Inimaginable, mais réel. Il fait plus de 70 jours depuis que les Magistrats au Mali sont en grève, un droit inaliénable des droits de travailleurs inscrits dans notre Constitution en vigueur. Toutefois, ce bras de fer entre Gouvernement et Syndicats des Magistrats a un impact négatif très grave non seulement sur le droit des Maliens, mais aussi, sur l’économie nationale. Le premier, ne voulant pas céder, cherche par tous les moyens possibles, de mettre sous pression ces Hommes de la justice qui, eux aussi très déterminés, ne voulant non plus abdiquer, restent camper sur leur position. Un conflit qui aura des effets désastreux sur les affaires courantes des innocents et honnêtes citoyens.
Les Magistrats ne sont pas des fonctionnaires comme les autres et la justice est un pouvoir à part comme le consacre la Constitution du 25 février 1992. Aussi, ils sont nommés par un Décret présidentiel autant que les Ministres. Néanmoins, avec leur Statut particulier, ils ont le droit de déclencher une grève.
Sans priver certaines personnes d’un cheval de bataille pro-IBK, les attaques redondantes et rébarbatives de ces derniers jours contre nos juges deviennent de plus en plus excessives, vu le manque des moyens humains et financiers dont ils font face, en plus du phénomène d’insécurité.
Encore faut-il continuer à être manipulé par des manœuvres d’un régime qui tendent toujours à dresser une partie des Maliens contre un secteur, une profession ou une autre bonne partie des Maliens.
Après la grève inédite des Médecins, celle des Enseignants, nous voilà plongés dans une autre sphère, la grève des Magistrats. Pourtant, la Santé, l’Éducation, la Sécurité des personnes et des biens et la Justice sont les piliers d’une Nation saine. Or, aujourd’hui, ce sont ces secteurs qui sont en mal et en quête d’équilibre.
À tort ou à raison, tous ces grévistes, qu’ils soient de la Santé, de l’Education ou de la Justice, veulent la même chose : être dans des conditions décentes et avoir les moyens financiers et humains pour exercer leurs missions !
Par ailleurs, c’est de bonne guerre quand on sait que les seuls endroits où l’on vit bien et avec des moyens, c’est dans le palais de la République du Roi IBK et la famille d’abord, depuis les laquais jusqu’aux partisans élus, et fonctionnaires se vautrent dans la soie.
Ignorance ou atteinte à la Démocratie par Boubou Cissé ?
En effet, la semaine dernière, le Ministre de l’Économie et des Finances, Dr Boubou Cissé, est sorti de sa réserve à travers un Arrêté pour demander de suspendre les salaires des Magistrats. Donc, en prenant cette décision, Boubou Cissé a violé la loi qui dit qu’un Arrêté ministériel ne peut pas suspendre un droit accordé par Décret. Suite à cet incident, des Magistrats ont interprété cela de deux façons : ou bien le Ministre Cissé l’a fait par méconnaissance ou par intention de changer les fondements de droit qui définit un État démocratique. Dans tous les deux cas, c’est très grave.
Manque de délicatesse de Mohamed Ag Erlaf
Ensuite, c’est au tour du Ministre Ag Erlaf, interpellé sur les dossiers judiciaires à fournir pour les législatives, de tenter de balayer d’un revers de main cette grève illimitée des Magistrats, comme si elle est insignifiante. Selon lui, la grève des Magistrats n’empêchera pas la tenue des élections prévues pour les mois de novembre et décembre 2018.
Des propos qui heurtent et manifestent un dédain à l’égard des grévistes: «Les chiens aboient la caravane passe…». Dans cette lancée, le dialogue attendra toujours…
Quelques conséquences de cette grève illimitée pour le Malien lambda
Encore de l’injustice. Les Commissariats de police et les prisons surpeuplés. Des femmes, des hommes et des mineurs ont purgé leurs peines respectives, mais restent illégalement détenus ; car, pour les libérer il faut un ordre de mise en liberté que seul un Magistrat peut signer et fournir. Il y a aussi ces orphelins qui sont en attente d’un jugement héréditaire pour pouvoir accéder aux fonds du parent défunt. Or, cette grève joue énormément sur le parent vivant qui se retrouve dans l’incapacité d’inscrire l’enfant orphelin à l’école, faute des moyens financiers.
Les étudiants qui ont pu obtenir des Bourses pour étudier à l’extérieur sont aussi pénalisés du fait qu’ils ne parviennent pas à avoir les documents nécessaires afin de constituer leurs dossiers d’admission pour leur inscription.
Par exemple, suite à des procédures de comptes bloqués, les intéressés ne pourront pas les débloquer sans l’ordre d’un Magistrat et le temps c’est de l’argent pour tout Homme d’Affaires. Pourtant, tous seront paralysés jusqu’à la reprise du travail des Magistrats.
L’impact financier de la grève des magistrats sur l’économie malienne
En plus de l’énormité de la fraude dans notre pays, des versements aux recettes publiques émanant de la justice ne peuvent plus se réaliser ; car, il n’y a plus d’affaires à juger. Bien que la Justice ne saurait être comparable à la Douane, elle participe quand même pleinement à l’essor de l’économie nationale.
D’ailleurs, le manque à gagner pour l’État est important ; car, chaque jour de grève fait perdre au Trésor public d’énormes sommes d’argent à gagner. Ainsi, des milliards de nos francs ne seront pas versés aux recettes publiques.
Il s’agit des sommes générées des documents qui doivent être enregistrés ; les assignations, les grosses de jugement, les timbres, les cautions des plaignants et autres… la liste est longue, très longue….
Prenons l’exemple qui nous a été cité. Une saisie pratiquée sur le compte de la CMDT, une structure étatique. Là aussi, seule une main levée de la part d’un Juge pourra à la société de pouvoir jouir de son compte sans cela elle reste mains et pieds liés.
Malgré que les Juges restent aussi massifs et réactifs, il y a quand même dans la corporation des brebis galeuses qui essayent de créer la zizanie au sein du mouvement. Aussi, quelques jours après la sortie médiatique des deux Ministres, les rumeurs ont fait échos d’une trêve. Joint par téléphone, un Magistrat dément et nous réaffirme leur détermination. «Ceux-ci sont connus de tous et ils ont été chassés de l’Assemblée Générale. Nous sommes soudés et nous savons que certains sont vendus et, de ce fait, à la solde du Régime», nous confia-t-il
Par conséquent, aujourd’hui, financièrement les Avocats et les Huissiers se retrouvent dans une situation très difficile puisqu’il n’ y a plus de procès.
De toute évidence, à défaut d’une solution pour stopper cette hémorragie, beaucoup de Maliens en pâtiront.
N.N.C