Je vais commencer cette chronique par vous faire une confidence : « je suis littéralement groggy ». Pourtant, je n’ai reçu d’uppercut d’aucun puncher de la trempe des Mohamed Ali, Sugar Ray Leonard, Rocky Marciano, Evander Holyfield ou Mike Tyson. Celui qui me met dans un tel état est un célèbre inconnu de vous, mais moins de moi. Il se nomme David Galiana et est Directeur Marketing Digital chez Planzone. Je vous conseille de ne pas croiser son chemin. Sa frappe est lourde et ravageuse. Il ose prédire voire annoncer la fin du sacro-saint courrier électronique d’ici à 2020. David Galiana, comme annonce sa notice de présentation en une phrase : « propose régulièrement des contenus ayant pour objectif de répondre aux challenges et défis rencontrés par les chefs et directeurs de projet ». Notre démolisseur de service est franchement remonté contre l’email ; il lui trouve tellement de défauts qu’il a carrément écrit une plaidoirie en 9 points pour enterrer définitivement le courriel. Quel sacrilège, ai-je pensé, que d’oser s’attaquer à l’invention de Ray Tomlinson (automne 1971), cet ingénieur de Cambridge, très jovial, à la barbe fournie, travaillant dans la société BBN, elle-même collaborant, pour le compte du gouvernement américain, au projet Arpanet, l’ancêtre d’Internet ! David Galiana fait un constat ahurissant : « Aujourd’hui, les cadres français reçoivent en moyenne 88 mails par jour et ils passent environ 5,6 heures par jour à les lire, y répondre et les trier ». Heureusement, je pense, que ce constat n’est pas généralisable à notre situation professionnelle au Mali, sinon je vous conseille de ne pas mettre ce texte sous le nez de nos chers employeurs qui pourraient, en terme de mesure conservatoire, nous dénier l’accès à l’internet aux heures de services. Pour revenir à notre David, il faut croire qu’il est vraiment remonté. Voici une classification à la Mendeleïev qu’il établit des mails : les emails urgents qui exigent une réponse immédiate ; les emails auxquels vous pouvez répondre plus tard (mais qu’il faut marquer d’un petit drapeau sinon vous les oubliez) ; les emails dont on est seulement en copie sans trop savoir pourquoi ; les emails qui ne nécessitent pas de réponse ; les emails qui ne méritent pas de réponse ; les emails pour vous convier à une réunion ; les emails stupides de collègues blagueurs ; les emails de discussions plus ou moins professionnelles avec vos collègues et les spams. Et la sentence est imparable : « Difficile de rester concentré face à une telle quantité de messages ». A l’en croire, certaines entreprises ont déjà fait le constat du gâchis que représente la gestion du courriel. Celles-ci ne sont pas passées par quatre chemins, elles ont purement, simplement et totalement supprimé l’email. En lieu et place, ces entreprises invitent leurs employés à se convertir aux « outils de gestion de projet collaboratifs qui possèdent une messagerie instantanée permettant de faciliter les échanges ». Vous en connaissez-vous, ces fameux outils ? Pas de panique ! Ils pullulent déjà et comme l’habillement, il y en a pour toutes les tailles, tous les goûts et toutes les bourses. Vous êtes du genre concret et vous voulez des noms d’outils collaboratifs qui ont l’outrecuidance de s’attaquer à l’institution « courrier électronique ». Join.me ; Cubby ; Evernote ; GaggleAmp ; Asana ; Basecamp ; Trello ; Slack et HipChat sont, semble-t-il, ce qui se fait de mieux pour le moment. Pour ma part, je ne voudrais être ni stressant ni inefficace comme un email. Je ne voudrais pas, non plus, perdre votre temps et vous obliger à des interprétations erronées… toutes choses que reproche David Galiana au courrier électronique. Je vous file un rencart en bonne et due forme avec notre pugiliste. http://bit.ly/2xNcYJE. Là, vous verrez tout ce qu’il reproche au courrier électronique. Vous découvrirez aussi son énorme production intellectuelle. Cependant, je présume que le courriel fera de la résistance ; il ne se laissera pas si facilement sacrifier sur l’autel d’une évolution qui le mettra définitivement dans les cordes. Il y a quelques décennies, Marshall McLuhan, ce philosophe, monument incontournable de la sociologie de l’information et de la communication avait écrit des essais qui laissaient penser que la Galaxie Gutenberg souffrirait de l’avènement de sa concurrente, la Galaxie Marconi. A terme, la seconde pourrait même supplanter la première. Beaucoup de ses disciples embouchèrent la même trompette pour largement deviser sur la guerre des galaxies. Mais à quoi assistons-nous ? Les deux galaxies cheminent ensemble dans une parfaite complémentarité et nous sommes nombreux à nous interroger sur ce que serait une société sans écrit et sans audiovisuel. A une certaine époque, le tube cathodique (la télé) était, lui-aussi, supposé prospérer sur les cendres de la radio. Toutes ces prédictions catastrophistes ne se réalisèrent pas. Pas plus que les fréquentes fins du monde annoncées par les Nostradamus des temps modernes qui excellent plus dans le buzz que dans quelque autre réflexion philosophique ou religieuse. Evidemment, il faut bien s’en accommoder et, d’ailleurs, que serait notre monde sans ces permanents questionnements, remises en cause et incertitudes qui font son sucre, son sel, son piment… mais bien plus, son essence ?
Serge de MERIDIO INFO SEPT
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