Il a un bagout à faire pâlir d’envie les rhétoriciens. Il, c’est le ministre de la Sécurité et de la Protection civile. Le général de brigade Salif Traoré a cependant du mal à équilibrer l’équation de l’insécurité au Mali. Des vies humaines sont quotidiennement sacrifiées sur l’autel de l’incurie. Il y a lieu de revoir la stratégie, sinon il y a péril en la demeure.
Arrivé comme un héros, Salif risque de repartir comme un zéro s’il ne change pas de fusil d’épaule dans la lutte contre le banditisme dans la Cité des Trois caïmans. A-t-il perdu son latin ? C’est la question qui taraude l’esprit de bon nombre de Maliens abasourdis par la tournure prise par l’insécurité.
Des morts accidentelles sont monnaie courante aujourd’hui parce que l’Etat n’arrive pas à garantir réellement la sécurité des citoyens et de leurs biens. Or, l’un des premiers départements en charge de la question est le ministère de la Sécurité et de la Protection civile.
Ce ministère dirigé par le stratège (s’il l’est encore) Salif Traoré est en panne d’inspiration. Conséquence : des personnes sont brutalement arrachées à l’affection de leurs familles dans les conditions pas normales. Un tour dans la capitale ou dans les grin vous donnent une idée du niveau de l’insécurité tout genre.
Le citoyen lambda ne comprend pas la gestion de la sécurité par Salif Traoré. Comment comprendre qu’en tant que militaire, il n’arrive pas à engager une action d’envergure avec les paramilitaires et autres pour soulager la population ?
Est-ce un manque d’expérience ou de volonté du ministre de travailler en équipe avec les autres corps ? La sortie hasardeuse du directeur régionale de la protection civile du district, le commandant Bakary Daou, qui a fait cas des moyens limités pour expliquer le dernier décès accidentel sur le 3e pont, a fini par convaincre que la sécurité est loin d’être un souci en haut lieu.
A Bamako, les braquages se suivent et ne ressemblent pas. Il y a quelques semaines, en plein centre-ville, dans le quartier de Djélibougou en Commune I, dans une boutique très sollicitée par la population, les bandits sont arrivés à déposséder des clients de leurs biens et à prendre la fuite avec une partie de la recette des boutiquiers.
A quelques mètres du lieu du vol, un véhicule d’un des commissariats de la Commune I rodait, mais les éléments n’ont pas pu tracer les bandits. La même semaine, deux jeunes ont fait irruption dans un grin aux alentours de 22 h. Munis d’armes à feu, ils ont pu s’accaparer de tous les objets de valeur dont disposaient les membres du grin.
Des faits accablants
La même nuit, une dizaine d’autres attaques se sont passées dans la même commune. Mais le hic est que les commissariats n’ont pu mettre la main sur aucun malfrat. Ce qui ne surprend guère un enseignant très remonté contre les différents commissariats du Mali.
Il va plus loin : « Salif doit revoir sa copie avec les différents commissariats du Mali. Rien de sérieux ne se passe aujourd’hui dans les commissariats du Mali. Ils sont d’ailleurs plus tentés par les affaires qui leur rapportent que la sécurité. Un tour dans les différents commissariats et vous sortirez malades, tant les commissariats sont devenus des lieux de business ».
Un haut gradé de l’armée ne va pas par quatre chemins pour éreinter la gestion du département par le ministre Salif. « Le ministre Salif parle beaucoup mais travaille peu. Je sais que son souci n’est pas la sécurité. Tout ce qui l’importe, ce sont les activités folkloriques qui peuvent lui permettre d’avoir des sous et se faire voir. Un militaire ça ne parle pas beaucoup mais avec le ministre actuel, vous en savez beaucoup les hommes de médias ».
Le lundi 24 octobre 2016 dans la soirée, Moustapha Sidibé et deux autres ont été lâchement abattus par des éléments non encore identifiés alors qu’ils étaient de service au poste de péage de Sanankoroba à l’entrée de Bamako. Leur cadre n’était pas sécurisé quand bien même le poste de Sanankoroba réalise des recettes annuelles de l’ordre de 15 milliards de F CFA.
Ce poste étant situé à quelques kilomètres de la ville, rien ne peut justifier cette unième attaque des jeunes. Cette zone reculée devait être sécurisée par les hommes en tenue pour la seule raison que c’est une somme importante qui est gérée au sein de ce péage. Donc, c’est une faille du côté des plus hautes autorités au premier rang desquelles le ministre de la Sécurité et de la Protection civile.
Sur l’eau aussi, la vie des usagers est loin d’être un long fleuve tranquille. En l’espace de deux semaines, des jeunes, des soutiens de familles ont été arrachés à l’affection des leurs proches à cause du manque d’expertise des services chargés de sauvegarder la vie des utilisateurs.
Pour les opérations de sauvetage dans le fleuve, la protection civile est obligée de solliciter l’aide de privés ou du service de la douane. Il est difficile de donner une explication à cet état de fait. D’ailleurs, qu’est-ce qui pouvait empêcher de sauver la défunte Mme Traoré Fatoumata Doucouré si les moyens nécessaires étaient mobilisables au moment de l’accident ?
Bref, les faits sont là et le constat est amer. Les moyens manquent et le général n’arrête pas de pérorer. A chaque jour suffit sa peine, et à chaque dégât, ce sont des mesures qui sont édictées en théorie par le ministre. Il est plus que impérieux, pour le ministre, de s’atteler à trouver des matériels nécessaires, des commissariats dirigés par des hommes soucieux de la sécurité de la population et non du souci de se faire de l’argent avec des rackets incessants.
Pour se rendre compte de certaines choses, le ministre devra faire des visites inopinées dans les commissariats et s’imprégner des dossiers du jour. Il devra participer de temps à autre à des opérations de la protection civile, aux patrouilles tardives.
Toujours est-il que l’espoir suscité par l’arrivée de l’ancien gouverneur de Kayes est sur le point de s’effondrer. Il est encore temps d’agir M. le ministre. Avant qu’il ne soit trop tard.
Abdourahmane DOUCOURE LA SIRENE