En plus d’être remplie majoritairement par des personnes présumées innocentes du fait que leur culpabilité n’a pas encore été établie par un jugement, la Maison Centrale d’Arrêt de Bamako a aussi désormais la mauvaise réputation d’être un lieu tout simplement déshumanisant, tant les conditions de détention de ses quelque 3000 pensionnaires restent à désirer.
Construite pour 400 personnes, la MCA héberge à ce jour près de 3.000 prisonniers dont 500 seulement sont condamnés. Le reste, 2.500 pensionnaires sont de présumés innocents qui sont en attente d’un jugement.
Selon le journaliste, Seydou Oumar Traoré, ils sont aussi nombreux parmi ceux qui n’ont jamais visité un juge et cela, malgré la durée de leur détention qui remonte pour certains à plusieurs années. Le visiteur de la Maison Centrale d’Arrêt de Bamako décrit une situation dramatique dans ce lieu, qui a pour vocation certes, punir, corriger et détruire. « Des détenus provisoires dans le couloir de la mort ! La situation que vivent actuellement les détenus de la Maison Centrale d’Arrêt de Bamako dépasse les limites du tolérable humain. Des prisonniers non encore jugés (donc présumés innocents) sont entassés dans des cellules et dans les conditions de détention où on n’aurait même pas osé garder des animaux. Ils sont pour la plupart en attente de jugement. La prison centrale de Bamako, au lieu de devenir un centre de redressement social et de rééducation, est devenue un couloir de la mort par son effectif sans cesse croissant. Et cela n’indigne personne, ni les autorités judiciaires, ni les politiques, ni les défenseurs des droits de l’homme ! », dénonce notre confrère.
Aucune condition humaine n’y est respectée à cause du surnombre dans les cellules.
Dans sa description de ce qu’il a lui-même constaté de visu, Seydou Oumar Traoré regrette que la cellule la plus enviée de la MCA, le 1erCabinet, initialement conçu pour 20 détenus, reçoive, actuellement 99.
Sommeil par rotation ?
À en croire toujours Seydou Oumar Traoré, certains pensionnaires dorment debout et sont exposés à la pluie. Pire, raconte le journaliste, le grand hangar, conçu pour que les détenus puissent respirer, est devenu un lieu de dortoir pour le surplus des détenus abandonné aux intempéries : la pluie, la chaleur et le froid. Mais, bizarrement et malheureusement, ce hangar est aussi un paradis, comparé aux cellules, regrette notre confrère. « Dans les cellules du 7/8 ou 9/10 ou au 2e, 3e, 4e ou 5e cabinet, c’est trop lamentable. Si vous y passer quelques heures, vous n’allez plus avoir envie de manger toute la journée par remords, tellement les gens sont superposés à même le sol. Tout le monde est torse nu. La chaleur humaine est suffocante, l’hygiène est un rêve et le sommeil se fait par rotation par les prisonniers », dénonce le visiteur.
C’est dire que l’État doit agir, et vite, pour mettre un terme à cette triste réalité.
Zeïd KEÏTA LE COMBAT