C’est désormais un secret de polichinelle, le parti majoritaire à l’Assemblée Nationale, le RPM, traverse aujourd’hui une crise profonde. Les barons du parti ne s’en cachent même plus et toutes les occasions sont utiles pour se régler les comptes. La défaite dès le premier tour du candidat du RPM aux législatives partielles de Baroueli est l’une des conséquences de la guéguerre qui couve au sein du parti présidentiel. Cette guerre de positionnement est entretenue par cinq têtes de proue que sont Boulkassoum Haidara, Bocary Tréta, Abdoulaye Idrissa Maiga, Issiaka Sidibé et Mahamane Baby. Chacun de ces 5 caciques du parti majoritaire ambitionne d’occuper le fauteuil laissé vacant par IBK après son élection à la magistrature suprême. A cause de leurs EGO surdimensionnés, ils sont en train de prendre en otage le parti des tisserands, dont les militants semblent aujourd’hui désemparés et contraints de choisir un camp ou un autre. Mesurent-ils les conséquences de leurs prétentions sur l’avenir immédiat du RPM? Le Président IBK au RPM sera-t-il comme son ex mentor Alpha Oumar Konaré qui est accusé d’avoir assisté passivement à la scission de l’ADEMA ? Qui sont ces cinq militants aux parcours politiques différents et qui par leurs ambitions inconciliables désorientent aujourd’hui les militants à la base de leur parti ?
Nul ne peut aujourd’hui prédire l’épilogue de ce combat de titans au Rassemblement pour le Mali tant les positions semblent antagoniques et si tranchées. Tout porte à croire que le Président de la République sera le premier à en faire les frais si tant est qu’il compte sur un deuxième mandat. Son premier soutien reste, avant tout et sans aucun doute le RPM, même si en longueur de journée il fait croire à ses camarades qu’il ne sera pas l’otage d’un parti se jugeant élu par tout un Peuple. Le Président IBK endossera la responsabilité morale des conséquences de la crise au sein du RPM si d’aventure il devait assister sans agir à la déconfiture de son parti. Il est le seul à avoir la solution à même de rappeler tous les prétendants à l’ordre. En attendant l’implication d’IBK pour une issue heureuse de cette crise, analysons les prétentions des 5 cadres du RPM qui font parler d’eux, des comités à la base au Bureau politique National en passant par les sous sections et les sections.
Dr Boulkassoum Haidara : M. Haidara est le président par intérim du Rassemblement pour le Mali depuis l’élection d’IBK à la Magistrature Suprême. Il est en même temps le Président du Conseil Economique Social et Culturel. La force du sexagénaire semble être sa grande sagesse. Il est arrivé à fédérer autour de lui les différents clans qui se font la guerre. Président de la Convention de la Majorité Présidentielle, M. Boulkassoum Haidara a toujours intervenu pour rectifier les tirs malveillants du passionné secrétaire général du RPM, Bocari Tréta. Il jouirait d’une immense estime du Président IBK. Ses handicaps semblent être à la fois sa distance avec les militants, comme en témoigne son échec aux dernières élections législatives de 2013 en Commune I et son âge avancé pour impulser une nouvelle dynamique au RPM. Ses qualités suffiront-elles à le confirmer comme président successeur d’IBK à la tête du RPM au prochain congrès ?
M. Bocari Tréta : M. Tréta, le secrétaire général du RPM, est sans nul doute le cadre le plus proche des militants à la base et le plus politique. Il est l’un des membres fondateurs du Rassemblement pour le Mali et directeur de campagne d’IBK en 2002. Impulsif sans jamais être méchant, M. Tréta a été de tous les combats du parti pour son implantation, mais aussi et surtout pour sa consolidation. A cet égard, il est de toute évidence le mieux indiqué et de loin le plus légitime vis-à-vis de tous ses rivaux au sein du RPM. Il est plus politiquement, socialement rassembleur que tous les autres candidats qui lui disputent la présidence du parti. Celui qui aurait pu être ministre d’Etat sous IBK au Développement Rural pourrait être rattrapé par le lourd handicap lié à l’ardoise très noire laissée par lui dans sa gestion calamiteuse des engrais et des tracteurs frelatés qui ont terni son image. Lui qui semble n’avoir d’autres programmes que la réélection d’IBK qu’il espère gagner avec ou sans la CMP. Pourra-t-il malgré tout avoir la confiance des congressistes pour présider aux destinées d’un parti qui lui revient de droit?
M. Abdoulaye Idrissa Maiga : L’actuel ministre de l’Administration Territoriale fut le directeur de campagne d’IBK en 2013 sur proposition de Tréta. On dit de lui qu’il est intègre, structuré et gros travailleur, mais distant des militants et très suffisant. M. Maiga est aujourd’hui le plus redoutable opposant à Bocari Tréta. Qu’est ce qui a pu si vite opposer ces deux hommes que tout liait il y a juste quelques années ? Abdoulaye Idrissa Maiga fut l’un des conseillers techniques de Tréta alors ministre de l’élevage sous ATT. On affirme tout haut que c’est Tréta qui l’aurait propulsé jusqu’au Bureau Politique National. Mais aujourd’hui, ils sont ce que furent Senghor et Mamadou Dia, ou encore IBK et Alpha Oumar Konaré dont les amitiés ne résistèrent guère à la cohabitation politique. M. Maiga qu’on dit proche de la première dame n’en serait pas un à part le nom de famille qu’ils partagent. Ils ne se connaissaient avant son adhésion au RPM, ni d’Adam ni d’Eve. Tout porte à croire qu’il a le soutien du président IBK. Les militants lui feront-ils suffisamment confiance pour lui confier les rênes de leur parti ?
Honorable Issiaka Sidibé : M. Sidibé est, dans la hiérarchie des institutions, le plus gradé de tous les cadres du RPM après IBK. Il en est même son dauphin constitutionnel. Ses détracteurs le trouvent qu’il n’a pas bien fait ses humanités et qu’il serait d’un niveau intellectuel en dessous de la moyenne comme pourrait en attester ses différentes frasques dans la gestion de la 3ème institution de la République. Aujourd’hui, président de l’Hémicycle, M. Sidibé a de bonnes raisons de prétendre à la succession politique de son « gendre » IBK surtout avec le soutien de la section de Koulikoro, sa base et des réseaux RPM de ses nombreux courtisans à l’Assemblée. Mais, comme Abdoulaye Idrissa Maiga, l’honorable Issiaka Sidibé, militant sans nul doute, n’était pas très bien connu avant l’avènement d’IBK au pouvoir, par de nombreux militants à la base. Le Peuple RPM va-t-il le laisser succéder à IBK à la tête du parti ?
M. Mahamane Baby : Actuel ministre de l’Emploi et de la Formation Professionnelle, un membre du BPN, premier président du mouvement de la jeunesse RPM, est aujourd’hui secrétaire général de la section du parti à Goundam. Ce jeune loup aux dents longues veut jouer au gros outsider. Il ne s’affiche pas comme les deux gros mastodontes, Tréta et Maiga, mais il est aux aguets et est capable de jaillir sur la première occasion. Celui qui fut pendant plusieurs années président de la jeunesse RPM, est loin d’être un militant de la 25e heure. Ses handicaps peuvent être, entre autres, cet éternel préjugé de jeune qu’on lui colle, son manque de courage et de poigne à s’imposer comme une alternative crédible à la vielle garde qui ne cédera pas d’un IOTA dans leurs ambitions.
En définitive, le Président de la République IBK qui fut pendant plus de 12 ans président du parti, est interpelé pour faire taire les rancœurs et autres ambitions démesurées des uns et des autres en ramenant chacun à sa juste valeur. A défaut d’un candidat consensuel, le RPM innovera-t-il en imposant pour la première fois le vote pour élire son président ? De la capacité d’IBK à rassembler ou à réconcilier sa famille politique autour d’un candidat dépendra ses chances pour un probable deuxième mandat.
Youssouf Sissoko
youssouf@journalinfosept.com
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