Suite à la résiliation avec la société Transrail-SA de la convention de concession du chemin de fer Dakar-Bamako, les Gouvernements du Mali et du Sénégal ont fourni des efforts pour maintenir l’activité ferroviaire sur la ligne Dakar-Bamako. À cet égard, un premier programme d’urgence de six mois avait été financé et mis à la disposition de Dakar-Bamako Ferroviaire (DBF). Mais, jusque-là, le décaissement de cette colossale somme de 7,5 milliards de francs CFA se fait attendre.
Hier, jeudi 7 mars, le Gouvernement malien a rendu public un communiqué signé par l’actuel Ministre des Transports, Soumana Mory Coulibaly, à l’intention de l’opinion nationale et internationale en général et les cheminots grévistes en particulier.
En effet, il s’agit d’une déclaration révélant une scandaleuse affaire d’un montant de 7,5 milliards de FCFA inscrit dans le premier programmed’urgence de six mois mis à la disposition de la société Dakar-Bamako Ferroviaire (DBF).
Financé par les deux pays, le Mali et le Sénégal, ce fonds avait pour but de conforter l’outil de production pour 4,5 milliards de FCFA et assurer la prise en charge des salaires des travailleurs pour 3 milliards de francs CFA afin d’aboutir à une relance durable qui devrait permettre à la société Dakar-Bamako Ferroviaire d’être autonome sur le plan de fonctionnement durant toute la phase transitoire. Mais hélas !
Selon le communiqué (dont LE COMBAT dispose d’une copie), suite à une gestion peu orthodoxe, ces ressources mises à la disposition du DBF n’ont pu permettre ni de réhabiliter les points critiques de la voie ni de viabiliser les matériels roulants. «Cette situation a conduit à l’arrêt des circulations ferroviaires depuis plusieurs mois, et obligeant ainsi, les États dans le cadre de la solidarité sociale, à continuer de payer les salaires des Agents sans activités», affirme le Ministre malien des Transports, Soumana Mory Coulibaly, avant de rajouter que les efforts en allocutions budgétaires, de 2016 à 2018, sont de l’ordre de 6.294.579.251 FCFA dont 3.433.645.149 FCFA payés en salaires en faveur du DBF, à travers le Ministère de l’Économie et des Finances. Puis, il appelle les 496 cheminots en grève de la faim depuis plus de 70 jours en réclamation de 9 mois d’arriérés de salaire de l’année 2018 à rompre avec la politique de la victimisation. Le ministre Soumana Mory Coulibaly a également souligné que l’État a déjà soldé cinq (5) mois. «Une véritable réforme du sous-secteur est en cours pour l’opérationnalisation de la Société de Patrimoine ferroviaire du Mali et la réalisation d’études et d’audits des chemins de fer afin de rompre définitivement avec les mauvaises pratiques qui ont amené cette industrie à la cessation d’activité et engendré des dettes incommensurables pour les États du Mali et du Sénégal», enfonça-t-il le clou avant de conclure que cela se passera par la réaffectation des Agents nécessaires aux activités ferroviaires, la réhabilitation des voies, l’acquisition et la réparation de l’outil de travail. «Les échanges sont en cours avec la Banque Mondiale et d’autres partenaires techniques et financiers afin de parvenir à une relance complète des activités ferroviaires», rassura-t-il.
En revanche, au moment où nous mettions cette information sous presse, le Secrétaire Général du SYLTRAIL, Mahamane Thiènta, joint par téléphone nous a signalé que ces propos du Ministre les accusant « d’instrumentalisation des drames familiaux pour arracher la compassion des Maliens et servir des ambitions autres que la satisfaction des intérêts du secteur» sont irrationnels, infondés, voire irresponsables. «Si le Département reconnait qu’il y a des drames dans la famille des cheminots et qu’on est en train de les instrumentaliser, que les Maliens, eux-mêmes, jugent ces propos. Ce que nous avions dit : ce sont des morts ou pas? Ceux qui sont malades et qui n’arrivent pas à se soigner ; ce sont des malades ou ce ne sont pas des malades ? Ce que nous réclamons, ce ne sont pas nos salaires ? Qu’est ce qu’on dramatise ici ? Ce que je vais vous dire c’est que nous les cheminots maliens, nous n’avons jamais été nommés par le Ministre pour occuper le portefeuille de la Direction Générale du DBF. Nous ne sommes pas de la Direction Générale. Quand il dit qu’ils ont donné sept (7) milliards, ils ont donné ça à qui ? Ils ont donné à ceux qu’ils font confiance. Et si ça n’a pas marché, c’est la faute à qui ? Ce n’est pas la faute aux cheminots », s’est- insurgé avant de préciser que les cheminots sont loin d’une logique d’instrumentalisation. «Nous n’attirons pas la compassion des Maliens. La compassion des Maliens c’est contre l’injustice qui est là. On a eu tellement de morts pendant les 30 ans de notre carrière. On n’a pas exposé ça. Si l’État nous payait régulièrement, allons-nous faire ça ? Les engagements ont été pris par le Mali et le Sénégal. Mais, le Sénégal est en train de payer les Sénégalais. Est-ce qu’on entend l’exposition des morts là-bas ? Le Sénégal respecte ses engagements. Que le Mali aussi respecte les siens. Depuis le début de la grève, il y a quatre (4) cheminots, deux enfants et deux épouses de cheminots qui sont décédés dans les circonstances déplorables par manque de soins», déplora-t-il avant de rajouter que l’âme appartient à Dieu ; mais que la circonstance de la mort peut atténuer le fait.
Faut-il rappeler que les communicants de ce même Ministre avaient, en un temps donné, précisément le 17 février dernier, à travers un autre communiqué, annoncé la fin de la grève des cheminots, avant d’être démentis, à la minute par les syndicats des grévistes ?
De grâce, qu’on soit un peu Responsable !
Seydou Konaté : LE COMBAT