L’ancien Président du Mali Amadou Toumani Touré, chassé du pouvoir par le « coup d’Etat le plus stupide au monde », perpétré un 22 mars 2012, a certainement eu le sourire aux lèvres en apprenant la menace de mise en accusation d’IBK pour haute trahison. Comme une revanche de l’histoire, IBK a lui aussi une épée de Damoclès suspendue sur sa tête. Il subira désormais une des tortures morales les plus graves pour un chef d’Etat à savoir l’éventualité d’une accusation pour haute trahison. Redescendra-t-il enfin de son intouchable piédestal royal pour écouter son peuple ou balaiera-t-il cette menace d’un revers de main ?
Après l’expiration de l’ultimatum au Président de la République le 15 août à minuit, pour qu’il retire son projet de révision constitutionnelle, la plateforme An Tè A Bana n’entend plus reculer jusqu’au retrait pur et simple du projet. Elle avait voulu organiser une grande marche le mercredi 16 août pour exiger la mise en accusation d’IBK pour haute trahison. Reportée de 72 heures à la demande des autorités coutumières et religieuses, c’est probablement le samedi 19 août qu’elle aura lieu. Cette nouvelle revendication, qui est celle de mettre en accusation IBK, est non seulement un tournant décisif dans le combat contre la révision de la constitution du 25 février, et aussi semble être une revanche de l’histoire en faveur d’ATT. L’on se souvient, il y a quatre ans et face aux multiples défis qui se posaient au Mali, le Président IBK avait trouvé opportun et judicieux de traduire ATT devant la Haute Cour de justice pour trahison. Le régime reprochait à ATT « d’avoir, en sa qualité de Président de la République du Mali, donc Chef Suprême des Armées, et en violation du serment prêté, facilité la pénétration et l’installation des forces étrangères sur le territoire national, notamment en ne leur opposant aucune résistance ».
Il lui était reproché également d’avoir « détruit ou détérioré volontairement un outil de défense nationale » ; « d’avoir participé à une entreprise de démoralisation de l’armée caractérisée par les nominations de complaisance d’officiers et de soldats incompétents et au patriotisme douteux à des postes de responsabilité au détriment des plus méritants entrainant une frustration qui nuit à la défense nationale ». Il a fallu juste un temps relativement court et surtout l’enlisement de la crise au nord du Mali, pour que ce projet de mise en accusation d’ATT puisse être abandonné. Malgré la fin de la poursuite, la blessure morale restera longtemps ouverte. Aujourd’hui, le temps a été le meilleur allié d’ATT, car il n’a suffi que de quelques années pour qu’IBK soit « rattrapé par l’histoire », parce qu’il est question, pour la plateforme du Non de le poursuivre, lui aussi, pour haute trahison. Même si les faits reprochés à ATT ne sont pas les mêmes que ceux d’IBK, leur qualification est la même, à savoir la haute trahison. ATT pourrait désormais rire à gorge déployée.
Même si elle a lieu, la marche du samedi 19 août 2017, n’aboutira pas à la mise en accusation d’IBK pour haute trahison, compte tenu de la large majorité dont il jouit à l’Assemblée Nationale. Toutefois, cette manifestation pourrait amener le président, non seulement, à rectifier son tir en retirant son projet de révision, mais aussi et surtout à comprendre que la roue de l’histoire tourne.
Youssouf Sissoko
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