La situation de monopole du secteur de l’électricité que détient la société EDM-SA est semblable à celle qu’avait la SOTELMA dans le domaine des Télécommunications avant l’ouverture du secteur à la concurrence. On se rappelle encore dans ce pays que de simples puces téléphoniques étaient vendues à plus de 150. 000 F CFA, quand aujourd’hui elles ne coutent presque plus rien. C’est alors pareil aujourd’hui pour le coût de l’électricité au Mali. Tout semble indiquer qu’EDM-SA surfacturait ses clients et quand on a l’audace de s’en plaindre, le réseau se met en place pour mettre le client dans des situations insensées. Dans sa situation de monopole, EDM-SA aurait toujours raison face à un client et le plaignant toujours tort. Il serait un fraudeur présumé et peu importe les explications qu’il leur donnera. Les agents d’EDM ont remplacé la justice. Ils rendent eux-mêmes leur verdict en étant juge et partie. Ils ressemblent en cela, dans leur zèle, à ces policiers de la circulation routière attendant leur bakchich, le visage et le cœur fermés comme des robots, aux explications des usagers qu’ils ont décidé de déplumer.
EDM est le seul service au Mali où la présomption d’innocence n’a pas de sens. Le client est d’abord présumé coupable avant toute vérification dès lors qu’une anomalie est constatée. Une société qui sur la base de clauses abusives dans son contrat impose, du fait de son monopole, la violation de nos domiciles en nous obligeant d’ouvrir les portes de nos maisons à tout venant, pour dit-elle, relever des chiffres que des compteurs intelligents dans d’autres pays permettent de faire à distance. Imaginez que la SOTELMA devait aussi rentrer dans nos maisons pour relever les compteurs de nos téléphones fixes ou de nos connexions ADSL avant de nous facturer. Qui sait, si certains de ces releveurs ne servent même pas d’éclaireurs à d’autres actions sur le dos du client. EDM accuse et humilie des familles en les privant d’électricité sur la base de simples anomalies constatées sans en chercher au préalable les causes. Les accusations dont sont souvent victimes les clients ne peuvent relever que du fait d’agents de l’intérieur. Parce que leur réalisation tient à une connaissance minutieuse des codes intérieurs du service et surtout du mode de fonctionnement des compteurs, dont EDM est seule distributrice et seule capable de certaines prouesses que le meilleur électricien formé dans nos écoles. Mais peu importe comment un mal est survenu, le client le payera à ses dépens. Par ailleurs, quelle est cette règle qui autorise EDM à être le vendeur des compteurs qui sont chargés de nous débiter ? En somme, le voleur installe sa mesure chez vous et vous fait payer selon ce que sa balance vous donne comme facture à payer à la fin du mois. Ces deux fonctions sont irréconciliables pour la défense des consommateurs. C’est pourquoi, l’esprit de transparence et de bon sens exigent qu’on songe à séparer la fonction de vente de l’électricité de celle de la vente de compteurs pour que le juge EDM ne soit pas en même temps partie.
L’abus de position dominante dont se prélasse EDM aurait pourtant dû être réglé par la sœur jumelle de l’AMRTP, la CREE, la Commission de régulation de l’Electricité et de l’EAU.
L’Ordonnance N° 00-021/P-RM du 15 mars 2000 et son décret d’application N°185/P-RM du 14 avril 2000, qui créent la Commission de Régulation de l’Electricité et de l’Eau, en tant qu’organe autonome et indépendant, qui a principalement en charge la tarification des services publics lui fait pourtant obligation en son article 4 de protéger les consommateurs que nous sommes.
Mais peine perdue, les mêmes maux qui nous ont fait vomir la gestion de l’AMRTP semblent avoir pris du poil de la bête à la CREE. C’est pourquoi, après l’AMRTP, nous voulons maintenant nous concentrer sur l’autre plaie de la République que sont EDM et sa CREE. Déjà, il faut déplorer le fait que le secteur de l’énergie soit écartelé entre 4 tutelles dont la Primature, le Ministère des mines et de l’énergie, le Ministère des finances et le Ministère de l’Environnement et de l’assainissement.
Le combat mérite d’être engagé pour que chaque région de ce pays ait son autonomie énergétique de l’EDM. La production, l’achat et la distribution de l’énergie sont déjà des domaines bien distincts. Une seule EDM ne peut servir et assurer le développement de tout le Mali. Des pays voisins l’ont compris et on parle plutôt de la Société des Energies de Côte d’Ivoire. A part l’EDG de la Guinée, le Mali passe pour être la lanterne rouge de la sous-région, loin en matière d’électricité, derrière la NIGELEC du Niger, la SONABEL du Burkina Faso, la SENELEC du Sénégal ou encore la SONELGAZ de l’Algérie avec ses 29 milliards de KW/an ou même la SOMELEC de la Mauritanie qui a déjà anticipé sur le futur avec des centrales solaires et éoliennes.
Le ver est décidément dans le fruit. On se rappelle déjà les coups foirés de la libéralisation du secteur de l’électricité, au Mali. Contrairement à une règle universelle en la matière qui veut que l’ouverture se fasse par un appel d’offres à des partenaires étrangers en ouvrant le capital à un nombre restreint de partenaires, dans le cas d’EDM, un seul opérateur avait été retenu. C’est pourquoi nous nous inquiétons de cette colonisation énergétique imposée à notre pays par le groupe EDF de France. Les problématiques mises en avant sont essentiellement celles d’un pillage systématique du pays et d’une augmentation toujours accrue du coût de l’électricité au Mali.
La privatisation ratée de l’EDM a conduit au troc d’un monopole d’Etat en un monopole privé, exercé principalement par des sociétés multinationales étrangères guidées par le gain des profits. EDM doit changer pour l’honneur et le bonheur des maliens.
O’BAMBA dirpub@journalinfosept.com