L’élection a pu se tenir, hier, dimanche 20 courant, malgré toutes les difficultés et le déficit de conditions de transparence requises. Au centre de Boulkassoumbougou, Commune I du District de Bamako, par exemple, nous avons approché Mamadou Kanté, Agent technique au PMU-Mali, qui nous livre ici ses impressions sur les imperfections de notre processus de démocratisation en cours depuis mars 1991.
LE COMBAT : Mamadou Kanté est ce que vous êtes venu voter ?
Mamadou Kanté : Oui !
Monsieur Kanté, vous avez voté pour quel candidat ?
Je n’ai voté pour personne, j’ai juste rempli mon devoir de citoyen.
Pourquoi vous n’avez pas voté pour aucun des candidats ?
Tout simplement, par ce que je n’ai pas de candidat à qui je fais confiance. Donc, comme c’est un droit civique, je suis venu voter ; mais j’ai voté blanc.
Mais Mr Kanté pourquoi avoir voté blanc ?
Parce que nous sommes en démocratie depuis ¼ de siècle et toujours les mêmes gens dans la même corruption. Je trouve que ce n’est pas normal. Il est temps que les gens prennent conscience de leurs actes et qu’on cherche à regarder dans le rétroviseur pour savoir dans quelle direction on doit prendre cela. Ce qui explique qu’on doit réfléchir toujours avant de choisir. Et, moi, j’ai constaté que, depuis l’arrivée de la démocratie, quand vous vous rendez dans les communes ou les mairies tu trouveras que ses les mêmes anciennes têtes qui s’occupent et qui gouvernent les mairies depuis plus de 25 ans. A lorsque toute les mairies sont subventionnées par l’Etat, on leur donne de l’argent chaque année en dehors de cela tous les jours l’argent rentre au niveau des mairies.
Cependant, même si tu as besoin d’une légalisation d’un petit document, tu es contraint de payer 200 francs CFA. Donc, malgré ces sommes colossales, nos mairies ne sont même pas capables de ramasser les ordures et les populations sont toujours en conflit avec les GIE qui ramassent les ordures de ménages dans les quartiers. En un mot, les gens ne veulent pas voir la réalité de ce pays.
Monsieur Kanté, pourquoi les autres ne puissent pas voir la réalité comme vous ?
C’est un problème de vision parce quand on pense quand on gagne, après avoir payé quelqu’un, on n’est pas obligé de le suivre. Or, Dieu nous a donné l’intelligence pour réfléchir. Pourquoi nous ne pouvons pas exercer cette intelligence pour bien choisir un (ou une) candidat (e) à la place qu’il faut.
Mamadou Kanté, selon vous, qu’es qu’il faut pour un changement dans ce pays ?
Pour apporter de changement dans ce pays, il faut que les gens changent d’abord de comportement. Et ce qui concerne le changement de comportements, il nous faut revenir à la base ; c’est-à-dire, avoir une bonne éducation, puisque c’est un problème d’éducation depuis dans nos familles, ensuite à l’école dans tous ses cycles.
Lorsque les femmes et les enfants sont libres de faire comme bon leur semble, là ils n’ont aucune éducation de leurs parents, ou de leur école. Donc, c’est encore plus grave. Car, il ne suffit pas d’avoir des diplômes, mais il avoir d’expériences aussi pour ne pas finir banalement ….
Par exemple, ils sortent de la maison pour dire qu’ils vont à l’école alors que c’est pour aller faire de banditisme. Et hélas ! C’est ce qui est à la source de nos problèmes dans la société.
Monsieur Kanté, après avoir voté qu’est ce que vous avez remarqué à travers l’organisation de ces élections et les mouvements sur le terrain ?
D’abord, pendant plus d’une semaine, nous avons entendu à la télé que, pour connaitre son Bureau de vote, il faut passer par des messages d’Orange-Mali ou de Malitel. Mais, aujourd’hui, aucun de ces réseaux ne passe D’où les gens ne sont pas identifiés ou ne savent pas où se retrouver leurs cartes. Le plus souvent, il n’y a que 40 ou 50 personnes sur des milliers qui ont leurs cartes. Cela signifie qu’il y a une mauvaise organisation…
Quel est votre message à l’Etat malien?
Mon message, c’est d’abord que les uns et les autres sachent que l’Etat c’est nous-mêmes les citoyens, les fils et filles de ce pays ; car, l’Etat est à l’image de la population en sachant que si la population ne sait pas quoi faire l’Etat commettra toujours de désordres. Notre principale arme pour sanctionner un Homme politique devait être le bulletin de vote ; mais, en Afrique vote sanction n’existe pas ; puisque les Hommes au pouvoir savent toujours comment truquer des élections. Autrement, Cheick Modibo Diarra a dit, en Afrique du Sud, que les gens font plus 100 km à pieds pour aller s’exprimer.
Propos recueillis par Zénébou Maïga