Directeur d’école et membre du Collectif des jeunes de Kati contre la corruption, Karamoko Diakité dit Kadhafi a accordé une interview à votre quotidien, LE COMBAT, le weekend dernier. De la croisade déclenchée par la justice contre la corruption à d’autres actualités brulantes du pays notamment le Dialogue national inclusif et le phénomène d’insécurité grandissante, l’Homme s’est distingué, dans ses propos, par une objectivité sans renom. Lisez !
LE COMBAT: Présentez-vous à nos lecteurs, Monsieur
Karamoko Diakité: Merci de m’avoir donné l’opportunité de m’exprimer dans votre journal. Je m’appelle Karamoko Diakité dit Kadhafi. Marié et père de deux enfants, j’habite à Kati Malibougou II. Je suis Juriste de formation, actuellement je dirige une école privée de Kati. En tant que citoyen actif, je m’intéresse beaucoup à la vie de la nation tout en émettant mes idées et faisant valoir mon savoir-faire dans son édification. Je voudrais montrer à nos acteurs politiques qu’il ne suffit pas d’être membre du Gouvernement ou élu pour participer au développement de sa communauté.
Vous êtes alors membre d’un mouvement de soutien à la justice malienne surtout en ces temps où la lutte contre la corruption semble se réaliser. D’abord, comment est venue cette idée ?
Le Mali est une République et nul ne peut prétendre de s’en approprier. Que tu sois nanti, pauvre, élite ou citoyen lambda, tout le monde demeure égal devant la loi. Malheureusement, cette prescription constitutionnelle ne semble pas être comprise par certains Hauts Responsables qui se croyaient intouchables. Dans ces derniers jours, la justice dans leur lutte contre la corruption et de la délinquance financière en République du Mali a redonné l’espoir au Peuple malien. Cette renaissance de la justice est devenue une réalité aujourd’hui grâce aux arrestations des détourneurs des deniers publics, qui, désespérés dans leurs geôles, paient des gens pour troubler l’ordre public afin de saboter l’exaltant et noble combat des tribunaux. Certains dans leur sortie ratée se sont permis de lancer un ultimatum aux Autorités compétentes, d’autres sont en train de chialer sur les réseaux sociaux pour obtenir la libération sans condition de leurs mentors respectifs. Aux regards de tous ces vacarmes honteux, illégaux et illégitimes, nous, Jeunes de Kati, avons décidé de mettre en place un collectif pour soutenir et aider la justice dans sa traque des prédateurs de la République. Puis montrer aux agitateurs qu’ils doivent se calmer et laisser la justice faire son travail.
Ainsi, est née spontanément notre plateforme, le 22 septembre 2019,à Kati. Elle s’appelle «Collectif des Jeunes de Kati contre la Corruption» (C.J.K.C). Sa date de création nous rappelle au Père de la Nation Modibo Kéïta qui a servi le pays avec loyauté et patriotisme et non se servir ou servir ses proches d’abord. «Le jour où Modibo est mort, il n’avait que 800 F maliens dans son compte et une parcelle en son nom», aimait à le dire Feu Seydou Badian Kouyaté. Le but principal de notre collectif est de façonner un nouveau citoyen qui aura peur de ramasser par terre l’argent d’autrui à fortiori dérober la chose publique. Notre credo est ‘’ANW KA YOUROUKOU YOUROUKOU Kèlè’’ (autrement dit: luttons contre la corruption).
Vous croyez en cette justice à laquelle la quasi-totalité des Maliens sont presque déçus pour nettoyer l’Administration publique ?
Il y a belle lurette, les Maliens clamaient une justice équitable, aujourd’hui les lignes commencent à bouger avec l’arrivée de l’imperturbable Ministre de la Justice sous l’égide de Malick Coulibaly. Nous avons foi en ce nouvel élan de la justice malienne, si on les laisse continuer ce combat, d’ici à deux ans notre pays sera une référence en termes de lutte contre la corruption en Afrique. Mais, aujourd’hui la chanson la plus chantée à Bamako est «Personne n’est propre». Un constat amer, opposition comme majorité prient pour que ce combat échoue ; car, ils sont en majeure partie tous souillés. Incha Allah, le Peuple averti soutiendra sa justice jusqu’au bout. Il faut reconnaitre que le Président IBK, malgré qu’il est le premier Magistrat du pays, il n’empiètera pas la justice. Tout ceci redonne l’espoir au Peuple malien.
Quelles sont les démarches pour lesquelles vous optez pour soutenir la justice dans cette croisade contre la corruption ?
Le Collectif des Jeunes de Kati contre la Corruption (CJKC) se veut un lanceur d’alerte. Nous nous ne sommes pas là pour se venger ou pour faire des dénonciations calomnieuses à l’égard de qui que ce soit, de tout innocent. Nous allons nous organiser pour dénicher les délinquants financiers. Nous serons présents dans toutes les structures, au bord des routes, dans les hôpitaux, dans les facultés, etc. Nous serons équipés des technologies de dernière génération. Il faut que tout le monde ait peur de l’un de l’autre. Voilà, un avant-goût de l’une de nos méthodes pour débusquer les voleurs de la République.
Maints cas de détournements dont certains ont fait l’objet d’un appel à témoins par le Pôle économique et financier. Votre plateforme est-elle dans la même dynamique de contribuer à cette fourniture d’éléments ?
Tout d’abord nous remercions le Procureur d’avoir osé. Notre Collectif fera le nécessaire pour fournir tout ce qui pourrait aider la justice malienne à faire la lumière sur cette affaire des avions cloués au sol. Nous sommes en contact avec ceux qui travaillent minutieusement sur ce dossier. Nous demandons à la justice d’accélérer les enquêtes. Ceux qui sont impliqués dans cette affaire qu’on les interpelle pour qu’ils s’expliquent. C’est aussi simple que ça.
Il y a certains documents qui existent déjà notamment le Rapport 2014-2015 du Bureau du Vérificateur Général citant l’ancien Premier Ministre Soumeylou Boubèye Maïga dans l’affaire des équipements militaires faisant une irrégularité financière de plus de 28 milliards. Quel appel avez-vous à lancer à la justice malienne sur ce dossier qui semble en train de se refroidir dans les tiroirs ?
Nous demandons à la justice de rouvrir rapidement ce document accablant. Que tous ceux qui sont cités dans ce fameux Rapport du BVG soient interpellés et jugés conformément à la loi en victoire. Cela va dans l’intérêt même de Soumeylou Boubèye Maïga qui est un candidat potentiel pour les échéances prochaines.
Tout n’est pas au rose ici à Kati. Avez-vous établi un programme pour savoir quel est l’état de la transparence dans la gestion des affaires locales ?
Nous disposons déjà des documents bien ficelés qui accableraient certains élus locaux. À l’heure où je vous parle, une plainte serait déjà déposée par un élu communal contre la Mairie et le Conseil de Cercle de Kati. Les jours prochains seront déterminants pour ces pilleurs des ressources du Peuple.
Quelles sont les démarches en perspectives pour manifester votre soutien à la justice ?
Depuis que ce Collectif a vu le jour, Kati est en ébullition voire Bamako ; car, la cité intenable est devenue le baromètre du combat patriotique. Notre première sortie se fera par l’organisation d’un grand Meeting de sensibilisation patriotique.
Ce sera pour ce samedi 12 octobre 2019, ici à Kati Malibougou Kolombada. Nous invitons tous les Maliens qui aspirent aux changements de prendre part à ce meeting. Nous sommes convaincus que la justice est pour tout le monde, mais non contre tout le monde. Si cette généralisation et abstraction de la justice sont comprises par tout le monde, c’est tant mieux. Mais au cas contraire, nous nous manifesterons pour que justice fasse son devoir. Soutenir la vérité est la chose la plus banale ; car, elle est absolue.
Autre actualité du pays. Le dialogue national inclusif semble mal parti avec le retrait du Chef de file de l’opposition Soumaïla Cissé et ses Alliés, et aussi de la coordination des mouvements de l’Azawad. Quelle serait votre réaction?
Dans le cas actuel de notre pays, nous sommes condamnés à prendre part à cette initiative salutaire. Mais, force est d’admettre que si le dialogue n’est pas sincère, l’objectif recherché produira l’effet contraire. A peine l’ouverture des débats proprement dits, certains regroupements et acteurs politiques ont révélé leur nature en claquant la porte. Comme le dit l’adage: «Quand la guerre prend fin, l’Homme belliqueux s’en prend à lui-même ». L’histoire jugera alors tout le monde. Je pense que, dans cette situation, il serait loisible de repousser les dates du dialogue pour mieux prendre en compte les préoccupations des uns et des autres pour qu’on ait un dialogue franc et inclusif.
La cause principale du retrait du mouvement armé (la CMA) est l’annonce faite par le Président IBK sur une probable révision de «certaines dispositions» de l’Accord d’Alger. Qu’en dites-vous ?
Je remercie IBK pour cette annonce courageuse par rapport à la relecture de cet Accord piégé. L’autre partie doit savoir que certaines dispositions dudit Accord sont caduques. Alors pour l’instauration d’une paix durable au Mali, il doit faire l’objet d’une révision; car, beaucoup de choses se sont passées avant sa mise en œuvre. Il n’y a pas de paix sans concession. Qu’ils reviennent au dialogue pour qu’on puisse avancer.
Dans les Régions du Nord comme au Centre, l’insécurité persiste. Près d’une quarantaine de soldats ont été tués dans une attaque coordonnée qui a visé deux camps au Centre du pays. Que suggérez-vous au Gouvernement de Boubou Cissé ?
Tout d’abord, je présente mes condoléances aux familles des soldats morts pour le Mali, je souhaite également prompt rétablissement aux blessés. L’État doit s’assumer en déployant des forces de l’ordre dans ces zones devenues invivables. Il ne suffit pas d’effectuer des visites pour prétendre à un esprit d’accalmie. Que des enquêtes soient menées afin de situer la responsabilité des criminels et les mettre à la disposition de la justice.
Votre dernier mot
J’invite tous les Maliens à un changement de comportements. Un nouveau soleil s’est levé au Mali, il s’agit de la lutte contre la corruption. Soyons exemplaires à tous les niveaux; car, on dit qu’il n’y a jamais de corrompus sans corrupteurs. Que Dieu protège notre Maliba !
Propos recueillis par Seydou Konaté LE COMBAT