Au Mali, aucun espace, peu importe son statut, n’échappe à l’appétit vorace des spéculateurs fonciers. Aujourd’hui, dans la forêt classée de Tienfala, on parle de plus de cinquante titres fonciers qui y ont été attribués fictivement. Par qui? Et pour qui?
Au Mali, le statut d’un espace ne le met pas à l’abri des spéculateurs fonciers. La forêt classée de Tienfala est en train d’en faire les frais. Cette forêt qui a été classée, il y a 77 ans, fait aujourd’hui l’objet de prédation foncière. Il y aurait, selon le Maire de la Commune de Tienfala, N’Fa Diabaté, une cinquantaine de titres fonciers attribués faussement. La même révélation avait été faite en présence du Chef du gouvernement, Modibo Kéïta, qui a procédé, dans cette même forêt, au lancement de la campagne nationale de reboisement le 6 août dernier.
C’est d’ailleurs face à ce phénomène que les plus hautes autorités nationales avaient entamé une suspension d’attribution et de cession de terrains depuis 2014. Après deux années de suspension, la mesure a finalement été levée le jeudi 11 août dernier par le Ministre des Domaines de l’Etat et des Affaires foncières, Mohamed Aly Bathily. Si la décision de mettre plusieurs secteurs d’activités au chômage pendant deux ans était contestable, il faut noter que ce sont des pratiques du genre qui ont conduit les autorités à être si drastiques.
La forêt de Tienfala, déclarée classée depuis 1939, s’étend sur une superficie de 3000 hectares. Elle constitue une réserve stratégique au bénéfice des villes de Koulikoro et de Bamako. Elle protège, selon le Ministre de l’Environnement, de l’Assainissement et du Développement durable, Kéïta Aïda M’Bo, la ville de Bamako contre les catastrophes naturelles comme les éboulements, les pluies torrentielles et les vents violents et constitue, avec les forêts classées de Faya et des monts Mandingues, une chaine de poumons d’absorption de la pollution de l’air engendrée par les villes de Bamako et Koulikoro. Des villes qui sont en pleine expansion.
Dans le Mali des paradoxes, les autorités qui ont classé cette forêt sont les mêmes à les déclassifier sous le manteau.
Mohamed Dagnoko : LE COMBAT