vendredi 22 novembre 2024
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Dépôts de transit de Médina-Coura et de Lafiabougou : Les évacuations arrêtées depuis des mois, les déchets refont surface …

Monts Kilimandjaro. C’est cette appellation qui prend corps avec l’état actuel de la hauteur des accumulations des tonnes de déchets de ces deux dépôts de transit  de Médina-Coura (Commune II) et de Lafiabougou (Commune IV) du District de Bamako. À notre arrivée sur lesdits sites, vendredi 1ermars dernier, rien ne semblait bouger. À quelques périmètres, on aperçoit ces tonnes d’ordures, de déchets solides ou liquides animés par des mouches et moustiques, débordant les murs pour se diriger vers les rues avoisinantes. Et pire : les murs de celui de Médina-Coura sont, si l’on n’y prend pas garde, en phase de céder sous le poids des déchets.

Une pelle-marais de la société Ozone-Mali, en panne depuis plusieurs semaines bloquée  vers le Sud, des charrettes remplies de déchets se déchargeaient en un temps, les abords pris d’assaut par des emballages d’ordures qui se débordent lentement mais surement vers les rues, l’intérieur des fosses  invisibles par les sachets et autres objets. Bref, tout prouvait, dès notre arrivée, que le dépôt de Transit de Médina-Coura ne reçoit plus la visite des bennes et autres véhicules pour l’évacuation de ces tonnes de déchets en provenance des 13 quartiers de la Commune II du District de Bamako. Une raison qui, l’on se rappelle bien, avait, en un temps, engendré la fermeture des classes du  groupe scolaire Mamadou B. Diarra. Le scénario se répètera-t-il ? L’hypothèse n’est pas à écarter pour le Directeur du Second Cycle C de ladite école, Kader Traoré. «C’est par ce que nous suivons la grève de la synergie que ç’a pris ce temps. Nous avons convenu de déposer un préavis de grève dès ce mercredi 6 mars pour alerter les autorités. Et si, toutefois, celles-là ne réagissent pas, nous allons en arrêt de travail. Nous ne pouvons pas étudier dans cette situation», nous a confié le Directeur d’école, Kader Traoré. En plus de ses méfaits sur cet établissement scolaire, ce dépôt constitue, au plan économique, un véritable défi   pour les artisans et autres débrouillards installés dans les parages.  Adama Doumbia, Gérant de lavage, entouré par ses mains d‘œuvres, nous témoigne : «Cela fait pratiquement deux mois que les travaux d’évacuation de ces déchets sont arrêtés. Le débordement de ces ordures nous a causé beaucoup de tort que ce soit au plan économique que sanitaire. Les clients ne viennent plus à cause des odeurs nauséabondes des ordures. On vient au travail c’est pour ne pas rester à la maison sinon les clients se font très rares. Ça nous ramène aussi des maladies. Je viens de me rétablir ça ne vaut même pas un mois. Quand j’ai été au CSRF, on m’a dit que je souffre du palu et de la typhoïde. Pendant l’hivernage on ne peut même accéder à cette partie. Vous voyez, les fosses sont toutes remplies. Et les ordures débordent les murs. Pour le moment, aucune autorité n’est venue voir l’état des choses. Nous appelons les autorités à trouver une solution durable à ce problème sinon ça ne va pas vraiment ».

À une centaine de mètres, vers l’Ouest, les familles autour de ce transit inhalent les odeurs puantes et les fumées âcres de la putréfaction et des incendies ponctuels qui grèvent les déchets. L’air est presque irrespirable. «Nous souffrons ici nuit et jour. Les mouches, les moustiques et autres insectes qui s’ajoutent à l’odeur funeste de ces ordures. En résumé, nous vivons avec les maladies ici. J’appelle les autorités à s’investir pour une solution durable à ce problème », a expliqué une autre Habitante du Secteur.

Dépôt de transit de Lafiabougou, un autre infernal pour les riverains 

Faut-il, derechef, rappeler à l’intention de nos autorités compétentes qu’une Population en bonne santé est le gage du progrès d’un pays ? En tout cas, la question mérite d’être posée et reposée encore; et surtout quand on voit cette accumulation des emballages, des papiers de tous genres, des légumes et des fruits pourris, des boîtes de conserve, des bouteilles vides, des déchets plastiques, à l’image d’une montagne faisant barrage aux usagers de la route passant par le grand  cimetière très fréquenté de Lafiabougou, de la Zone ACI2000 et de Djicoroni-Para, en Commune IV du District de Bamako. Y a-t-il lieu d’indexer l’entreprise Ozone-Mali pour son incapacité à relever le défi ou la Mairie du District avec le Budget de 4 à 5 milliards de francs CFA annuellement voté ?

Assis, sous un hangar, visage mi- couvert par un couvre-nez, non loin du cimetière, à droite de la montagne autrement appelée le «Kilimandjaro», le blocage serait, aux dires d’Adama Diakité, au niveau de l’absence ou le nombre insuffisant de dépôt final. Toute chose qui relève de la mission des plus hautes autorités du pays. «Moi, je suis là pour empêcher les dépôts anarchiques. Nous nous faisons notre mieux ; mais, le fond du problème est dû à l’insuffisance des dépôts. La cour que vous voyez (nous dit-il en pointant son indexe vers une clôture juste à l’Est de la montagne) devait être construite pour recevoir les ordures. Mais depuis plusieurs mois, les travaux sont arrêtés pour faute d’argent », a-t-il révélé.

Si celui-là souligne l’insuffisance d’ouvrages d’assainissement dont des espaces pour le dépôt final, le vieux Moussa Kéïta, Promoteur d’un atelier de menuiserie situé à l’Est dudit  dépôt, est de tout autre avis. Pour lui, l’adage qui stipule que « Le déchet c’est de l’or » semble l’une des raisons de la démotivation des autorités à procéder à  l’évacuation de ces déchets au grand dam des riverains. «C’est la mauvaise foi de la Mairie qui fait que ces déchets ne sont pas évacués régulièrement. Chaque charretier qui vient déverser ici fait, chaque jour, le compte-rendu à la Mairie. Ils paient chaque jour quelque chose .Ce que nous vivons ici est plus que déplorable. Moi, je viens de faire une opération à plus d’un million de nos francs. J’ai fait toute ma vie sans tomber malade de la sorte, mais depuis que j’ai déménagé ici ; je suis tombé malade et ai subi une opération à cause des déchets. La Mairie n’a pas assumé ses responsabilités sinon nous ne serions pas dans cet état. Les travaux de cette cour qui devrait recevoir les ordures ont arrêté depuis le mois de janvier pour manque d’argent. On nous avait dit que l’évacuation se ferait tous les trois jours. Ça fait six mois que ces déchets sont là. Il n’y a eu aucune évacuation. Je suis parti faire mon opération en trois mois et ça fait en plus trois mois que je suis revenu à l’atelier ; ça reste le même», a-t-il témoigné avant d’y ajouter que la situation devient intenable pendant l’hivernage. L’eau y stagne et les déchets puent et polluent l’atmosphère.

Dans de nombreux pays africains comme le nôtre, le double secteur Hygiène Assainissement est confronté à trois difficultés majeures : insuffisance d’intérêts et de mobilisation politique, insuffisance de cohérence et d’efficacité institutionnelle et insuffisance de financements publics. Pourtant, la protection de l’environnement, notamment l’assainissement reste et doit figurer sur la liste des démarches prioritaires de l’État. Ce, à travers des révisions qui permettront de faire des déchets un atout pour le progrès social par l’extraction de la masse des déchets de toutes sortes, d’objets réutilisables ou commercialisables et leur transformation en vue d’autres utilités. Ainsi ,au lieu d’être , un véritable goulot d’étranglement en raison des dangers et risques qu’ils peuvent engendrer (sources de bactéries, odeur nauséabonde, foyers d’incendie…), les déchets peuvent plutôt être un facteur  pourvoyeur d’emploi et une source de revenus pour de nombreuses familles.

Ce reportage a été réalisé dans le cadre du plan d’action pour l’assainissement  par RJEPA en partenariat avec WATER-AID

Seydou Konaté : LE COMBAT

Rédaction

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