Il a juste fallu que son père, Ibrahim Boubacar Kéita, fût historiquement plébiscité pour la magistrature suprême, pour que le rentier d’hier fût mystérieusement parachuté à hémicycle où, à la stupéfaction de tous, ce marin sans boussole sera élu par un petit groupe de spatulaires comme président de la Commission défense et sécurité de l’Assemblée nationale. De vendeur de véhicules, en passant par l’Assemblée nationale, l’homme est au cœur de tous les grands scandales du monde. Rétrospectif sur le parcours d’un inconnu au bataillon…
Il importe sérieusement de revenir sur une question institutionnelle aussi cruciale que celle-ci, et dont les Maliens semblent avoir malheureusement laissé passer sans grogne. Avant les législatives de 2013, Karim Kéita (puisque c’est de lui qu’il s’agit) n’était presque connu de personne.
Ce fut donc un vrai bazar institutionnel que de procéder à un tel jeu qui, en vérité, ne soit autre qu’un témoignage irréfutable de l’insouciance morale et le vagabondage politique des nouveaux tenants de l’appareil public ainsi que l’inénarrable médiocrité d’une institution parlementaire exclusivement dédiée à la cause de l’exécutif, au préjudice d’un peuple de plus en plus désappointé.
Sur quelle base a-t-on injustement écarté le général de police Niamé Kéita pour placer Karim Kéita à la tête d’une auguste Commission, sachant qu’il n’en avait aucune compétence spécifique ?
Du point de vue législatif ou même identitaire, Karim Kéita jouirait-il d’avantages constitutionnels particuliers comparativement à l’élu de Nara qui avait pourtant le meilleur profil, jusqu’à ce qu’on tente de forcer celui-ci à devenir l’adjoint de celui-là même qui n’en avait aucune notion, après avoir infligé au général un tel affront ?
C’est le lieu de nous demander si nous vivons réellement dans un Etat sérieux. Avec une nomination aussi fantaisiste que farfelue, l’on comprend mieux pourquoi les Forces de défense et sécurité maliennes vont plutôt d’échec en échec, désespérément incapables de se sortir d’affaire, un outil de souveraineté de plus en plus banalisé par le dilettantisme fieffé d’un responsable nommé par pur favoritisme.
Gestion calamiteuse
Pour tenter de remédier à un fiasco institutionnel sans précédent, et soulager ainsi sa mauvaise conscience, Karim Kéita fera récemment voter à l’AN, l’octroi d’une « prime à la mort » aux soldats assassinés par une politique de défense dont il a, lui aussi, une part de responsabilité.
Les Forces armées maliennes (FAMa) sont devenues une franche risée par la faute de tout un conglomérat de dérives et malversations, et donc, un énorme arsenal de mauvaise gestion soigneusement entretenu par une horde de prébendiers sans scrupule, tant parmi les parlementaires que les membres de l’exécutif, agissant de mèche avec des éléments influents de la hiérarchie militaire.
Aux antipodes d’un tel saupoudrage de Karim Kéita, ces soldats braves qui se battent avec honneur et fierté, n’ont juste besoin que de moyens offensifs adéquats leur permettant de combattre dignement et non une irrévérencieuse prime à titre posthume. Car, il s’agit ici, de préserver l’armée dans toute sa vitalité, défendre les Maliens partout où ils sont et faire respecter, vaille que vaille, l’Etat du Mali, un Etat profondément affaibli par une gouvernance vicieuse et pusillanime.
Il ne s’agit donc point d’attendre que toute l’institution militaire soit décimée jusqu’à la lie de ses capacités avant de vouloir s’engouffrer dans une aussi laide posture. Par ailleurs, où vont tous ces fonds annuellement alloués à l’armée ? Que fait la Commission défense et sécurité de l’AN du budget destiné aux structures militaires ? Ne servirait-il qu’à se pavaner dans des véhicules de luxe ou s’offrir des voyages à l’étranger ?
Karim, l’enfant gâté du chef de l’Etat
Quelle est la nature réelle de la politique que mène, jusqu’ici, Karim Kéita et ses sbires, à la tête d’une Commission dont ils n’ont manifestement aucune maîtrise des dossiers ? C’est en cela qu’un audit sincère et rigoureux, diligenté par une structure sérieuse, s’impose à tout point de vue. Car, cette Commission dont le fils du président fut mystérieusement porté au sommet, s’avère aujourd’hui l’une des plus budgétivores de l’Assemblée nationale. Et Karim Kéita et ses ouailles en sont fortement interpellés et devront répondre de leur forfait.
C’est au vu de tout un tintamarre, toute une multitude de questions sans réponses que nous sommes en droit de déduire que notre outil de défense qu’est l’armée malienne a encore un long et périlleux chemin à parcourir. Car même avec tous les arsenaux de la plus grande puissance miliaire au monde, notre armée n’ira nulle part tant qu’elle restera entre les mains d’une mafia horrible, un clan d’individus incompétents, plutôt mus par le prestige du pouvoir et qui, des fois, ne s’entredéchirent que pour des effondrilles au mépris du nécessaire commun.
Nonobstant il n’est un secret pour personne que l’armée malienne est une armée qui se bat avec ses moyens de bord. Nous avons vu des soldats se battre jusqu’à la mort pour sauver la patrie. Ils méritent accompagnement et soutien des plus hautes autorités.
Récemment cité par des confrères dans beaucoup de dossiers louches, l’enfant chouchou du président n’est toujours pas arrivé à convaincre ses détracteurs. Pis, il leur donne raison d’une manière ou d’une autre à travers des actions qui vont en sa défaveur. La dernière en date est l’affaire qui l’oppose à nos confrères du Sphinx. Karim Kéita, à travers cet acte semble confirmer tout ce dont il a été accusé depuis toujours.
Nous reviendrons dans nos prochaines éditions sur l’affaire Oryx qui semble être oubliée par bon nombre de maliens
D. T. et D. K. LA SIRENE