Le pied de la chaîne de montagnes de la Kabylie se trouve à moins de 50 kilomètres à l’est d’Alger. C’est le foyer traditionnel des tribus berbères. Pendant des siècles, la Kabylie a offert une excellente couverture aux combattants de toutes sortes, comme les Algériens qui luttèrent contre les forces coloniales françaises dans les années 50 et les islamistes algériens qui combattirent les forces gouvernementales dans les années 90. Au cours des dernières années, la région a été le point focal de la radicalisation. Le 4 septembre 2008, le quotidien francophone indépendant, El Watan, avait recensé 18 incidents terroristes importants dans la région de Kabylie entre le 12 octobre 2006 et le 28 août 2008, y compris les enlèvements, les embuscades et attentats à la bombe. En raison de la situation sécuritaire, pratiquement aucun diplomate américain ne s’est aventuré par route à Tizi Ouzou, la capitale de la Kabylie depuis plus de 15 ans.
Les Berbères de la Kabylie sont le deuxième plus grand groupe de tribus berbères en Afrique du nord, avec des traditions millénaires encore évidentes dans leur langue, leur habillement, leurs bijoux et leur musique. Fièrement indépendants et fidèles à leur culture, les Kabyles se sont régulièrement confrontés au gouvernement central. Des émeutes violentes ont éclaté en 1998 lorsque le chanteur Kabyle, Lounès Matoub a été assassiné par des assaillants masqués dans un barrage routier. Les manifestants ont affirmé que le gouvernement a assassiné Matoub à cause de son opposition à la loi faisant de l’arabe la seule langue officielle de l’Algérie. D’autres ont blâmé les extrémistes islamiques pour sa mort à cause de sa musique.
En 2001, des affrontements violents ont éclaté à travers la Kabylie après la mort d’un étudiant en garde à vue. Ces affrontements, qui ont entraîné plus de 100 morts, ont été connus sous le nom du Printemps noir, une allusion au printemps berbère des années 1980, lorsque la société civile s’est dressée contre les restrictions imposées à la culture berbère. Le Printemps noir de 2001 a abouti à une marche massive de kabyles des montagnes à Alger. La police confronta violemment ce qui a été publiquement considéré comme une « invasion » de la capitale. Néanmoins, le gouvernement fit des concessions lorsque, en octobre 2001, la gendarmerie nationale décida de se retirer de la Kabylie. Les assemblées traditionnelles et démocratiques connues sous le nom de « Arouch » se propagèrent dans toute la région.
Aujourd’hui, la région est en proie au chômage et au manque de mobilité sociale, laissant les jeunes hommes frustrés. Sans emplois, infrastructure ou même sécurité dans leurs villages, les jeunes hommes « ont seulement la mosquée et le crime comme occupation », selon un habitant de la région. Dans le numéro du 4 septembre 2008 de El Watan, le parlementaire local Tahar Issadei essaya de décrire la menace terroriste dans sa région d’origine comme une « exagération médiatique », mais admit « qu’il y a un manque cruel d’infrastructures dans la région ». Un enseignant déclara que les seules entreprises qui fournissaient des emplois étaient des constructeurs privés et que tout le monde travaille dans la construction. Ce n’est peut-être pas une coïncidence que le taux de suicide en l’Algérie soit le plus élevé chez les Kabyles, et le taux d’exode des jeunes est également élevé. Un village perdit près d’un tiers de sa population en cinq ans; les jeunes étaient partis pour les centres urbains et les pays étrangers.
De façon anecdotique, l’ambassade américaine nota que pour un certain nombre de raisons, un pourcentage important de visas de diversité octroyé, provenait de Tizi Ouzou. Un professeur de l’Université de Tizi Ouzou affirma que sa région était fascinée par l’Amérique et que l’anglais devenait la langue étrangère préférée parmi les jeunes. « Ils ont besoin d’espoir », a-t-il dit, « et leurs rêves ne sont plus en France, mais en Amérique ». Selon Issadei, Président du conseil régional, les efforts de sa région pour promouvoir le tourisme et la croissance économique se confrontent à la situation sécuritaire. « Sans sécurité, nous ne pouvons simplement pas attirer des investissements », a-t-il déclaré.
Amadou O. Wane
Collaborateur externe,
Floride, Etats-Unis
amadou@amadouwane.com
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