Nouhoun Togo n’est plus à présenter au Mali. Il a occupé douze ans le poste de chargé à la communication du ministère de la Défense et des anciens combattants à l’époque d’Amadou Toumani Touré au pouvoir. Il est un homme de conviction et sa fidélité n’a jamais failli envers son président ATT. Ensuite, il devient chargé à la communication du PDES, parti des héritiers d’ATT où il démissionne plus tard à cause de l’accord politique que son parti a signé avec le gouvernement. À travers des vidéos, il s’adresse aux Maliens les réseaux sociaux par son émission intitulée « ma vision du Mali sous IBK ». C’est un homme qui tient au respect des principes d’honneur et de dignité. Nous sommes partis à la rencontre de cet homme fascinant qui aujourd’hui a créé un mouvement qu’on appelle USR (Union pour la Sauvegarde de la République) et reste tout de même, Conseiller et porte-parole de Soumaila Cissé pour avoir ses impressions sur la crise sociopolitique au Mali. Il évoque l’enlèvement de SOUMAILA Cissé, le conflit au Centre du pays, la posture de M5, l’attitude de la junte
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Sur l’enlèvement de Soumaila Cissé depuis plus de six mois : « Le président de la République, le ministre de la Sécurité, celui de l’administration territoriale sont tous sortis à la télé pour donner l’assurance aux candidats sur le déroulement des élections »
Ça fait exactement 189 jours que Soumaïla a disparu sur l’échiquier politique dans les conditions mystérieusement. Pourtant dès le départ nous l’avons soulevé à la suite des entretiens que nous avons eus avec le ministre de l’Administration territoriale en son temps. Ce sont eux qui nous ont rassuré que les élections vont se passer dans les conditions où tout le monde peut aller faire campagne dans leurs localités respectives sans crainte. Le président de la République, le ministre de la Sécurité, celui de l’administration territoriale sont tous sortis à la télé pour donner l’assurance aux candidats sur le déroulement des élections. À partir de cela, on a loué un avion et on est parti avec la famille de Soumaila à Niankunké. La première semaine, on a bien travaillé et c’est à la deuxième semaine, lorsque Soumaila partait sur Saraféré, qu’ils ont été arrêtés en route. C’est le lendemain du kidnapping, que nous avons été informés sur le comment, cela s’est déroulé.Comme vous le savez, il y a eu un mort, c’était le garde de camp de Soumaïla qui a été abattu. Alors, il y a eu trois blessés et ils ont pris les dispositions pour nous amener le corps que nous avons inhumé à Bamako. À partir de ce jour, concernant l’organisation il y a eu beaucoup de problèmes. Pour nous, le jour où Soumaïla a été enlevé c’est ce même jour que le Président devrait s’adresser à la Nation, mais il n’a pas dit un mot sur l’enlèvement. Sachant que des techniques existent aujourd’hui qui peuvent repérer le téléphone de n’importe qui, et que celui de Soumaila est resté allumer jusqu’à 3 heures du matin. Les services de renseignements en son temps avec orange Mali pouvaient localiser là où il se trouvait. Les autorités n’ont pas pris les dispositions pour chercher là où Soumaïla était. Ils n’ont pas fait de déclaration, ce qui nous a poussés à une réflexion de complicité. Alors, nous sommes sortis pour dire que IBK savait ce qui se passait. Aujourd’hui, on est à 6 mois d’attente. Nous pouvons vous rassurer à travers les informations qui sont à notre possession que Soumaïla va bien et sera sans tarder parmi sa famille. Voilà ce que nous pouvons dire sur Soumaïla.
Sur le conflit au Centre du Mali : Il lance un cri de cœur !
« Je pense qu’il y a une manipulation politique dont d’autres vivent de ce conflit, que ça soit à Bamako ou d’autres localités… que Assimi Goîta et ses hommes commencent à réfléchir rapidement à leur mission qui est ça. La mission que l’État leur a donnée et qu’ils ont choisie, l’arme de métier. C’est faire en sorte que le Mali soit sécurisé dans le centre et au nord. »
Vous savez aujourd’hui si vous demandez les Dogons ou les Peuls les raisons pour lesquelles ils s’entretuent, ils ne pourront pas vous répondre. Je pense qu’il y a une manipulation politique dont d’autres vivent de ce conflit, que ça soit à Bamako ou d’autres localités. Certains tapis à l’ombre à Bamako sont en train de tirer les ficelles pour tout simplement des intérêts politiques. Vous savez concernant le problème du Centre, nous l’avons vu venir depuis longtemps après que Kidal a chuté. Nous en avons conseillé en son temps au président Ibrim Boubacar Keita de prendre les dispositions et de mettre le tempo pour que les terroristes ne descendent pas du nord vers le centre du Mali. IBK et son gouvernement nous ont dit qu’ils ont pris des dispositions et qu’il n’y a rien au Centre et que rien n’arrivera au Centre. Donc quelques mois plus tard, nous avons remarqué que la situation a commencé par Amadou Kouffa lui-même qui a voulu créer ce qu’on appelle l’empire Macina et ce conflit. Il a commencé par abattre les Peuls et finalement dans cette politique, on a dit que c’est les Dogons qui abattaient carrément les Peuls . Après on nous a dit non, c’est les Peuls qui abattaient les Dogons. Et finalement, on dit que les Peuls et les Dogons sont tués par les terroristes. Donc on est resté dans cette posture. C’est ça qui nous a conduits dans une situation pareille. Au moment où je vous parle, dans certaines contrées de Koro et de Bankass, ils ont pris les dispositions pour fermer carrément les écoles. Dans le Gourma plus de 800 écoles sont fermées. Alors nous nous trouvons dans une situation où l’absence de l’État a créé des situations très difficiles. C’est pour cela que nous profitons de l’occasion de votre presse pour demander aux autorités de prendre les dispositions rapidement pour mettre la sécurité à Sokoura, à Djalassago, et dans certaines localités de Koro. Et de créer les conditions pour une politique de sécurisation et que les avions rentrent en jeu. Sinon les écoles qui ont été créées depuis les années 1950 et quelques, viennent d’être fermées. Et pas plus que quelques jours, un enseignant au nom de Allassane TOGO à Sokoura au Cap a été enlevé et pour le moment il a disparu. Donc, tout cela nous pousse à une réflexion pour que nous puissions rapidement prendre la situation en main pour mieux sécuriser les contrées. Aujourd’hui, le petit mil (céréales) est cultivé dans le Séno Bankass. Depuis trois ans, il n’y a pas de cultures. Les gens ne peuvent pas sortir à plus de 4 km pour aller cultiver. Nous sommes dans une situation d’insécurité généralisée. Les gens sont tués et on n’arrive pas aller les sécuriser, et on les laisse se défendre avec les moyens qu’ils ont, des armes de dernières générations. Le problème dans ce domaine de terrorisme, c’est que des hommes sont sortis un peu partout dans le monde pour venir se retrouver et mener ce combat. Pour eux, c’est un combat pour Dieu, pour l’islam. Aussi, pour éviter tout ce qui se passe ; les assassinats, les règlements de compte, entre les uns et les autres, c’est de mettre les forces de sécurité pour mieux sécuriser la bande au Centre du Mali. Comme vous le saviez, depuis 2012 à nos jours, nous avons eu à peu près plus de 13 000 personnes tuées sur l’étendue du territoire national. On doit créer les conditions, que ça soit au niveau des forces armées de sécurité, que ça soit au niveau de la population paisible qui ne demande que de vivre ensemble dans la cohésion, qui se trouve dans une situation très difficile. C’est pour cela qu’il est bon aujourd’hui, que nos responsables au lieu de continuer à gérer politiquement la chose, que Assimi Goîta et ses hommes commencent à réfléchir rapidement à leur mission qui est ça. La mission que l’État leur a confiée et qu’ils ont choisie est l’arme de métier. C’est faire en sorte que le Mali soit sécurisé dans le centre et au nord du Mali. C’est un cri de cœur !
Concernant la santé du M5 RFP ?
« Les Maliens sont sortis, pas pour faire plaisir à quelqu’un, mais pour le changement »
La situation politique au niveau de combat qui a été mené pour le départ de IBK, le M5 et les autres structures comme vous le savez, il y avait deux tendances ; ceux qui voulaient le changement dès le départ et qui se sont fixé un objectif, le départ de IBK. Ceux-ci se trouvent dans le M5 qui regroupe des associations, des partis politiques et des structures de plus de 200. Leur objectif était clairement de changer le régime de IBK et déboulonner le système de Ibrim Boubacar Keita. Ibrim est parti, mais le système est resté. L’autre tendance, le M4 vient d’être créé sous la situation politique, mais est composé d’anciens de IBK. Tapis dans l’ombre, ils travaillent avec certains de la junte. Le M4 est créé uniquement pour qu’ils soient là pour supporter la junte. Aussi, nous avons dit à la junte que devant l’opinion nationale et internationale, ils ont avoué venir parachever les œuvres de M5 et de ce fait, ils doivent être honnêtes avec le M5 pour gérer la situation d’un changement. Les Maliens sont sortis, pas pour faire plaisir à quelqu’un, mais pour le changement. Ce changement nous en avons besoin, car le malien souffre. Et aujourd’hui, dans ce débat approfondi à ce niveau, des directives données pour le changement, concernant la feuille de route, il a été demandé les audites pour les 1230 milliards détourné au niveau de l’armée. Les grandes structures doivent être auditées et l’État doit faire son travail. Et que le président de la République BAH Daw, donne l’assurance que ce travail sera fait. Mais nous avons constaté au niveau du M5, une trahison, parce que dès le départ ces militaires avaient proposé de prendre la présidence et donner la primature au M5. Donc ils nous ont trahis. Même Moussa Traoré avant sa mort les avaient conseillés que s’ils veulent être sauvés, leur vaccin n’est autre que M5. « Mettez-vous ensemble pour que le M5 dans ce cas, même ceux qui ne sont pas d’accord avec vous, aient peur de vous et la communauté internationale et la population auraient confiance à vous. Malheureusement, à un moment donné ils ont emprunté d’autres chemins qui ne nous honorent point, des chemins périlleux où il y a des risques. Tout cela, pour leurs intérêts personnels. M5 a toujours dit qu’il restera serein et ce travail nous le ferons avec beaucoup de responsabilités.
`Sur la fausse promesse des militaires sur un gouvernement civil,
« Vous savez, on ne blague pas avec la parole donnée d’un officier, car c’est un serment ».
Pour eux, dès le départ ils ont parlé d’un gouvernement de transition civile. Goïta a dit ça, Wagué l’a dit, et dans leur deuxième communiqué sur RFI, ils ont dit Civilo militaire. Ils ont voulu à la rencontre des 10,12, septembre au CICIB, de s’accaparer du pouvoir. Sur les cinq commissions qui ont été mises en place, et qui ont travaillé sur les feuilles de route de la transition, trois ont voté pour une transition civile. Mais ils ont simplement modifié le document final que nous n’avons toujours pas reçu. La communauté internationale n’étant pas d’accord de cette mascarade, ils étaient obligés de choisir un militaire à la retraite. Mais j’ai beaucoup de respect et de considération pour cet homme. Je les connus depuis longtemps et je sais que c’est un homme de valeur, de droiture. Donc nous savons aussi qu’il faut se battre pour gérer la situation. Mais ce qui est déplorable, c’est que la parole donnée est importante et ces militaires n’ont pas respecté leur parole donnée. La charte qu’ils ont été obligés de publier ne correspond pas avec nos recommandations.
La CEDEAO sur le problème de vice-présidence
« Donc on a compris que ce sont eux qui veulent créer les problèmes aux Maliens, parce qu’ils n’ont pas respecté le principe…Là où les militaires sont arrêtés, même couchés, ces hommes d’État de la CEDEAO voient ce qu’ils ont l’intention de faire ».
Il faut qu’on soit très honnête. Ici Assimi a pris l’avion pour se rendre à Accra pour aller rencontrer la communauté internationale. Et il a eu 40 minutes d’exposition. Là-bas, la CEDEAO a été très claire avec eux. Ils ont dit que le vice-président ne pourra pas remplacer le président en cas de vacance de poste du président. Et dès que la structure de la transition est mise en place, il faut dissoudre la junte. Donc si ces principes sont acceptés, ils doivent libérer ceux qui sont en prisons. Puisque la loi dit 72 heures après, on ne peut pas détenir quelqu’un en prison. Il faut ou le libérer ou le traduire devant le juge. Respecter l’article 222 de la constitution. C’est très clair ! De retour d’Accra, ils ont organisé une conférence de presse et ils ont relaté tout ce que la CEDEAO a dit. Et plus encore, ils ont dit que la CEDEAO est prête à durcir ses sanctions sur le Mali en nous privant de carburant et même des denrées de première nécessité. Mais ce qui nous a surpris, le jour de l’investiture, les dispositions qu’on a demandé d’enlever se sont retrouvés dans la charte. Donc on a compris que ce sont eux qui veulent créer des problèmes aux Maliens parce qu’ils n’ont pas respecté le principe. Et cela prouve que probablement ils ont un agenda caché. Nous ne sommes pas des enfants de la dernière pluie et ces présidents sont quand même malins. Ils ont géré des nations et continuent à le faire. Là où les militaires sont arrêtés même couchés, ces hommes d’États de la CEDEAO voient ce qu’ils ont l’intention de faire. Et pour les réformes on leur a dit que ce n’est pas leur mission. Donc s’ils s’accrochent malgré tout ça. Nous demandons à ces militaires, dorénavant d’honorer leur engagement. Et puis, ce coup d’État n’a jamais été clair. Comment Karim a-t-il été libéré et accompagné à la frontière et qui l’a fait ? Pourquoi Moussa Diawara n’a-t-il pas été arrêté ? Dans tout ça, il y a des zones d’ombres. Ce qui nous fait croire qu’il y a toujours la main d’IBK ou de son ancien régime qui continue à mener la barque dans l’ensemble des structures. C’est pour cela que nous disons qu’il faut les déboulonner, déboulonner ce système-là. Nous continuerons à rester à l’avant-garde pour surveiller nuit et jour. En tout cas, je pense que l’ensemble des partis politiques doit se rencontrer pour discuter. Ancienne majorité, et tous les autres. On a fait croire que tous les problèmes du Mali ont été engendrés par la classe politique, or c’est faux et archi faux ! Dans les 60 ans de notre indépendance, 35 ont été gérés par des militaires. Donc ces militaires ont choisi d’être militaires ou policiers donc ils doivent aller faire leur travail.
L’embargo ?
« Et si nous ne faisons pas extrêmement attention, en deux mois il n’y aura pas de salaires
C’est très difficile pour nous puisque nos petites enquêtes au niveau de la douane et des impôts, et ce qui en est de nos recettes, depuis combien de mois aujourd’hui, la communauté internationale a carrément fermé ses caisses pour le Mali. Que ça soit à la douane, ou au niveau des impôts, nous avons perdu des dizaines de milliards. Tout ce qui est des frontières ou tout ce qui doit faire rentrer est bloqué. Vous savez presque 100% des maliens sont rattachés à l’ÉTAT ; ils doivent être payés au niveau du trésor qui est verrouillé en ce moment, car le trésor se trouve au niveau de la banque centrale qui n’arrive pas à gérer cette situation. Et si nous ne faisons pas extrêmement attention, en deux mois il n’y aura pas de salaires. Donc tous ceux qui sont sortis pour dire « vive les militaires » vont sortir pour dire « à bas les militaires ». Il faut rapidement trouver la formule pour que l’embargo puisse être levé pour l’intérêt des Maliens et que les Maliens se donnent la main pour travailler ;
Pour clore « Les Maliens doivent être jaloux des autres pays »
Que les Maliens se mobilisent. Seul le travail validera le Mali. Personne ne viendra libérer le Mali pour nous, et que les Maliens rêvent ensemble et qu’ils soient jaloux des autres pays. C’est ainsi que nous pourrons travailler ensemble l’intérêt de la nation. Et aussi mettre des hommes dignes et sincères au sommet de l’État.
Propos recueillis par M. Coulibaly