Au Mali, nous avons en face depuis des années une société en crise multidimensionnelle par le délitement des élites (politiques et administratives) engendré par l’appât du gain facile qui découle de la corruption et de l’impunité. Aujourd’hui, il revient au peuple souverain du Mali de concevoir, d’adopter et appliquer un projet d’émergence du Mali, du Maliba (Grand Mali).
«La nature a horreur du vide», dit l’adage. Les séparatistes, les narco-trafiquants et les hordes politiques se sont donc emparés des ruines d’un Etat failli dans une démocratie bananière. L’impérialisme qui somnole mais ne dort jamais, joue sur les contradictions internes en transformant les fissures en failles pour pénétrer dans la muraille afin de reconquérir le pays de Modibo Kéita.
Pendant ce temps, c’est la logique de prédation qui guide la classe politique malienne au détriment de la conscience et de la consistance patriotiques. Face à cette situation, trois problématiques se dressent sur la route du redressement national. Primo, l’urgence du rétablissement de l’intégrité territoriale et de la sécurité sur l’ensemble du pays. Secundo, la nécessité de vite rétablir l’autorité de l’Etat par la reprise en main, avec fermeté et dans l’équité, de l’administration publique chargée de la mise en œuvre de la politique gouvernementale. Et, enfin tertio, créer une synergie des moyens et conditions d’émergence de Maliba dans une Afrique en marche. Pour ce faire, ile est indispensable de revenir à la vision des pères fondateurs d’un pays culturellement, politiquement et économiquement «DEBOUT» sur le sentier du progrès. A l’indépendance, il y avait un parti et des dirigeants qui mettaient le Mali au-dessus de tout. Aujourd’hui, le malheur est que les partis et leurs dirigeants sont tournés vers eux-mêmes sans souffle vivifiant. Dans un tel contexte, le préalable est de réunir les forces patriotiques qui vont s’atteler à la construction de la force alternative à la décadence actuelle. Mais cela ressemble à la quadrature du cercle dans un pays où chacun veut être chef ; alors que les hommes et les femmes dédiés à la cause du peuple ont seulement besoin d’un cadre organisationnel pour marquer l’histoire de leur pays. Les centaines de médaillés de l’indépendance étaient irrésistiblement saisis et entrainés par la passion patriotique.
La conscience patriotique, l’autodiscipline, la capacité de création et la rigueur stratégique ! Voilà les caractéristiques pour faire bouger les lignes de l’histoire. Ce sont des hommes et des femmes trempés qui vont organiser, éduquer et conduire le peuple dans sa lutte contre le désordre sociétal actuel. Un éveil des consciences sur la base d’un véritable projet de société inspiré par une vision claire et nette des défis à relever et de leurs enjeux pour que plus jamais notre nation ne retombe aussi bas. Et un projet de société étant la vision d’ensemble de l’organisation et du fonctionnement du système que l’on a l’intention de mettre en œuvre, il faut des patriotes-bâtisseurs dans un cadre conceptuel axé sur une vision claire des voies, moyens et conditions de rétablissement de l’intégrité territoriale, de la paix et de la sécurité ; d’émergence du Mali.
Il nous faut donc nous réconcilier avec nos valeurs sociétales comme l’honneur, la dignité, la justice, la solidarité… Elles peuvent être conciliées avec la démocratie à condition que «les gouvernants exécutent ce qui a été convenu de commun accord en faveur du peuple». Le respect de l’éthique et de la déontologie de bonne gouvernance au service du peuple est aussi une condition sine qua non pour reprendre le flambeau confisqué des mains des pères de l’indépendance le 19 novembre 1968.
En plus de la nécessaire réappropriation de nos valeurs morales, de la maitrise et application de la science et de la technologie à notre production de biens et services, un triple réarmement (culturel, politique et économique) est souhaitable comme vecteur d’une politique d’innovation, de créativité et de formation continue… Dans un monde où l’économie est à base de savoir, réaliser les transitions nécessaires afin de combler, en quelques décennies, les GAP issus de 400 ans de pillages, d’agressions, de violes culturels etc. du Mali voire de l’Afrique à travers 10 Transitions fondamentales, notamment culturelle (capacité de compréhension et de création) ; de la gouvernance ; énergétique (l’âme du développement) ; numérique (refondation radicale de notre système d’éducation et de recherche), scientifique et technologique (infrastructures et équipements clés en tête et pas seulement clés en main) ; industrielle (notre avenir) ; agricole (notre éternité)…
Il ne faut pas se voiler la face, la tâche est énorme, le chemin long et semer d’embûches car beaucoup de nos «amis» et «alliés», n’ont pas intérêt à ce que notre pays puisse voir le bout du tunnel de si tôt. Comme le martelait souvent le Révérend Martin Luther King (Homme politique et Pasteur, 1929-1968), «la véritable grandeur d’un homme ne se mesure pas à des moments où il est à son aise, mais lorsqu’il traverse une période de controverse et de défis». On ne peut alors s’empêcher de paraphraser Joshua J. Marine selon qui «les défis rendent la vie intéressante, les surmonter lui donne un sens» puisqu’ils sont des «moteurs qui nous poussent vers le haut».
Il est temps que les Maliens prennent de la hauteur face à toutes ces convoitises malsaines qui poussent progressivement la République au bord du précipice de la dislocation pour toujours !
Diatrou Diakité
Consultant indépendant