«Durant tout le trajet, j’avais peur de me faire rattraper par mes assaillants… J’ai passé la nuit dans le bus sans descendre ; je me forçais à fermer les yeux ; mais, le cauchemar de la scène me réveillait », raconte F, une victime qui a échappé à une tentative de meurtre pour avoir violé l’interdiction de célébrer le mariage dans le village. Traumatisée, c’est après 5 mois de silence et de douleurs, qu’elle s’est rendue à l’Hôpital de Douentza pour bénéficier d’un accompagnement psychologique des MSF.
Dans notre pays, comme partout en Afrique, la gravité des troubles liés à la santé mentale reste fortement sous-estimée. Les conflits et les violences qui affectent le centre et le nord du pays, ont un effet néfaste sur la santé mentale des populations. L’organisation Médecins sans Frontières répond aux besoins des personnes atteintes des déséquilibres mentaux dans ses projets. À travers les zones d’Ansongo, Douentza et Kidal, les équipes MSF font des consultations gratuites et apportent de soutien psychologique et des thérapies aux personnes atteintes. En avril dernier, à Gao, ces équipes ont apporté des soins psychologiques de première urgence à de nombreux migrants expulsés d’Algérie.
En août dernier, dans le Cercle d’Ansongo, les personnes qui ont fui une attaque des Groupes armés dans le village de Tindinbawen ont bénéficié d’un soutien psychologique de première urgence de la part des MSF. La plupart de ces patients vivent avec les séquelles des situations vécues. À Kidal, l´équipe MSF a suivi T, victime d’une attaque armée dans sa maison. « J’ai eu peur. J’ai vu mon enfant courir pour se cacher loin des tirs des balles réelles», s’est-elle exprimé. À ses dires, elle s’est enfuie dans la nature où elle a passé deux jours sans manger, immobile à cause d’un handicap. Depuis ces événements, T. qui est installée sous une tente à Kidal, et a du mal à s’endormir, a perdu l’appétit et a une tendance à l’isolement et des pleurs fréquents. T. bénéficie d’une prise en charge psychothérapeutique régulière des MSF l’ayant permis d’atténuer ses symptômes.
Le conflit sévissant dans le Nord et le Centre du pays provoque une souffrance invisible chez beaucoup de femmes, enfants et hommes vivant dans les zones affectées par les violences.
En conséquence, un besoin accru en soins de santé mentale et support psychologique se manifeste au sein de ces communautés. L’affaiblissement du système de santé dans les zones affectées par la crise, depuis 2012, a laissé un grand vide dans la prise en charge des personnes ayant besoin de soutien psychologique.
Dans nos sociétés, les personnes victimes des troubles mentaux restent stigmatisées. Dans les centres de santé, les soins psychiatriques sont encore souvent négligés. «L’absence de systèmes de prise en charge médicale et psychologique spécialisée, doublée du poids social de la thématique, contribue à isoler davantage les victimes»,explique Insaf Charaf, Psychologue à Kidal. Insaf fait partie de l’équipe de santé mentale des MSF, composée de deux psychologues et 4 agents de santé mentale communautaires.
L’organisation Médecins Sans Frontières est une association humanitaire médicale internationale qui apporte son secours aux populations locales en situation difficile en toute neutralité, impartialité et indépendance. Depuis plus de 20 ans, MSF fournit des soins psychiatriques et psychologiques. L’organisation dispose actuellement de programmes de santé mentale dans 41 pays à travers les cinq continents.
De janvier à septembre 2018,
9394 patients reçus dans nos séances de psychoéducation. Il s’agit d’une intervention didactique et psychothérapeutique systématique qui vise à informer les patients et leurs proches sur les troubles psychologiques et à promouvoir les capacités pour y faire face.
932 Personnes ont assisté aux groupes de parole (thérapie de groupe qui réunit les personnes concernées par les mêmes difficultés) ; 948 premières consultations et 1284 consultations de suivi réalisées pour soutien psychologique.
Source : MSF
Mahamadou YATTARA