Pour un billet d’avion non remboursé, les Aiglonnes, en partance pour la phase finale de la Can féminine, vont enregistrer une défection de rang. La conscience morale du ministre des Sports est interpellée.
Alima Niakaté ! Ce nom ne vous dit peut-être pas grand-chose, mais tous les sportifs qui ont suivi les deux matches amicaux entre les Aiglonnes et les Lionnes indomptables(0-1, 0 -0) du Cameroun à Bamako ce mois-ci peuvent témoigner du talent de cette jeune joueuse sociétaire du Paris Saint-Germain (France).
Et bien les férus de ballon rond risquent de ne plus revoir sa frêle silhouette arpenter les couloirs de l’équipe nationale féminine. Ils ne pourront que regretter son toucher de ballon satiné, ses dribbles chaloupés et sa vista largement au-dessus de la moyenne.
Et pour cause. La famille d’Alima Niakaté vient d’être victime d’une méprise, voire d’une arnaque au département des Sports, avec le ministre Housseyni Amion Guindo en tête, de concert avec la Fédération malienne de football (Fémafoot).
De quoi s’agit-il au juste ? Informée de l’existence d’une joueuse exceptionnelle d’origine malienne dans les rangs du Paris Saint-Germain, prête à défendre les couleurs nationales, la Commission football féminin de la Fémafoot saute sur l’aubaine et entre en contact avec sa famille à Bamako. Et comme Alima Niakaté est installée à Paris, on prend attache avec son beau-père (celui-ci a épousé en secondes noces sa mère elle-même vivant en France).
Sportif, le beau-père de la joueuse établit très rapidement le contact. Mais, au moment crucial (l’achat de billets), la Fémafoot tempère quelque peu son enthousiasme. Cependant, pour ne pas décevoir la joueuse, qui pouvait du reste faire l’objet de quolibets de ses coéquipières en cas d’échec du voyage et de la première convocation en EN, son beau-père casse sa tirelire pour acheter deux billets d’avion Paris-Bamako-Paris pour Alima et sa mère pour moins d’un million de F CFA avec la promesse de se faire rembourser par la Fédération malienne de football ou le département des Sports.
La joueuse débarque à Bamako. Elle confirme tout le bien qu’on dit d’elle. Le public du stade Mamadou Konaté est émerveillé par sa prestation.
Le lendemain du match, le ministre des Sports, contacté, promet de payer illico le billet d’avion avant de se rétracter quand bien même il a, selon des indiscrétions, en sa possession un montant d’environ 16 millions de F CFA pour gérer les urgences chez les Aiglonnes.
Même plumage, même ramage
Selon nos sources, Housseyni Amion Guindo a deux fers dans le feu dans cette affaire. Devant les parents de la joueuse, il se fait doux comme un agneau promettant de s’exécuter. Mais une fois que ceux-ci tournent le dos, il blâme, en compagnie du président de la Fémafoot, la Commission du football féminin.
Entre-temps, convaincue de la mauvaise foi du département, la famille de la joueuse opte pour le refus de la laisser jouer le second match. Et c’est là qu’est intervenu un certain Maguèye B. Sow, consultant au ministre des Sports.
Devant le refus obstiné du beau-père de la joueuse, il s’engage en ces termes : « Je soussigné, Maguèye B. Sow, consultant au ministère des Sports du Mali, s’engage à rembourser les frais de transport de la joueuse Alima Niakaté dans le cadre des préparatifs de l’équipe nationale du Mali, le lundi 17 octobre 2016. En foi de quoi, je lui délivre ce présent engagement pour servir et valoir ce que de droit » (voir fac-similé).
Il convient tout de suite de préciser que M. Sow est un cadre de la Codem, parti créé et présidé par le ministre des Sports, Housseyni Amion Guindo. Qui plus est, il revenait d’une mission politique à l’intérieur.
En tout cas, plus de dix jours après, rien à l’horizon. Le beau-père d’Alima Niakaté ne voit toujours pas la couleur du moindre remboursement. Au-delà de cette arnaque, il y a lieu de déplorer « le flou et l’informel » dans la gestion du sport malien. Derrière les cérémonies protocolaires de remise de primes, évolue en effet un monde interlope, adepte des crocs-en-jambe et qui pratique par-dessus tout le hors-jeu et le manque de fair-play.
Les mauvais résultats à cause des coups bas entre le ministère des Sports et la Fédération malienne de football doivent être la règle, les succès n’étant que les fruits d’un pur hasard, donc exceptionnels.
Dougoufana Kéita