Deux fois reportées, les élections législatives qui s’inscrivent dans le respect des résolutions du Dialogue National Inclusif, ont été organisées (premier tour) le dimanche 29 mars 2020 dans un contexte particulièrement marqué par une insécurité grandissante et une progression inquiétante de la pandémie de coronavirus.
C’est pourquoi certaines organisations de la société civile, des leaders politiques et des activistes avaient appelé au boycott du scrutin. On comprend alors que ce premier tour ait été organisé dans un climat morose avec un taux de participation en deçà des attentes.
« C’est une chance que ce scrutin ne se déroule pas au pic du coronavirus au Mali. Cela est une grâce dont il faut en profiter », a déclaré le président Ibrahim Boubacar Kéita dimanche 29 mars 2020 après avoir accompli son devoir citoyen dans le cadre du premier tour des législatives. Le chef de l’Etat a voté dans le bureau de N°14 du « Groupe scolaire Gaoussou Doumbia» à Sébéninkoro. Il était accompagné de son épouse, Mme Kéita Aminata Maïga.
Avant d’accomplir leur devoir citoyen le Chef de l’Etat et son épouse ont observé scrupuleusement les mesures sanitaires mises en place dans le centre de vote, notamment le lavage des mains au savon, l’utilisation du gel et le respect de la distance règlementaire, pour contrer la propagation du coronavirus.
Dans le cadre du premier tour des législatives, les bureaux de vote ont été ouverts dans le calme dans la capitale malienne. Et cela malgré les appels au boycott de certaines organisations de la société civile, des leaders politiques de l’opposition et certains intellectuels qui craignent que le scrutin ne facilite la propagation du COVID-19.
Dans les différents centres de vote de la Commune IV du district de Bamako, par exemple, on notait une présence dissuasive des forces de sécurité à l’entrée et à l’intérieur. Quant aux dispositions annoncées la veille (samedi 28 mars 2020) par le gouvernent pour la prévention du Coronavirus, elles étaient plus ou moins respectées. Les responsables des bureaux de vote faisaient en tout cas beaucoup d’efforts pour le respect des mesure-barrières.
«Sur le plan organisation du vote, nous avons eu tous les équipements à temps pour ouvrir à 8h», a indiqué Sidi Coulibaly, responsable d’un bureau de vote du Centre «Aminata Diop» de Lafiabougou, commune IV du district de Bamako.
«Les électeurs viennent au compte-gouttes. Il n’y a donc pas d’affluence pour le moment. C’est mieux que ce qu’on pouvait espérer avec toute cette campagne pour le boycott sur les réseaux sociaux et dans certains médias», a-t-il poursuivi. Beaucoup de responsables de bureau partagent aussi son optimisme dans d’autres centres de la commune IV.
«Je suis venu voter parce que je pense que nous ne sommes pas plus exposés au COVID-19 ici que dans les marchés, les mosquées… toujours ouverts aux consommateurs et aux fidèles. Sans compter ces attroupements pour les mariages et les funérailles», a défendu Abdoulaye Diarra, un enseignant.
Des électeurs sont restés à la maison par la crainte du COVID-19
Et pourtant, l’appel au boycott risque d’avoir un impact sur le taux de participation. «Depuis l’avènement de la démocratie, je n’ai raté aucun scrutin. Mais, cette fois-ci, je n’irais pas voter parce que je ne veux pas servir de vecteur de transmission au COVID-19», nous a confié un cadre cinquantenaire qui a requis l’anonymat.
Généralement, ce sont les jeunes et surtout les femmes qui votent massivement au Mali. Mais ce matin, de nombreuses femmes rencontrées dans des marchés de la capitale ont affirmé qu’elles n’iront pas voter de crainte d’être contaminées et d’exposer leurs familles.
Ceux qui ont décidé de boycotter les législatives prennent en général le cas de la France comme exemple. Pour beaucoup d’entre eux, c’est le premier tour des municipales qui a accéléré la propagation du Coronavirus dans ce pays. L’autre fait marquant, est qu’on est toujours sans nouvelle de l’opposant Soumaïla Cissé et une partie de son équipe de campagne enlevés mercredi dernier dans le cercle de Niafunké (Tombouctou/nord du Mali) où il brigue un second mandat de député.
Selon la CENI, le fichier électoral audité compte 7 663 464 électeurs ont été répartis entre 12 469 centres pour 22 147 bureaux de vote à travers le Mali. Pour ce premier tour la Cour constitutionnelle a retenu au final 1 451 candidats figurant sur 547 listes, pour les 147 sièges de députés de l’Assemblée nationale.
Un second tour est prévu le 19 avril 2020 dans les circonscriptions où cela est nécessaire. La nouvelle législature devrait commencer au plus tard le 2 mai 2020.
A noter aussi que les échéances législatives de mars-avril 2020 se tiendront sur la base de la loi N°02-010 portant loi organique qui fixe le nombre des députés à 147 repartis entre les 49 cercles et les 6 communes du district de Bamako.
Moussa Bolly
(LE MATIN)
Une faible affluence et des incidents majeurs
Le premier tour des législatives organisé le dimanche 29 mars 2020 a été marqué par une faible affluence et des incidents majeurs, ont déploré des observateurs nationaux. Après avoir voté, le Premier ministre Boubou Cissé à confié à la télévision nationale (ORTM) que 2,2 % des 22 147 bureaux n’avaient pas pu ouvrir à midi pour des raisons diverses, notamment au centre et au nord du Mali. Il a néanmoins jugé « l’affluence satisfaisante».
« Six candidats ont été enlevés et, à midi, le taux de participation ne dépassait pas 7 % », a confié à la presse (à la mi-journée) Dr. Ibrahim Sangho, président de l’Observatoire des élections et de la bonne gouvernance.
La Coalition pour l’observation citoyenne des élections au Mali a également déploré des « incidents majeurs » enregistrés au nord, au centre et à Bamako. Il s’agit, selon elle, de l’enlèvement des candidats et d’agents électoraux ; de saccage des bureaux de vote par des hommes armés ainsi que l’arrivée tardive des matériels de vote… Mais, des incidents qui ne remettent pas en cause la régularité du scrutin.
Les Forces armées maliennes (FAMa) ont déclaré avoir arrêté le 29 mars 2020 à 14h50, 19 personnes en possession de 10 urnes de vote à Tombouctou-Sanfil (Tombouctou, nord du Mali). Ce matériel a été saisi dans la famille de Monsieur Oumar Ag Intaha, Chef fraction Garbeye, Commune rurale de BER.
« Lesdites urnes étaient destinées à des opérations frauduleuses… Après identification, les intéressés seront remis au commissariat de police locale pour enquête », ont-elles indiquées.
Les FAMa ont aussi déclaré avoir neutralisé aujourd’hui cinq terroristes à Tiguila dans la localité de Mondoro (région de Mopti), au centre du pays. Les FAMa ont en outre récupéré 3 motos, 2 armes, des munitions, 1 talkie, 1 tenue des FAMa, 1 roquette, des pièces d’identités et des téléphones. « Les FAMa avaient été accrochées dans une embuscade alors qu’elles escortaient du Matériel électoral. Au cours de cette opération, elles n’ont enregistré aucune perte en vie humaine ni aucun dégât », ont-elle souligné.
M.B