jeudi 28 mars 2024
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IMPACT DE LA PANDEMIE DE COVID-19 : L’Afrique subsaharienne exposée à sa première récession depuis 25 ans

La croissance en Afrique subsaharienne a été touchée de plein fouet par la pandémie de coronavirus et devrait se rétracter fortement entre 2019 et 2020. Elle risque ainsi de passer de 2,4 % à une fourchette comprise entre -2,1 et -5,1 %. La conséquence immédiate d’une telle situation serait alors de plonger la région dans sa première récession depuis plus de 25 ans. C’est en tout cas la crainte exprimée par la dernière édition de «Africa’s Pulse», le rapport semestriel de la Banque mondiale consacré à la conjoncture économique africaine qui a été publié le 9 avril 2020 à Washington, aux Etats-Unis

 

«La pandémie de Covid-19 teste les limites des sociétés et des économies du monde entier, et elle risque de porter un coup particulièrement dur aux pays africains», a déclaré Hafez Ghanem, vice-président de la Banque mondiale pour l’Afrique. «Nous mobilisons un maximum de ressources pour aider les pays à répondre aux besoins médicaux immédiats et essentiels à la survie de leur population», a-t-il ajouté.

L’institution de Bretton Woods a ainsi appelé les créanciers bilatéraux officiels à «un moratoire du service de la dette» afin de libérer des liquidités indispensables pour renforcer les services de santé, donc de mieux faire face au COVID-19 et sauver des vies. Cette mesure permettrait aussi de «financer les filets de protection sociale pour préserver les moyens de subsistance, aider les travailleurs qui ont perdu leur emploi, soutenir les petites et moyennes entreprises et assurer la sécurité alimentaire», a précisé Hafez Ghanem.

Les auteurs du rapport ont recommandé aux décideurs africains de concentrer leur stratégie sur l’objectif de sauver des vies et de protéger les moyens de subsistance, en s’attachant à renforcer les systèmes de santé et à réagir rapidement pour minimiser les perturbations dans les chaînes d’approvisionnement alimentaire. Ils ont également préconisé le déploiement des programmes de protection sociale, en recourant notamment aux transferts monétaires, à des distributions d’aliments et des dispenses de redevances… afin de venir en aide aux ménages, particulièrement aux travailleurs du secteur informel.

Les pays exportateurs de pétrole sont les plus exposés

L’analyse chiffre les pertes de production liées à la pandémie de Covid-19 entre 37 et 79 milliards de dollars en 2020, sous l’effet conjugué de plusieurs facteurs comme la désorganisation des échanges et des chaînes de valeur qui pénalise les exportateurs de produits de base et les pays fortement intégrés dans les filières mondiales ; la réduction des flux de financement étrangers (transferts de fonds des migrants, recettes touristiques, investissements directs étrangers, aide étrangère) et la fuite des capitaux… Sans minimiser l’l’impact direct de la pandémie sur les systèmes de santé et les perturbations consécutives aux mesures de confinement ainsi qu’à la réaction de la population.

Si la plupart des pays africains sont touchés à des degrés divers par la pandémie, la croissance du produit intérieur brut réel devrait, en particulier, marquer fortement le pas dans les trois plus grandes économies de la région (le Nigéria, l’Angola et l’Afrique du Sud) sur fond de faiblesse persistance de la croissance et des investissements.

Mais, d’une manière générale, les pays exportateurs de pétrole seront les plus durement touchés tandis que la croissance devrait fortement ralentir dans les deux zones les plus dynamiques de la région : l’Union économique et monétaire de l’Afrique de l’Ouest et la Communauté d’Afrique de l’Est ! Et cela en raison de l’atonie de la demande extérieure, de la rupture des chaînes d’approvisionnement et de la perturbation des productions nationales. L’activité touristique devrait payer au prix fort les graves perturbations dans le secteur du voyage.

La crise du Covid-19 risque également de provoquer une crise alimentaire en Afrique, la contraction de la production agricole risquant d’atteindre entre 2,6 % dans le scénario optimiste mais jusqu’à 7 % en cas de blocage commerciaux. Les importations de denrées alimentaires vont elles aussi fortement reculer (de 13 à 25 %), plombées par des coûts de transaction plus élevés et une demande intérieure en baisse.

Un allègement de la dette des pays en développement plus qu’urgent

«Face à la pandémie de Covid-19, les pays prennent non seulement des mesures de confinement, mais ils déploient aussi un arsenal de mesures budgétaires et monétaires d’urgence, avec bon nombre de banques centrales dans la région prenant des décisions importantes, en abaissant notamment les taux d’intérêt ou en injectant à un niveau inédit des liquidités dans l’économie», a indiqué Albert Zeufack, économiste en chef de la Banque mondiale pour l’Afrique. Mais, a-t-il ajouté, «il faut veiller à ce que la réponse budgétaire intègre bien les interventions de protection sociale destinées en particulier aux travailleurs du secteur informel et sème les graines pour rendre nos économies plus résilientes».

Les auteurs du rapport ont mis l’accent sur la nécessité d’apporter une réponse politique adaptée reflétant la structure des économies africaines (notamment la place importante du secteur informel) et les contraintes spécifiques auxquelles sont confrontés actuellement les responsables politiques, en particulier la réduction des marges de manœuvre budgétaires, les risques accrus de surendettement et le manque global de capacités opérationnelles pour répondre à la crise.

«Les mesures immédiates sont importantes, mais seul un allégement de dette permettra d’injecter les ressources indispensables pour lutter contre la pandémie et préserver la stabilité macroéconomique de la région», a souligné Cesar Calderon, économiste principal à la Banque mondiale et auteur principal du rapport.

Le Groupe de la Banque mondiale prend des mesures rapides et de grande envergure en vue d’aider les pays en développement à renforcer leur action contre la pandémie et à améliorer la veille sanitaire et les interventions de santé publique. Et cela tout en soutenant le secteur privé pour permettre aux entreprises de poursuivre leurs activités et à maintenir les emplois. Il prévoit ainsi d’apporter jusqu’à 160 milliards de dollars de financements au cours des 15 prochains mois afin de les aider à protéger les populations pauvres et vulnérables, soutenir les entreprises et favoriser le redressement de l’économie.

Kader Toé

Djibril Coulibaly

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