mardi 3 décembre 2024
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IBRAHIMA N’DIAYE, 2ème VICE-PRESIDENT DE L’URD SE CONFIE : « Puisque la peine de mort n’est pas abolie, à mon avis, nous devons simplement donner un signal fort en l’appliquant ».

Maintenir ou non la peine de mort ? Son opinion sur la proposition du Premier ministre Soumeylou Boubèye Maïga de réunir l’Adéma, l’URD, le RPM, l’ASMA-CFP et l’UDD au sein d’un vaste mouvement politique, son avis par rapport à un gouvernement d’union nationale ? Son avenir politique et ses rapports avec ses anciens camarades comme Alpha Oumar Konaré, Ibrahim Boubacar Keita, Soumeylou Boubèye Maïga, Aly Nouhoum Diallo et Bocary Tréta. Voici, entre autres, les questions auxquelles, le 2ème vice-président de l’URD, en la personne de M. Ibrahima N’Diaye apporte des réponses dans cette interview qu’il a bien voulu nous accorder. Lisez !

InfoSept : Bonjour, M. Ibrahima N’Diaye, vous n’êtes plus à présenter. Alors, actualité oblige, face à la recrudescence de l’insécurité, que pensez-vous du maintien ou non de la peine de mort ?
Ibrahima N’Diaye : Merci beaucoup. Vous me présentez un sujet extrêmement sensible et d’une actualité évidente. Au Mali, la question est aujourd’hui sur toutes les lèvres et dans tous les esprits. Il y a des gens pour et d’autres contre la peine de mort ; avec des arguments soutenus de part et d’autres ; je voudrais ramener la question sur le Mali et en fonction de l’actualité.
Au Mali, la peine de mort est dans la Constitution et elle n’a pas été abolie. Mais, depuis 1980, pratiquement, elle n’est pas appliquée. Cela révèle déjà un état d’esprit. Le débat qui est en cours est celui de savoir si oui ou non il faut l’appliquer ? Les opinions sont divergentes. Certains se réfèrent à l’évolution du monde qui va vers l’abolition se basant sur des études qui concluent sur l’inefficacité de la peine capitale.
Les autres aux préceptes religieux, idéologiques ou philosophiques différents sont pour son application.
Pour répondre à votre question, je milite en faveur de l’application de la loi. Ce n’est pas seulement pour des raisons de légalité, mais compte tenu des événements douloureux auxquels nous assistons ces derniers temps. Nous vivons des moments extrêmement difficiles où les crimes les plus odieux et les plus abominables se font au quotidien. Cela ne peut pas laisser l’opinion insensible. Des voix s’élèvent de plus en plus pour l’application de cette peine de mort. En tant que responsables politiques, nous ne pouvons pas être indifférents à cette réalité douloureuse. Nous ne pouvons pas ne pas tenir compte du sentiment d’insécurité qui se trouve aujourd’hui dans chaque foyer. Puisque la peine de mort n’est pas abolie, à mon avis, nous devons simplement donner un signal fort en l’appliquant. Cela en tenant compte de cet état d’esprit qui prévaut ; les principes et valeurs fondamentaux en lien avec la démocratie ne sont nullement affectés.
Souvenons- nous de ce que le Code de la famille a failli coûter au Mali.
Savoir écouter et respecter sa propre opinion nationale est une qualité universelle et signe de grande sagesse politique.

InfoSept : On se rappelle, votre intervention au dernier Congrès de l’ASMA-CFP a été plus qu’applaudie. Quelles étaient vos motivations quand vous demandiez une retrouvaille des partis issus de l’ADEMA autour de l’essentiel ?
Ibrahima N’Diaye : Je suis allé à ce Congrès uniquement pour répondre à une invitation. Je rappelle que nous avons fait notre Conférence nationale où nous avons invité tous les partis politiques de l’Opposition et de la Majorité. Mais, je n’ai pas vu un seul parti de la majorité. Quelques jours auparavant, l’UDD a tenu ses Assisses auxquelles l’URD a envoyé une délégation. Je pense que ce sont des raisons suffisantes pour ne pas aller mais nous avons fait le choix d’y être par courtoisie et aussi pour donner la preuve que nous savons aussi répondre lorsque les gens nous sollicitent. Ainsi, nous sommes allés au Congrès de l’ASMA-CFP. Ces propos dont vous parlez ne sont pas de moi. Ils sont du président de l’ASMA-CFP, Soumeylou Boubèye Maïga. En aucun moment, je n’ai parlé de cela et je ne suis pas allé avec de telles intentions.
A ce Congrès, nous avons seulement dit que nous avons des différences, des différends qui nous opposent, mais que nous avons le même pays en commun ; ce qui est une réalité évidente. Nous avons été ensemble à la faveur de la lutte pour la Démocratie. On ne peut pas effacer tous les combats que nous avons menés ensemble. Ils appartiennent à l’histoire. Et, je retiens que c’est pendant cette période qu’on a écrit les plus belles pages de l’histoire de la démocratie de ce pays. Je rappelle ainsi mes propos tenus lors du Congrès de l’ASMA-CFP.

InfoSept : Donc, que pensez-vous de cette proposition du Premier ministre Soumeylou Boubèye Maïga de réunir l’Adéma, l’URD, le RPM, l’ASMA-CFP et l’UDD au sein d’un vaste mouvement politique ?
Ibrahima N’Diaye : C’est une idée, un projet sur lequel nous n’avons pas eu à échanger. Il a le mérite d’avoir émis une idée, un projet ou une proposition. Si je dois faire un commentaire, je dirais que tous les anciens de l’Adéma originel, ont, à des moments, rêvé de la reconstruction de cette grande famille. Et, je vois que la proposition ne correspond pas à ce schéma. Il y a l’UDD, un parti que je respecte mais qui ne fait pas partie de l’Adéma originel. Donc, cela n’est pas conforme au sentiment que beaucoup d’anciens de l’Adéma ont eu. Donc sa proposition, à défaut d’être rejetée, est bien perfectible, car on constate dans le schéma que beaucoup de partis qui ont participé à la Révolution de Mars 1991 ne figurent pas. En dehors de l’URD, aucun autre parti de l’Opposition n’y figure. Ce sont des éléments qui ont retenu notre attention. Mais, je considère que si nous devons nous prononcer sur le sujet, nous avons un autre schéma qui va au-delà. Notre schéma va inclure beaucoup de partis démocratiques qui en 1991 faisaient partie du Mouvement démocratique et d’autres qui n’y étaient ou n’existaient pas.

InfoSept : Etes-vous favorables à un gouvernement d’union nationale ?
Ibrahima N’Diaye : Franchement, c’est une question qui est dans l’esprit de beaucoup de gens. Mais, je vais répondre simplement qu’il n’y a jamais été évoqué dans nos rencontres. Tout ce que l’URD et son président ont dit au cours des différentes réunions: c’est comment arriver à un dialogue qui va nous permettre de discuter de toutes les grandes questions. Quand on dit crise multidimensionnelle, il y a les aspects sécuritaires, institutionnels, électoraux, administratifs et surtout que seul un dialogue peut permettre à l’URD de mettre sur la table ses propositions. Notre combat est à ce niveau, celui de pouvoir déboucher sur un programme global, consensuel de sortie de crise. L’URD a élaboré ses propositions qui ont été mises à la disposition de tout le monde. Nous n’avons pas la prétention d’être complets dans ce document ou d’être pertinents sur toutes les questions. Avec l’instauration d’un dialogue inclusif, nous allons pouvoir nous entendre sur l’essentiel. Mais encore une fois, ce n’est une priorité d’être dans un Gouvernement d’union nationale. La question n’est pas d’actualité.

InfoSept : Le Front pour la Sauvegarde de la Démocratie (FSD) vit-il toujours ?
Ibrahima N’Diaye : Vous me demandez si le FSD vit ? A mon avis, oui et ceux qui pensent qu’il est mort se trompe et cela ne correspond pas à la réalité.
Voilà un regroupement qui est né après le second tour pour défendre les idéaux de la démocratie. Il est la suite de la coalition qui soutenu Soumaila Cissé aux présidentielles de 2018. De sa création à nos jours, je ne pense pas qu’il ait un regroupement, du côté de la majorité comme de l’opposition, qui ait eu autant d’activités. Le FSD est certainement, l’entité politique qui a mené le maximum d’activités et de mobilisations. Et, cela de façon multiforme avec les manifestations de rue, les meetings et les activités de communication, de sensibilisation et de suivi. Aussi, au niveau du Parlement, nos députés ne sont pas restés les bras croisés. Le FSD est l’entité politique qui est la plus visible et qui a mené toutes ses activités sans aucun dommage. Cela, de la part d’un regroupement des partis de l’opposition, mérite d’être souligné et salué.

InfoSept : Politiquement, peut-on dire qu’Iba N’Diaye est un homme fini ou vous pensez revenir en force encore sur la scène politique ?
Ibrahima N’Diaye : Rires. Le mot «fini» n’est quand même pas gentil. Je vis, je respire et je suis là. Vous parlez de revenir comme si j’étais parti. Je suis resté présent sur la scène politique. J’y suis, hier comme aujourd’hui. Et je souhaite si ma santé me le permet d’être toujours là. Peut-être, je suis moins visible. Je suis 2ième vice-président de l’URD et j’avoue que je ne chôme pas. Il est important que je le dise ; je me sens plus à l’aise que lorsque j’étais dans tous ces privilèges : Gouvernement, Mairie du District et Direction. Honnêtement, ici vous avez de l’écoute, le respect qu’il faut. A mon avis, c’est un cadre approprié et je suis très attaché à cela ; c’est-à-dire, lorsqu’on comprend que vous ayez une marge d’autonomie dans tout ce vous faites. Ce respect profond à mon endroit, je le dois à tous les cadres et militants de l’URD, en premier lieu au président Soumaila Cissé. Dans un tel attelage, ce sont les cadres et les militants qui peuvent dire si je suis un homme fini ou pas ou si je sers encore à quelque chose. Très honnêtement, je vous assure que nous sommes en train de travailler pour la jeunesse qui a encore besoin de nos services. Et, c’est eux que je vois en toute circonstance pour que le pays connaisse le changement nécessaire.
Pour cette jeunesse, nous avons un devoir d’éducation, d’accompagnement et de soutien. Bref, tous ceux qui me suivent de près savent ce que je fais même si ce n’est pas au grand jour.

InfoSept : Pour terminer, aujourd’hui, quels sont vos rapports avec vos anciens camarades politiques comme Alpha Oumar Konaré, Ibrahim Boubacar Keita, Soumeylou Boubèye Maïga, Aly Nouhoum Diallo et Bocary Tréta ?
Ibrahima N’Diaye : Pour tous ceux-ci que vous avez cité, je retiens cette période où nous avons écrit les plus belles pages de l’histoire de la démocratie au Mali. Ce sont des moments inoubliables pour moi et c’est une période extrêmement importante dans ma vie politique. Que nous soyons des adversaires aujourd’hui, ne doit pas m’amener à avoir de la haine et un esprit de vengeance. Nous sommes aujourd’hui à un tournant dans l’histoire politique du Mali et je pense que nous avons la possibilité de surmonter certaines divergences et contradictions. Cela, parce que simplement, notre pays est en situation de péril. Nous l’aimons tous mais pour autant, tout le monde n’est pas arrivé à se hisser au-dessus de certaines considérations. Que cela soit de près ou de loin, je voudrais témoigner de ma reconnaissance à tous ceux-ci. Ma conviction profonde et le sens du combat que nous donnons à nos activités est qu’il faudrait que ce qui nous a réuni hier prenne le pas sur toutes les autres considérations. Cela pourvu que nous changions nos comportements, que nous ayons un autre regard sur nous-même et sur les autres. Je suis peut-être un rêveur mais j’inscris ma vision, celle de l’URD et de toute l’opposition dans cette direction. Je sais que cela est aussi le souci partagé que j’ai noté à travers des rencontres avec beaucoup d’autres partis politiques de l’Opposition comme de la Majorité.

InfoSept : Votre mot de la fin ?
Ibrahima N’Diaye : C’est d’abord vous remercier et dire ensuite que la crise actuelle mérite que nous puissions nous retrouver et que chacun fasse l’effort nécessaire sans préjudice pour nos convictions profondes. Il y a des sacrifices et des concessions que nous faisons aujourd’hui qui ne seraient pas acceptables en d’autres temps. C’est la raison pour laquelle le Chef de file de l’Opposition n’arrête pas de réclamer ce dialogue qui ne doit pas être pour le spectacle et pour l’image mais pour le changement en profondeur que nous souhaitons.
Propos recueillis
Par Dieudonné Tembely INFO SEPT

Djibril Coulibaly

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