’Serval’’ comporte des vices de fond susceptibles de porter préjudice à la souveraineté de l’Etat malien.
Il est, certes, vérifié et nul n’ignore d’ailleurs que les conditions de détresse dans lesquelles les autorités de la transition malienne avaient lancé l’appel au secours en direction de la France, n’étaient pas de nature à rejeter plus tard une quelconque clause contenue dans l’acte de légitimation de l’opération salvatrice Serval. Mais, cependant, un peu plus de 3 ans après sa signature, un détour sur son contenu permet de se rendre compte que notre pays s’est sacrifié sur l’autel de la chasse aux djihadistes en cédant d’énormes prérogatives d’ordre judiciaires surtout. Le cas le plus ahurissant, dans ce document, est contenu dans son article 9 qui suscite curiosité au point où l’on peut souhaiter l’avènement d’un cas d’espèce pris en compte à ce niveau afin de voir le traitement qui lui sera réservé.
En stipulant, en effet: «Les parties renoncent mutuellement à tout recours pour les dommages réciproques causés à leurs personnels et à leurs biens par les personnels ou les biens de l’autre partie, y compris ceux ayant entraîné la mort, en raison d’actes ou de négligence commis à l’occasion du stationnement du détachement français ou de l’exécution par le détachement de ses missions. Les dispositions précédentes ne s’appliquent pas en cas de faute lourde ou intentionnelle. Par faute lourde, il convient d’entendre l’erreur grossière ou la négligence grave. Par faute intentionnelle, il convient d’entendre la faute commise avec l’intention délibérée de son auteur de causer un préjudice. La partie malienne prend à sa charge la réparation des dommages causés aux biens ou à la personne d’un tiers, même lorsque la partie française en est partiellement à l’origine. En cas d’action judiciaire intentée à l’occasion de tels dommages, la partie malienne se substitue dans l’instance à la partie française mise en cause». L’article 9 de cet accord condamne l’Etat malien à répondre d’éventuelles exactions de l’opération Serval sur le sol malien. Autant dire que les forces françaises, parce que disposant d’un bouclier qui devra répondre à leur place en cas de pépin judiciaire, ont libre cours de se défouler comme elles veulent dans l’exercice de leur mission. Cet article 9, outre les ambigüités qu’il contient dans les interprétations données aux fautes intentionnelles et aux erreurs grossières, protège en sa fin Serval contre les viols, les bavures et des coups savamment orchestrés sur des cibles autres que celles pour lesquelles il est sollicité au Mali.
Aucun sacrifice n’aura évidemment été trop grand quand il s’est agit, pour les autorités maliennes, de donner autant de gages possibles à ceux qui sont venus sauver des populations maliennes de l’emprise djihadiste et terroriste. Il va alors s’en dire que cette dernière crise aura été celle qui a fait payer au Mali le plus lourd tribut de son Histoire.
Katito WADADA : LE COMBAT