mercredi 4 décembre 2024
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Après l’expulsion de son Ambassadeur au Mali: La France complètement piégée vis-à-vis de ses partenaires européens

La décision est sans appel : l’Ambassadeur de la France au Mali, Joëlle MEYER,  a désormais trois jours pour quitter le Mali. Il fut convoqué à la mi-journée du lundi dernier au ministère malien des Affaires étrangères, suite aux propos tenus ces derniers jours par Jean-Yves le Drian.

Après des mois d’escalade verbale entre les deux pays, le chef de la diplomatie française, avait jugé « illégitimes » les autorités de transition. L’ambassadeur de France Joël Meyer a 72 heures pour quitter le Mali. Le communiqué du gouvernement a été lu sur les ondes de l’ORTM, la télévision nationale :

« Cette décision fait suite aux propos hostiles et outrageux » tenus « récemment » par Jean-Yves le Drian et à la « récurrence de tels propos par les autorités françaises à l’égard des autorités maliennes en dépit des protestations maintes fois élevées. »

Ces derniers jours, dans les médias français, le chef de la diplomatie française avait jugé « illégitimes» les autorités maliennes de transition et dénoncé leur « fuite en avant ». Il a aussi estimé que le groupe russe Wagner était déjà à l’œuvre au Mali, et qu’il y « protégeait les autorités en échange de l’exploitation des richesses minières du Mali. »

Des propos jugés « contraires au développement de relations amicales entre nations. » Les autorités maliennes réaffirment enfin leur «disponibilité » à « maintenir le dialogue et poursuivre la coopération avec l’ensemble de ses partenaires internationaux, y compris la France », mais « dans le respect mutuel et sur la base du principe cardinal de non ingérence. »

Paris se soumet à la décision

Peu après l’annonce de l’expulsion sous 72 heures de l’ambassadeur français au Mali, le quai d’Orsay a assuré prendre « note » de cette décision.

La France « prend note » de l’expulsion de son ambassadeur au Mali, a déclaré  le ministère français des Affaires étrangères, rappelant sa solidarité à l’égard de ses partenaires européens et son engagement à poursuivre la lutte antiterroriste.

« La France prend note de la décision des autorités de transition (maliennes) de mettre fin à la mission de l’ambassadeur de France au Mali. En réaction, la France a décidé de rappeler son ambassadeur », a indiqué le Quai d’Orsay.

Aussi, Paris exprime « sa solidarité vis-à-vis de ses partenaires européens, en particulier du Danemark », dont le contingent vient d’être expulsé par le pouvoir actuel de Bamako.

Mais une certitude : la France n’a pas du tout vu venir ce qui se passait. En effet, le départ précipité de l’ambassadeur de la France au Mali ‘’sous 72 heures’’ marque un nouveau durcissement des tensions entre le pays d’Assimi et celui de Macron.

Décidément, il y a une nouvelle étape dans la rupture entre la France et le Mali, les autorités maliennes ont demandé à l’ambassadeur de France de quitter le pays. La rupture semble consommée entre la France et le Mali. Le 27 janvier, à la télévision nationale, le porte-parole de la junte, le colonel Abdoulaye Maïga, invitait la ministre des Armées Florence Parly à se taire, après qu’elle ait déclaré à l’Assemblée Nationale que la junte multipliait les « provocations ».

La stratégie très habile des autorités maliennes

Pour Antoine Glaser, journaliste et écrivain spécialiste des rapports entre la France et l’Afrique qui vient récemment de publier chez Fayard ‘’Le Piège Africain de Macron’’, c’était prévisible : « Habituellement, c’est la France qui prend les devants, maintenant ce qui change, c’est qu’on n’est plus dans la Françafrique, on est dans l’Afrique France ! Cette junte est beaucoup plus intelligente qu’on ne l’imagine. C’est très fort de leur part. Surtout après les récentes déclarations de Florence Parly et Jean-Yves Le Drian qui déclaraient ‘on ne peut pas rester comme ça ».

« Le fait de prendre les devants est une stratégie très habile » selon Antoine Glaser, surtout dans ce moment où beaucoup de nations africaines éprouvent un fort sentiment anti-Français. Cela permet  aux autorités transitoires du Mali de renforcer leur position en interne. Quand le ministre des Affaires étrangères français Jean-Yves Le Drian qualifie le pouvoir malien d’« illégitime » et ses décisions d’« irresponsables », après qu’il eût poussé le Danemark à retirer son contingent de forces spéciales, le gouvernement du Mali expulse, immédiatement, l’ambassadeur de la France.  Et une fois le retrait de l’ambassadeur, les seuls qui se parlent après sont les services secrets. La DGSE va prendre le relais pour les relations avec le pouvoir malien.

Un camouflet pour la France

Les conséquences de cette rupture sont importantes pour la France car elles remettent en cause sa stratégie militaire. En clair, la situation piège complètement la France vis-à-vis de ses partenaires européens. Pire, elle remet en cause la stratégie de la France pour ne plus être en première ligne et de faire monter la présence des alliés européens dans la force Takuba.

À cet effet, le spécialiste des rapports entre la France et l’Afrique Antoine Glaser, nous rappelle le contexte dans lequel ce renvoi intervient, à quelques jours du sommet de l’Union européenne avec l’Union africaine où ‘’les questions de développement et d’infrastructure en Afrique seront abordées’’. Tout le monde aura à l’esprit le camouflet que vient de subir la France. « C’est très habile de la part de la junte », commente-il.  

Toutefois, Bamako a réitéré sa disponibilité à maintenir le dialogue et poursuivre la coopération avec l’ensemble de ses partenaires internationaux, y compris la France, dans le respect mutuel et sur la base du principe cardinal de non-ingérence. Mais dans les faits comment ça va se passer ? « Une fois le retrait de l’ambassadeur, les seuls qui se parlent après sont les services secrets » explique Antoine Glaser qui ajoute que la DGSE va prendre le relais pour les relations avec le pouvoir malien.

En renvoyant l’ambassadeur de la France, « ce n’est qu’un pas de plus vers un discours de séparation avec la France » lance Antoine Glaser qui souligne que tous ces cadres « sont formés en Russie bien sûr, et ils doivent être confortés par les Russes. Il faut se rappeler ce qu’a dit le patron du groupe présumé Wagner, Prigojine, au moment du putsch au Burkina Faso, qui saluait une ère de décolonisation ».

Jusqu’à aujourd’hui, la France a toujours cru qu’elle était chez elle en Afrique

Antoine Glaser souligne également l’influence grandissante de la Chine, « d’abord via les infrastructures et les investissements économiques, mais maintenant également au niveau sécuritaire. Jusqu’à ce jour, c’était la France qui votait les résolutions au Conseil de sécurité de l’ONU. Mais ça aussi, ça ne va pas durer des années non plus ! La Chine voudra jouer un rôle grandissant dans ces instances surtout qu’elle clame qu’elle est le deuxième contributeur aux opérations de maintien de la paix ».

Pour Antoine Glaser, « la France n’a pas du tout vu venir ce qui se passait au Mali. Ce n’est pas la lutte contre le terrorisme qui est en cause, mais nous vivons un tournant historique. Jusqu’à aujourd’hui, la France a toujours cru qu’elle était chez elle en Afrique » mais depuis la chute du mur de Berlin en Europe, les choses ont changé. « Cela a un impact sur l’Afrique qui se mondialise complètement. Alors que Paris a continué, compte tenu du fait de sa présence militaire, à ne pas le voir ». En attendant, c’est une nouvelle étape dans la rupture entre la France et le Mali. Ce qui finira par un revers cinglant pour Paris dans le Sahel.

Jean Pierre James LE NOUVEAU REVEIL 

Djibril Coulibaly

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